Intervention de Lise Magnier

Séance en hémicycle du lundi 17 juin 2019 à 16h00
Débat sur le rapport de la cour des comptes sur le budget de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLise Magnier :

Je tiens tout d'abord à remercier la Cour des comptes pour la qualité des documents qu'elle nous présente chaque année, ainsi que pour la précision de son travail. Je vous remercie également, monsieur le Premier président, pour la clarté de votre exposé.

En préambule, rappelons que l'exercice 2018 porte sur la première année complète de gestion du quinquennat et que, de ce fait, les résultats de l'exécution du budget 2018 engagent la responsabilité du Gouvernement et de la majorité. Aussi, le diagnostic établi dans le cadre du rapport de la Cour sur les résultats de gestion du budget de l'État pour 2018 pourrait se résumer de façon simple : comme il s'y était engagé, le Gouvernement a opéré une plus grande sincérisation du budget, mais les efforts de maîtrise de la dépense publique sont encore insuffisants pour rétablir l'équilibre de nos finances.

Il faut reconnaître que cet exercice 2018 a été marqué par une nette amélioration de la sincérité de notre budget. La Cour relève ainsi une diminution des sous-budgétisations et une exécution des dépenses publiques mieux maîtrisée qu'au cours des années précédentes, avec notamment une absence de décret d'avance en cours d'année. Il est nécessaire de souligner cette volonté affirmée et réalisée du Gouvernement, qui nous permet, à nous autres parlementaires, de mieux exercer nos missions tout en assurant une plus grande transparence des comptes de la Nation.

Le deuxième point positif est le niveau de déficit public. C'est la deuxième année consécutive que le déficit public de la France est sous la barre des 3 % de PIB, s'établissant à 2,5 % du produit intérieur brut, ce qui acte notre sortie de la procédure de déficit excessif qui nous était appliquée depuis 2009.

C'est un point marquant de l'intention de ce gouvernement d'améliorer nettement la maîtrise de nos finances, et nous devons évidemment le saluer. Il convient néanmoins de rester vigilants, car, comme le souligne la Cour, ce niveau de déficit reste encore élevé, puisqu'il demeure concentré sur le budget de l'État, à hauteur de 76 milliards d'euros en comptabilité budgétaire.

Il faut aussi retenir que l'effort structurel, qui permet de mesurer la part de l'amélioration résultant de la seule action des pouvoirs publics, est quasiment nul, avec à peine 0,1 point de PIB, selon l'avis révisé sur le projet de loi de règlement pour 2018 du Haut Conseil des finances publiques.

Cette faible amélioration du solde structurel résulte d'un effort sur les dépenses publiques, qui est partiellement absorbé par des mesures de baisse des prélèvements obligatoires décidées par le Gouvernement. Le déficit structurel reste ainsi très éloigné de l'objectif de moyen terme défini dans la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 que nous avons votée en début de quinquennat.

Si l'on dresse un bilan des vingt-cinq dernières années, aucun des gouvernements successifs n'a su ou pu redresser les finances publiques de notre pays et il serait vraiment dommageable que le gouvernement actuel prenne le même chemin.

Nous avons bien conscience que l'exercice est difficile, mais je constate avec désarroi, monsieur le Premier président, que plusieurs recommandations de la Cour restent lettre morte et sont donc reconduites d'année en année sans évolution ni prise en compte par les différents gouvernements, alors même qu'elles sont de nature à améliorer la situation de notre pays.

Concernant le coeur du rapport de la Cour des comptes sur l'exécution du budget de l'État en 2018, le déficit budgétaire de l'État, comme vous l'avez souligné, s'est accru pour la première fois depuis cinq années, passant de 67,7 milliards d'euros en 2017 à 76 milliards d'euros, alors que les administrations de sécurité sociale et celles des collectivités locales ont connu toutes deux un excédent de leur solde.

Pourquoi le déficit de l'État s'est-il donc creusé ? C'est simple : sous le double effet des mesures de baisse d'impôts et de la progression des dépenses. Il faut bien avoir conscience que, pour l'exercice 2018, les recettes de l'État n'ont couvert que neuf mois de dépenses, et ce malgré des recettes plus élevées que prévu initialement.

Désormais, le déficit budgétaire représente un montant supérieur à celui des recettes de l'impôt sur le revenu ou même aux dépenses de la mission « Enseignement scolaire ». Ainsi, le besoin de financement de l'État a continué d'augmenter en 2018, pour atteindre 191,9 milliards d'euros. Le bilan à la fin de 2018 montre que la situation nette de l'État, en comptabilité générale, s'est encore dégradée par rapport à 2017, alors même que le poids de la dette de l'État continue, lui aussi, de s'aggraver sous l'effet de la hausse du déficit.

Le rapport de la Cour met donc en évidence que la situation financière de notre pays ne s'est pas améliorée et qu'il nous faut désormais agir plus vite et plus fort sur la nécessaire maîtrise de nos dépenses si l'on veut tenir l'engagement du Président de la République et du Gouvernement de redresser les finances publiques d'ici à la fin de la mandature.

Pour conclure, je dirai un mot sur la démarche de réflexion inédite, autour de la refonte de la performance de la gestion des finances publiques, initiée dans le rapport de la Cour. Comme beaucoup de mes collègues, monsieur le Premier président, je suis très sensible à cette démarche de l'institution que vous présidez.

Cet approfondissement des procédures et des informations est devenu indispensable au vu de la complexité sans cesse croissante du cadre budgétaire de l'État, de l'information qui a été enrichie, au risque de devenir surabondante, ou des procédures et des outils incomplets pour mesurer l'efficience des politiques publiques. Ce sont d'ailleurs ces questions que le président de la commission des finances et nombre de collègues de cette même commission s'efforcent de soulever, notamment au travers de la nouvelle mission d'information relative à la mise en oeuvre de la LOLF.

Pour ma part, je suis tout à fait favorable à une nouvelle impulsion pour améliorer la démarche de performance issue de la LOLF, mais c'est d'abord la rationalisation des informations, l'évolution des pratiques et des mentalités qui doit être modifiée en priorité. Bien que la démarche de performance ait besoin d'être complétée pour améliorer l'efficience de la dépense publique, il m'apparaît encore plus essentiel de revenir aux fondamentaux, en réaffirmant les principes d'unité, d'universalité, d'annualité et de spécialité de notre budget. Je suis, sur ce point, totalement en accord avec vous, monsieur le Premier président. Cela nous permettrait, je crois, d'éviter bon nombre de débudgétisations et de retrouver de la clarté. Nous ne serions plus, ainsi, les champions du monde d'une fiscalité incompréhensible et indigeste.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.