Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du lundi 27 mai 2019 à 16h00
Modification du règlement de l'assemblée nationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

Après deux ans de mandat pour certains, plus pour d'autres, nous sommes à peu près tous arrivés au même constat : notre assemblée bavarde beaucoup, et sans doute beaucoup trop. J'ai cru comprendre que la proposition de résolution du président Richard Ferrand part, avant tout, de ce constat, en insistant sur l'inflation du nombre d'amendements, d'heures de séance, et au final, de textes votés qui s'empilent les uns sur les autres. Je rappelle que les gouvernements successifs sont largement responsables de cette inflation législative et de cet ordre du jour hystérique qui ne nous permet pas de légiférer convenablement. Cependant, il nous revient de faire notre autocritique et d'améliorer ce qui peut l'être.

C'est pourquoi le groupe UDI, Agir et indépendants a accueilli favorablement la concertation lancée par Richard Ferrand avec les groupes politiques et apprécié l'écoute du rapporteur. Nous nous félicitons de retrouver dans cette résolution plusieurs propositions avancées par notre président Jean-Christophe Lagarde comme la possibilité de créer des missions d'information pour suivre la préparation d'une ordonnance ; la possibilité de rédiger des contributions écrites individuelles pour les députés qui, par exemple, auraient une position différente de celle de la majorité de leur groupe ou encore l'institution d'une séance unique de questions au Gouvernement, qui ne doit plus être un exercice artificiel. Nous retrouvons également des idées suggérées par notre collègue Jean-Luc Warsmann dans son groupe de travail, comme la procédure de législation en commission.

Avant d'en arriver au coeur de mon propos, j'évoquerai rapidement deux chapitres de cette proposition de résolution. Les dispositions relatives à la déontologie ne sont que la transposition de celles prévues dans la loi pour la confiance dans la vie publique que nous avons votée. Il faudra être vigilant dans leur application pour éviter les usines à gaz ; il faudra également faire oeuvre de pédagogie sur les nouvelles dispositions comme la publication des déclarations d'invitations, de dons et de déplacements à l'étranger.

Les nouvelles modalités d'examen des pétitions me semblent bienvenues : attention cependant ce que ce ne soit pas là un mode d'expression des lobbies, ce qui est souvent le cas pour ce type d'outil. Attention également à ne pas susciter de faux espoirs avec des pétitions classées sans être étudiées !

Pour le reste, qui constitue le coeur du texte, nous n'allons pas nous mentir : ce texte réduit les capacités d'expression en séance, ce qui sera une bonne chose, si cela supprime le bavardage inutile. En revanche, nous pensons qu'il y a quelques bémols à apporter, et d'abord sur le temps de parole alloué dans les discussions générales : cinq minutes par groupe, c'est totalement insuffisant, surtout au vu des projets de loi hypertrophiés qui arrivent en discussion. Les rappels au règlement non plus ne doivent pas être aussi limités qu'il est actuellement prévu et tant qu'à faire, profitons des évolutions en cours pour systématiser les votes solennels dans un créneau dédié, d'autant qu'il est possible de séparer les explications de vote laissées à la fin de l'examen et le vote lui-même.

De façon générale, oui pour limiter ce qui a pu donner lieu à des abus en séance mais sans passer d'un extrême à l'autre. D'où la vigilance sur certains points qui nécessitent des ajustements.

Très concrètement, vous aurez constaté que notre groupe n'a déposé aucun amendement de suppression sur le texte initial. À chaque fois, nous avons proposé des idées nouvelles et des suggestions d'améliorations qui sont autant de compromis acceptables pour tous, à condition que vous le vouliez vraiment.

Ceci étant dit, il faut aller au fond des choses et constater que notre Parlement est devenu très faible. Nous ne sommes donc pas contre une forme « d'auto-limitation » mais à condition de renforcer, dans le même temps, les capacités d'initiative et de contrôle du Parlement.

Or, sur ces points, la proposition de résolution du président Richard Ferrand est limitée. Les mesures significatives sont l'augmentation du nombre de questions au Gouvernement – que nous soutenons – et la possibilité pour l'auteur d'un droit de tirage de choisir le poste de rapporteur d'une commission d'enquête, là où ce choix était laissé au bon vouloir de la majorité. Ces deux points ne sont pas négligeables mais ils sont insuffisants.

Il faut en effet aller plus loin. Nous demandons, par exemple, l'augmentation du nombre de niches parlementaires et donc des textes qui proviennent véritablement du Parlement, ainsi que la possibilité de les discuter sur une même session ; l'augmentation du nombre de commissions d'enquête à travers une hausse du droit de tirage dont bénéficient les groupes – il serait d'ailleurs plus juste de parler de commission d'évaluation car l'objectif n'est pas l'inquisition mais bien l'évaluation de politiques, avec de véritables pouvoirs ; la possibilité d'avoir un poste de titulaire pour chaque groupe en commission mixte paritaire, surtout si une révision constitutionnelle modifie le rôle pivot de ces commissions qui échappent à un certain nombre de députés.

Certaines de ces idées nécessitent, il est vrai, une modification de la Constitution. C'est pourquoi, comme nous avions essayé de le faire l'été dernier, nous voulons que le futur projet de révision ose renforcer les droits du Parlement. Vous pouvez compter sur notre groupe pour y travailler avec force.

Pour d'autres idées, une modification du Règlement suffirait, et nous ne pouvons en faire l'économie. Veillons toutefois à ce que cette proposition de résolution ne demeure pas superficielle, une action sur le fond des choses étant uniquement renvoyée à la Constitution. Notre règlement comporte des outils contraignants sans raison réelle. Il faut les modifier pour arriver à un équilibre satisfaisant pour les députés, qui ne sont pas uniquement là pour tenter de défendre des amendements sur des textes gouvernementaux.

À cet instant de mon intervention, je souhaite marquer un arrêt : cinq minutes se sont écoulées, et j'ai encore nombre de choses à vous dire !

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