Intervention de Jean-Luc Chetrit

Réunion du mercredi 29 mai 2019 à 9h35
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Jean-Luc Chetrit, directeur général de l'Union des marques :

J'ai apprécié l'intervention d'Aurore Bergé remettant ce sujet dans un contexte économique. Quel impact ce secteur de la publicité peut-il avoir sur le développement économique ? Des questions ont été posées à plusieurs reprises sur la façon dont les Français peuvent réagir à la publicité. Pour que la publicité contribue à la croissance de l'économie, il faut tenir compte du risque que les Français soient de plus en plus réticents à écouter et à regarder de la publicité.

La transformation de l'Union des annonceurs en Union des marques n'est pas anodine. Les marques ont bien conscience qu'il ne suffit plus de diffuser de la publicité en quantité, comme une pression de la part de la marque. Nous ne sommes ni sourds, ni aveugles, nous entendons bien l'attente des Français d'avoir une publicité responsable, pertinente, respectueuse de leurs centres d'intérêt.

Vous posiez la question des freins à la publicité. Ces freins sont-ils règlementaires ou culturels ?

Ils sont évidemment réglementaires. La France présente en effet le ratio de volume publicitaire par rapport à l'économie du pays le plus faible. Une partie est liée à ces restrictions réglementaires. On pourrait lister toutes les restrictions qui aujourd'hui s'appliquent à nos secteurs. Elles étaient censées les protéger mais sont, petit à petit, en train de les mettre dans une situation absolument dramatique par rapport à des évolutions fondamentales des usages. Évidemment, les plateformes telles que Google ou Facebook sont aujourd'hui en plein développement, elles captent à la fois l'intention, l'audience et donc les revenus des marques qui ont besoin, pour se développer – qu'elles soient petites ou grandes ou de taille intermédiaire – d'utiliser Facebook comme outil de communication. La pizzeria du coin ne va pas investir sur une radio locale, car elle n'en a pas les moyens. Elle va utiliser Facebook.

Le sujet concerne l'ensemble de l'écosystème. Si vous comptez le nombre d'annonceurs, nous avons 1 500 annonceurs actifs en télévision et 35 000 sur Google. Ces plateformes sont ouvertes à beaucoup d'annonceurs, qu'ils soient grands ou petits : il faut donc donner les moyens aux médias de pouvoir réagir à cet état de fait.

Je pensais nécessaire de donner des arguments pour expliquer que les mouvements entre médias n'étaient pas le sujet aujourd'hui.

En ce qui concerne la radio, nous ne recommandons pas que la distribution puisse communiquer en télévision autour de promotions en numérique et en littéraire – du type : « acheter un produit et en recevoir un gratuit » ou « bénéficier de 50 % de réduction ». Je pense que la radio souffre énormément d'être uniquement le média de la promotion (certaines chaînes souffrent d'avoir une présence publicitaire promotionnelle trop importante). Cela contraint un certain nombre d'annonceurs à ne pas être présents en radio parce qu'ils ne veulent pas être dans des environnements aussi chargés publicitairement parlant.

Nous ne souhaitons pas dupliquer un modèle qui ne fonctionne pas mais trouver les moyens de faire en sorte que l'ensemble des secteurs puissent trouver une façon de s'exprimer de manière responsable sur tous les médias.

Une façon de trouver une position commune est d'expérimenter. Puisque deux études d'impact existent déjà, nous avons décidé de ne pas en produire une troisième. La meilleure étude d'impact résultera de la mise en oeuvre de ces propositions. Partout où cela s'est produit, à travers le monde, il n'y a jamais eu de déplacement des recettes d'un média vers un autre.

Au plan microéconomique, quand on demande à chacun des annonceurs présents sur ces médias ce qu'ils feraient, si demain la promotion était possible en télévision, ils ne répondent pas qu'ils désinvestiraient massivement en radio pour investir en télévision.

L'expérimentation permettra d'estimer l'impact de la réforme, mais pendant ce temps-là le transfert vers les plateformes numériques continue. La croissance de Facebook l'année dernière s'est faite à 63 % en France. Ces effets de bords sont extrêmement importants.

Face à ces enjeux, il faut que nous soyons capables de nous faire confiance mutuellement pour essayer de faire évoluer progressivement nos pratiques en nous inspirant des expérimentations menées dans d'autres pays.

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