Intervention de Général Philippe Lavigne

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Philippe Lavigne, chef d'état-major de l'armée de l'air :

Je répondrai tout d'abord à M. Larsonneur et à sa question concernant la connectivité et le report de CONTACT. Comme vous le savez, la connectivité est essentielle et le SCAF ouvre sur ce point de grandes perspectives car, pour gagner la « guerre des opportunités », il va falloir communiquer et transférer rapidement des informations et des données dont le volume sera de plus en plus important. Évidemment, nous n'attendons ni le SCAF ni l'année 2040 pour commencer à augmenter la connectivité de nos systèmes. C'est en particulier le sens du projet Connect@aéro développé au sein de l'armée de l'air qui prend en compte les systèmes existants, qu'il s'agisse de Syracuse 4 ou du système de navigation Oméga, ou bien du Rafale F4 pour lequel la brique connectivité est très importante. Nous allons également développer la connectivité sur l'A330 Phénix lors de sa phase de modernisation qui sera réalisée avant 2025.

Concernant les parachutes américains actuellement utilisés par les armées françaises, des parachutistes seraient plus à même que moi de vous répondre mais, si vous le souhaitez, je pourrais interroger la direction générale de l'armement sur cette question afin de savoir s'il est nécessaire de créer une filière souveraine française de conception de parachute ou bien essayer d'en développer une en Europe.

Pour répondre à votre question, Mme Pouzyreff, sur les futurs missiles de croisière et le nécessaire besoin de convergence concernant les protocoles de connectivité du SCAF et du F-35, le défi est bien là. Le développement d'un protocole de connectivité convergent est évidemment un des enjeux du SCAF. Il est en effet aujourd'hui nécessaire de développer en Europe un système intéropérable, avec nos alliés, et ce dès le début du projet. Et de ne pas bâtir, comme certains pays ont pu le faire, un système fermé pour lequel toute interaction nécessiterait la mise en oeuvre de passerelles complexes. Ainsi ce système sera, tel le système d'exploitation mobile Android, un système ouvert dont le protocole pourra être partagé rapidement avec les Américains afin de communiquer et d'être interopérable immédiatement.

Au sujet de l'opération Barkhane et de la rigueur des conditions météorologiques, Mme Mirallès, l'armée de terre met en oeuvre les hélicoptères Tigre, et le général Bosser sera davantage compétent pour évoquer leurs problèmes. Pour autant, il est évident que tous les systèmes aériens, des hélicoptères aux avions de chasse, sont soumis à rude épreuve d'où l'intérêt d'avoir une maintenance aéronautique la plus proche du terrain ; et cela rejoint la question de M. Marilossian sur la DMAé c'est-à-dire avoir des aviateurs et des soldats capables de réparer les aéronefs où qu'ils soient, de mettre en oeuvre un flux logistique important depuis la métropole, comme peut le faire actuellement l'A400M apte à transporter 35 tonnes de matériel, et, bien évidemment, s'appuyer sur une industrie qui réagit rapidement à la résolution des différents problèmes rencontrés.

Pour répondre à la question de M. Verchère concernant le rythme du déploiement opérationnel d'avions de chasse et les conséquences que cela a pu avoir pour la formation de nos pilotes, il faut reconnaître que l'armée de l'air a connu une période de surengagement, essentiellement dûe à la déflation de ses effectifs, qui a eu des conséquences sur la formation, en particulier celle des jeunes. Actuellement, du fait de la réduction de nos missions, l'armée de l'air n'est plus confrontée à un surengagement, ce qui permet aux pilotes de partir en opérations moins souvent et d'être ainsi présents pour la formation des plus jeunes. Par ailleurs, nous mettons en place des formations plus modernes et plus courtes qui nous permettent également de rattraper le retard que nous avions pu prendre.

Concernant le MCO aéronautique, il y a, selon moi, deux points à aborder. Tout d'abord, comme le rappelle Madame la ministre : « il faut que ça vole ». Vous connaissez ma passion pour le rugby, je considère donc que la maintenance aéronautique est avant tout un travail d'équipe qui regroupe bien sûr la DMAé, mais aussi l'armée de l'air, des marins, des soldats, la DGA et l'industrie. De son côté la DMAé prend en charge la gestion des contrats avec les industriels afin d'obtenir une meilleure disponibilité de nos matériels en optimisant les processus mais aussi en apportant une solution à ce qui obère cette disponibilité comme le sont les délais de livraison de pièces de rechange ou les durées de résolution de problèmes techniques.

Du côté de l'armée de l'air, il y a aussi des actions à mener. Il nous faut donc nous inspirer de processus mis en oeuvre par les industriels en dehors de nos structures mais aussi aller chercher des idées chez ceux qui sont déjà au sein de nos escadrons de soutien, tout en demeurant responsables de l'ordonnancement des actions à mener. Il est donc nécessaire que les deux équipiers, DMAé et armée de l'air, progressent ensemble.

Cela étant, nous n'avons pas de baguette magique et il faudra du temps pour améliorer la disponibilité. La DMAé a été créée il y a seulement un an et depuis ont pu être signés les contrats pour l'entretien des Fennec et des Rafale. Dans le rapport Chabbert, il était estimé qu'il faudrait de l'ordre de trois à quatre ans pour voir les effets en termes de disponibilité de cette réorganisation, et c'est d'ailleurs sur ces durées que se sont engagés les industriels de manière contractuelle.

En ce qui concerne le CPA 30, le nombre de personnels concernés est d'environ 180. Jusqu'à présent, seul le CPA 10 faisait partie des forces spéciales. Le CPA 30 intéressait tout particulièrement ces dernières en raison de ses compétences spécialisées, en matière d'appui aérien et de recherche et sauvetage au combat dans la profondeur par exemple. Ce n'est pas le cas du CPA 20, dont la mission porte avant tout sur la protection et la sécurisation des bases aériennes, tout particulièrement en OPEX.

Les premiers drones Reaper armés entreront en service fin 2019. Vous aurez l'occasion de voir à Cognac que les pilotes et mécaniciens sont déjà formés, tandis que la formation des armuriers est engagée. Au demeurant, les bombes GBU 12 qui seront dans un premier temps utilisées sont bien connues de ces derniers. Cette année arriveront les premiers Reaper au standard Block 5. Ils permettront en 2020 l'emploi d'une palette d'armements plus étendue puisque s'ajouteront les bombes GBU 49 qui nous sont également familières, à guidage laser et GPS, ainsi que les missiles Hellfire. La montée en puissance en matière de drones armés est donc bien engagée.

Je suis entièrement d'accord avec vous, M. Chalumeau : la Patrouille de France constitue un ambassadeur remarquable pour l'armée de l'air. J'étais d'ailleurs jeudi à Salon-de-Provence pour valider leur programme, mais aussi ceux de tous les autres ambassadeurs que sont l'équipe de voltige, les démonstrateurs Rafale et Alpha Jet ainsi que l'équipe parachutiste de présentation et de compétition de l'armée de l'air. Notre souhait est de faire voler les Alpha Jet aussi longtemps que possible au sein de la Patrouille de France. Nous serons aidés en cela grâce à l'arrivée des PC21 ainsi que par les réflexions en cours sur une réduction du nombre d'Alpha Jet déployés à Cazaux ; tout ceci nous permettra de récupérer des avions et donc du potentiel au profit de la Patrouille de France, repoussant la nécessité d'un remplacement à l'horizon 2035. Dans l'intervalle nous réfléchissons naturellement à la succession de l'Alpha Jet.

S'agissant de nos capacités de détection radar et sol-air, la LPM précédente s'est en effet traduite par de nombreux retards. Ces capacités sont vitales pour la posture permanente de sûreté aérienne et nous devrions bénéficier de prochaines livraisons. Nos lacunes concernent principalement la détection à basse altitude, mais aussi la haute et moyenne altitude lorsque les vitesses sont importantes, surtout au-dessus de la mer. Aussi la LPM prévoit-elle la livraison de quatre radars d'approche, de trois radars moyenne et haute altitudes, dont deux pour les stations de Nice et de Lyon et un modèle transportable, ainsi que la rénovation de dix radars du type précité et du radar GRAVES pour la surveillance de l'espace. Nous attendons aussi la livraison de douze radars fixes basse et moyenne altitudes ainsi que des centres de commandement et de contrôle. Enfin, nous devrions recevoir cinq radars GM60, quatre radars tactiques GM200, neuf centres de contrôle locaux d'aérodromes et un système radio solair. En quelque sorte : merci la LPM ! Je serai vigilant sur ces commandes et livraisons, essentielles pour la protection des espaces aériens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.