Intervention de Elsa Faucillon

Séance en hémicycle du vendredi 10 mai 2019 à 9h30
Restauration de notre-dame de paris — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElsa Faucillon :

L'incendie qui a frappé Notre-Dame nous a toutes et tous émus. Il est un nouveau témoignage de la fragilité des choses que nous pensions insubmersibles. Il y avait une peur de voir s'effacer du paysage parisien Notre-Dame et, avec elle, une partie de notre histoire. Nous avons regardé, avec angoisse et admiration, les pompiers agir. La cathédrale n'est pas seulement une prouesse architecturale et un lieu de culte, c'est une oeuvre, une conquête du ciel par des milliers de compagnons, pendant des dizaines et des dizaines d'années ; elle doit son existence à leur savoir-faire, à leur sacrifice parfois. C'est aussi une audace, dont la flèche construite au XIXe siècle et tombée en flammes témoignait. C'était enfin l'oeuvre d'art sublimée et sublimant les écrits d'Hugo, de Nerval ou d'Aragon.

Cette cathédrale gothique est un chaînon de la conquête de la liberté.

Dans ces moments de tension, les mots prononcés et les premières décisions prises sont d'une importance particulière, car ils répondent directement à une émotion collective, française et même mondiale. Cela peut paraître futile quand tant de drames humains frappent le monde et notre pays, et cette émotion qui nous envahit est presque surprenante ; mais il était indispensable de mettre des mots sur ce qu'il s'était passé, de rassurer et de donner une perspective sur la suite.

Les jours d'après auraient dû être ceux de l'apaisement. Notre-Dame, grâce à l'action des pompiers, était sauvée, et aucun blessé n'était à déplorer. Nous devions ouvrir à ce moment-là le débat avec les spécialistes sur les modalités de la reconstruction, en prenant le temps de faire les choses étape par étape, comme l'exige une cathédrale.

Mais il n'en a rien été ; la précipitation a pris le pas sur la raison, le président de la République s'improvisant architecte en chef, décrétant un délai de cinq ans pour la reconstruction. Puis vient ce projet de loi, qui donne un cadre à la souscription nationale, mais qui va plus loin en proposant de déroger à tout un ensemble de règles protégeant notre patrimoine et notre environnement.

L'ensemble des spécialistes du patrimoine s'élèvent contre ce projet de loi, qu'ils jugent inutile pour la reconstruction et dangereux pour le précédent qu'il crée. Les tribunes se multiplient pour alerter sur le danger que représente cette précipitation. Mais le processus était déjà lancé, le Gouvernement reste sourd et la majorité, qui a d'abord un peu tenté de mener la fronde, s'en tient aujourd'hui à un comportement discipliné ; elle n'a d'autre choix que de suivre. Le Parlement est une nouvelle fois réduit à donner tout pouvoir à l'exécutif, par l'intermédiaire de deux ordonnances.

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