Intervention de Paul Christophe

Réunion du mardi 30 avril 2019 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe :

Je vous remercie, madame la présidente, madame la rapporteure, pour l'honneur que vous me faîtes. Je me réjouis évidemment de voir ce texte, dont j'avais été le rapporteur en première lecture, inscrit à l'ordre du jour de nos travaux pour une seconde lecture. Comme Mme la rapporteure l'a rappelé, il s'agit d'un texte d'initiative sénatoriale de notre collègue Jocelyne Guidez. Je tiens à remercier notre rapporteure, Mme Nathalie Elimas, et le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, d'avoir fait le choix de reprendre cette proposition de loi dans leur niche parlementaire. Du reste, sans leur soutien en première lecture, ce texte aurait été rejeté, et peut-être même oublié, puisqu'il avait fait l'objet d'une motion de renvoi en commission déposée par le groupe La République en Marche. Sans l'appui des autres groupes politiques et de certains députés du groupe majoritaire, cette proposition de loi n'aurait pas été adoptée.

La majorité jugeait ce texte prématuré, en raison des concertations qui étaient alors en cours sur le grand âge et l'autonomie. Depuis, nous avons pris connaissance du rapport de M. Dominique Libault, qui définit les grands axes du futur projet de loi sur la dépendance, dont l'examen devrait avoir lieu à l'automne prochain. Je ne suis pas surpris de retrouver dans ce rapport les propositions qui étaient initialement contenues dans le texte de Mme Jocelyne Guidez, et qui ont été supprimées une à une lors de l'examen du texte par notre assemblée. De fait, si ce texte a finalement pu être examiné en séance, il en est cependant sorti appauvri, du fait de l'adoption d'amendements de suppression de plusieurs articles, qui l'ont peu à peu vidé de sa substance.

Dans sa version issue des premiers travaux du Sénat, la proposition de loi était composée de huit articles, et sa mesure phare consistait à indemniser le congé de proche aidant. Pour information, cette mesure est devenue la proposition n° 24 du rapport Libault. Cette indemnisation est plus que nécessaire. En effet, sur les quelque 270 000 salariés potentiellement éligibles au dispositif en vigueur, seuls une dizaine l'ont utilisé depuis 2016. Ce chiffre révèle clairement le manque d'attractivité de la mesure, puisque très peu de personnes sont en capacité d'abandonner une année de revenus. L'absence d'indemnisation est un obstacle rédhibitoire au recours à ce congé. Pour continuer à s'occuper de leurs proches, les aidants optent plutôt pour un arrêt maladie, avec toute la culpabilité et l'inconfort que cette démarche entraîne. L'indemnisation du congé de proche aidant aurait pu devenir une réalité effective dès décembre 2018, mais il en a été décidé autrement, et les aidants devront donc encore attendre, ce qui est tout de même regrettable. Que de temps perdu, alors que plus de 8 millions d'aidants attendent de notre part des mesures concrètes pour améliorer leur quotidien ! En décembre, je vous avais déjà alerté sur la nécessité d'agir et d'envoyer un signal positif à ceux de nos concitoyens qui doivent faire face au défi de la perte d'autonomie et qui demandent des mesures pragmatiques avant, peut-être, une réforme plus globale.

La proposition de loi de Mme Guidez est certes amoindrie, mais quelques dispositions ont toutefois pu être sauvées. Deux articles ont déjà été adoptés conformes. Le premier prévoit d'intégrer au champ obligatoire de la négociation collective de branche le thème de la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés proches aidants. Le second étend aux fonctionnaires l'expérimentation du relayage introduit par la loi pour un État au service d'une société de confiance, dont le décret d'application vient tout juste d'être publié, ce dont nous pouvons nous réjouir. À ce stade de nos travaux, deux articles restent encore en discussion. L'article 5 bis, d'abord, permet de mobiliser une partie des ressources de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, afin de financer des actions en faveur des proches aidants. L'article 6, ensuite, permet de mettre en place, dans le dossier médical partagé, un volet « aidant », afin d'inscrire le nom de l'aidé dans le DMP de l'aidant. Nous soutiendrons évidemment ces deux articles sans réserve et nous ne présenterons aucun amendement, afin de favoriser une adoption conforme et une mise en oeuvre rapide.

Cette proposition de loi est une nouvelle avancée dans la reconnaissance des proches aidants. Elle aurait pu être encore plus significative, si le texte déposé en décembre n'avait pas été découpé par la majorité présidentielle. La situation des proches aidants est un sujet de société qui doit dépasser les clivages partisans et politiques. À ce titre, la proposition de loi de Mme Jocelyne Guidez aurait dû recevoir l'assentiment de tous, comme le texte que je vous ai présenté en décembre 2017. Je regrette vivement les attitudes partisanes, qui font fi de l'urgence et des attentes des proches aidants. Quoi qu'il en soit, le groupe UDI, Agir et Indépendants soutiendra bien évidemment l'adoption de ce texte, ou de ce qu'il en reste. Je fonde par ailleurs de grands espoirs dans les débats que nous aurons prochainement sur la loi relative à la dépendance, notamment pour le volet consacré aux proches aidants. J'espère que les propositions et les recommandations qui ont été formulées depuis deux ans au sein de cette commission – et j'y associe tous ceux de mes collègues qui se sont saisis de cette question avant moi – pourront être inscrites dans le texte et être mises en oeuvre pour améliorer ce que nous tendons à appeler l'aide aux aidants. Je vous en remercie d'avance.

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