Intervention de Anne Haine

Réunion du jeudi 16 mai 2019 à 9h30
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Anne Haine, directrice générale de Nielsen France :

Sur le premier point, nos études montrent, notamment celles portant sur des panels de consommateurs, que ceux-ci vont dans les hypermarchés avant tout pour chercher du prix, de la promotion et du choix, tandis que dans les supermarchés, les enseignes de proximité ou les drive ils vont chercher du confort, de la proximité, un circuit court et plus rapide. Au fil des années, en effet, les hypermarchés sont devenus de grosses machines pénibles, où on passe toute une heure à pousser de gros caddies, etc. L'expérience de l'hypermarché s'est donc effritée au bénéfice du confort, de la possibilité de faire tous ses courses rapidement sans se laisser tenter par le piège des achats imprévus, des « têtes de gondole », des promotions, etc. De ce fait, le circuit court, le petit supermarché de proximité devient pour eux plus attractif, nous avons fait des études là-dessus que nous pourrons vous communiquer : c'est du déclaratif, bien sûr, mais ça corrobore ce que nous observons. Un de nos slides montre le nombre de passage en caisse par strate de superficie : plus le magasin est gros, plus il est concerné par la baisse de fréquentation.

Sur le deuxième point, par rapport au e-commerce, à Amazon, Cdiscount, et autres pure players, qui ont souvent commencé par le livre, il faut savoir que les partenariats sont de plus en plus nombreux : Monoprix, par exemple, travaille avec Amazon. Cela a commencé par des produits assez éloignés des achats du quotidien, des « produits de grande consommationfrais libre-service » (PGCFLS), mais la nouveauté, et la difficulté à laquelle font face les grands intervenants de la distribution, c'est qu'Amazon s'attaque maintenant aux produits de grande consommation avec des valeurs faciales plus faibles – boîtes de conserve ou autres, qui n'étaient pas leur priorité jusqu'ici. La situation de la France, à cet égard, est spécifique par rapport à celle d'autres pays d'Europe parce qu'elle a développé le concept du drive avant les autres et de façon plus importante. Un des avantages du e-commerce, c'est son côté pratique : commande en ligne, livraison. Mais comme cette réponse est déjà apportée par le drive, on peut penser que le potentiel du pure player, du e-commerce est plus faible en France qu'en Allemagne ou en Italie. On constate que les générations montantes, les jeunes, vont beaucoup moins en hypermarché : c'est un concept qui leur parle beaucoup moins. Donc, l'une des inquiétudes, c'est que cette nouvelle génération soit naturellement amenée à fréquenter davantage le e-commerce. Cela dit, la problématique du prix, du frais, du choix demeure : quand vous achetez une salade ou des pêches, vous avez envie de les voir, de les sentir, ce qui est moins évident sur une plate-forme de e-commerce. Mais ces plateformes, qui sont souvent dérivées d'enseignes de la grande distribution, essaient aussi d'offrir du choix, du haut de gamme, de façon à réduire le risque que le client ne soit pas satisfait du produit. Il faut donc que tout ne passe pas par le prix. C'est, pour moi, la difficulté principale que rencontrent aujourd'hui les pure players dans le champ de la grande consommation.

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