Intervention de Raymond Girardi

Réunion du jeudi 2 mai 2019 à 10h30
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Raymond Girardi, vice-président du MODEF :

Il faut être conscient du caractère occulte des négociations, tant sont considérables les capacités de rétorsion de la grande distribution. J'en donnerai une illustration. Mon département est un important producteur de pommes de terre primeur. Il y a quelques années, en réaction à des importations massives d'Égypte et de Tunisie, les agriculteurs, pris de colère, ont vidé quelques camions de tubercules devant les supermarchés locaux. Au moment même où se déroulait l'opération, Intermarché a informé des agriculteurs qui lui vendaient en direct qu'il refuserait leurs produits pendant quinze jours. Lorsqu'une coopérative ou un expéditeur privé défend ses intérêts, il fait l'objet de mesures de rétorsion immédiates. Il doit pourtant écouler ses produits d'une façon ou d'une autre. Quand une centrale d'achat a l'assurance d'être approvisionnée grâce aux importations, nous n'avons pas de moyen d'action à son encontre. Nous nous trouvons démunis. Personne ne peut l'empêcher, pas même une loi. Les coopératives et les expéditeurs privés font leur possible pour nous défendre, mais ont une marge de manoeuvre très limitée.

Le milieu est en outre assez occulte. Nous avons parfois des difficultés à recueillir des éléments précis auprès des acheteurs de nos propres coopératives. Les négociations sont compliquées, sous-tendues par des menaces et des pressions.

Le contrôle des produits importés demanderait des moyens humains considérables. L'exercice même est complexe. Nous savons par exemple que les cerises importées de Turquie sont traitées avec du diméthoate, molécule interdite dans France pour son effet non pas sur les humains mais sur le milieu, en particulier sur les abeilles. Lorsque nos services de répression des fraudes effectuent des prélèvements et des analyses sur ces fruits, ils ne trouvent aucune trace de cette substance… elle a en effet une durée de vie très courte. Des situations similaires se produisent pour une multitude de produits phytopharmaceutiques.

Madame Bareigts, la part de marché transitant par les grossistes ou demi-grossistes est très réduite en métropole. Peut-être sont-ils davantage présents dans les Outre-mer. Or plus il y a d'intermédiaires, plus il est compliqué de tracer la répartition de la valeur. Nous savons aussi que lorsque les grossistes interviennent, ils se réservent des marges confortables. Il est alors facile de faire peser les torts sur les distributeurs, qui sont actuellement sur la sellette. J'imagine qu'en Outre-mer, rares sont les grossistes qui déposent le bilan.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.