Intervention de Pascale d'Artois

Réunion du mercredi 3 juillet 2019 à 9h30
Commission des affaires sociales

Pascale d'Artois, directrice générale de l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'accueillir pour faire le point sur la situation de l'AFPA, son plan de transformation et me permettre de répondre à toutes vos questions.

L'AFPA est un acteur historique de la formation professionnelle en France. Fondée en 1949 dans le contexte de la reconstruction de l'après-guerre, elle a conservé son statut associatif pendant plus de soixante ans avant de se transformer en établissement public industriel et commercial (EPIC) le 1er janvier 2017. L'AFPA a vu son fonctionnement bouleversé par les deux évolutions majeures et simultanées qu'a connues le paysage de la formation professionnelle au cours de ces dix dernières années : la décentralisation de la formation professionnelle et l'ouverture du secteur à la concurrence.

La décentralisation de la formation professionnelle a conduit l'AFPA à exercer ses missions dans le cadre d'une commande régionalisée, alors qu'elle oeuvrait jusque-là dans le cadre d'un quasi-monopole public. La régionalisation de la commande publique s'accompagne désormais de financements plus aléatoires que les recettes anciennes de l'État, qui étaient stables, prévisibles et conséquentes – de l'ordre de 1 milliard d'euros en 2009.

L'ouverture du secteur de la formation professionnelle à la concurrence, qui constitue une transformation majeure des modalités d'achat de la formation, a placé l'AFPA face à de nouvelles exigences entrepreneuriales et concurrentielles, étrangères à son histoire et à son organisation. Depuis 2009, l'AFPA a été contrainte de puiser dans sa trésorerie pour assurer son fonctionnement et a nourri un déficit d'exploitation devenu chronique et régulier ; il en est résulté un déséquilibre financier structurel au point de menacer, depuis quelques années déjà, son existence.

Les années 2015 et 2016 ont clarifié la situation de l'AFPA en prévoyant dans la loi du 5 mars 2014 le transfert des biens immobiliers à l'AFPA puis, dans la loi Rebsamen, la création par ordonnance du nouvel EPIC, né le 1er janvier 2017. Ce dispositif a été validé par la Commission européenne au prix de la création de deux filiales garantissant la réalisation de l'activité concurrentielle, tandis que le portage des missions de service public est assuré par l'EPIC.

Si la création de l'EPIC a créé les conditions d'un renforcement juridique et organisationnel de l'AFPA, cette seule création n'a pas pu constituer en soi une garantie suffisante pour assurer son avenir économique. Deux rapports récents, d'une part celui de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l'inspection générale des finances (IGF) en 2018, d'autre part celui de la Cour des comptes début 2019, ont mis en évidence une situation financière catastrophique et plusieurs fragilités importantes : un manque d'agilité et de capacité à réformer son organisation pour s'adapter aux évolutions du marché ; une difficulté à se saisir des opportunités fournies par les différentes réformes depuis 2004 afin de conserver sa compétitivité et adapter son offre aux besoins de compétences des territoires ; une réelle difficulté à atteindre les objectifs fixés par les trois précédents plans stratégiques, notamment sur le volet de la réduction des charges ; et, enfin, un résultat cumulé négatif sur les cinq dernières années atteignant plus de 720 millions d'euros.

L'AFPA dispose cependant de formidables atouts, à savoir une ingénierie et une pédagogie qui reposent depuis plus de soixante-dix ans sur la mise en situation réelle de travail, l'expérience et l'autonomie. Les plateaux techniques de formation permettent aux stagiaires de s'approprier les gestes et les comportements professionnels en situation de travail reconstituée ou simulée ; le droit à l'essai, le droit à l'erreur, l'expérimentation et l'évaluation sont autant de leviers d'apprentissage dont l'AFPA a déjà une parfaite maîtrise.

Les stagiaires ont accès à plus de 200 000 ressources pédagogiques grâce à une plateforme numérique et à de nouveaux outils digitaux qui s'intègrent au fur et à mesure dans les progressions pédagogiques. L'offre de l'AFPA a ainsi gagné en souplesse et en adaptabilité pour personnaliser les parcours et acquérir progressivement des blocs de compétences.

L'AFPA est aussi au coeur des politiques publiques de l'emploi et de la formation. Elle a pour mission de contribuer à l'insertion sociale et professionnelle des personnes les plus éloignées de l'emploi, à la mixité des métiers et à l'égalité d'accès à la formation sur les territoires. Elle se positionne comme un outil de sécurisation des parcours professionnels et de vie au service des politiques publiques nationales et régionales de formation.

Devenue EPIC en 2017, l'AFPA s'est vu confier quatre missions de service public, pour lesquelles elle reçoit une subvention de 110 millions d'euros par an.

La première mission, que vous connaissez certainement, est l'ingénierie de certification des titres professionnels délivrés par le ministère du travail et par d'autres ministères certificateurs, et la certification de candidats formés par d'autres organismes de formation.

La deuxième mission consiste à accompagner l'émergence et la structuration des métiers et des compétences de demain. Si la maturité du marché, par exemple, ne paraît pas suffisante, l'AFPA met en place des incubateurs pour calibrer les compétences nécessaires attendues par les entreprises. Cette mobilisation portant sur l'émergence des compétences nouvelles se double d'une action spécifique pour les métiers en tension, pour lesquels les entreprises peinent à recruter. Elle intègre également l'adaptation de l'offre aux nouveaux métiers de la transition énergétique et de la transition numérique.

La troisième mission concerne l'anticipation de l'évolution des métiers, des compétences et des filières sur le territoire, en appui technique des Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), avec une offre de conseil et d'accompagnement des projets de territoire.

Enfin, la quatrième mission, extrêmement importante, est celle consistant pour l'AFPA à venir en appui des opérateurs du conseil en évolution professionnelle (CEP), en proposant notamment une offre de découverte des métiers et de maturation des projets professionnels sur ses plateaux techniques. On peut citer le dispositif « Déclic pour l'action », qui cible les jeunes de 18 à 25 ans, avec une large gamme de prestations qui vont de l'hébergement au développement des compétences transverses en passant par l'appui social et l'accès à la citoyenneté.

À la faveur de ses missions auprès des publics les plus éloignés et les plus vulnérables vis-à-vis de l'emploi, l'AFPA s'est vu confier en 2017 un programme d'accompagnement global d'insertion des réfugiés sur des métiers en tension : en partenariat avec l'État, Pôle emploi, les onze opérateurs de compétences (OPCO) et désormais plus de 250 entreprises, le programme « Hébergement orientation parcours vers l'emploi » (HOPE) vise à ramener vers l'autonomie et l'emploi 1 500 réfugiés par an sur l'ensemble du territoire, en partant des besoins de compétences des entreprises.

Quelques chiffres : l'AFPA dispose de 8 millions de mètres carrés de foncier, de 2 millions de mètres carrés de bâti, d'un fort maillage territorial composé de 116 centres et plus de 200 implantations. Elle comptait 6 483 salariés en CDI au 31 mai 2018 et elle a formé 150 000 personnes en 2018, dont 60 000 salariés. Un actif sur huit en France est formé à l'AFPA, avec un taux moyen de réussite de 82 % d'accès à l'emploi tous secteurs confondus, et un taux d'accès à l'emploi de 66 % dans les six mois suivant la fin de la formation. L'AFPA déploie sur tout le territoire plus de 900 modules de formation, dont 230 titres professionnels décernés par le ministère du travail, et met à disposition de ses stagiaires des services d'hébergement et de restauration.

En 2017, lors de mon arrivée à l'AFPA, nous avons souhaité engager une réflexion stratégique autour de l'analyse du positionnement de l'agence sur le marché de la formation, qui connaît évidemment une profonde mutation depuis déjà une décennie. Nous avons également lancé des travaux, menés avec l'ensemble de nos équipes régionales, dans une vision prospective issue du terrain, afin d'analyser l'adéquation de notre offre aux besoins de compétences des territoires. Je vais vous en livrer une brève synthèse.

Le secteur de la formation professionnelle est confronté à des bouleversements profonds devant amener les organismes de formation à remettre en cause leurs pratiques et leur offre de services. Du côté des individus, l'individualisation des parcours et la désintermédiation initiée en 2014 s'accélèrent et ouvrent le champ pour que les actifs s'emparent davantage du sujet du développement de leurs compétences. Ils attendent de la formation qu'elle s'enrichisse de toutes les évolutions pédagogiques, notamment celles rendues possibles par le digital.

Les entreprises, quant à elles, attendent de leurs prestataires la prise en compte globale de leurs problématiques RH et souhaitent que les organismes de formation leur proposent des solutions optimisées, notamment grâce à des solutions liées au recrutement, à la fidélisation des compétences et au développement de services complémentaires.

Dans ce contexte, l'AFPA doit renforcer sa relation commerciale aux personnes et aux entreprises, améliorer la gestion de la relation client et développer son marketing direct. Elle doit disposer d'une organisation agile pour profiter des opportunités, notamment celles liées aux nouvelles missions des futurs OPCO, et répondre aux nouveaux enjeux du marché. En s'appuyant sur les possibilités offertes par le numérique, elle doit aussi développer des partenariats pour mieux répondre au marché des individus, introduire des modalités de formation hybrides dans son offre et enrichir la dimension communautaire de son offre pour répondre aux attentes des publics qui ont besoin qu'on prenne en compte leurs contraintes individuelles, notamment en termes de mobilité et de garde d'enfants.

Les besoins évoluent aussi sur le marché de l'accompagnement des demandeurs d'emploi et des personnes très éloignées de l'emploi. Le marché de l'accompagnement et de la formation des demandeurs d'emploi, relevant essentiellement des conseils régionaux, est historiquement orienté à la hausse, en cohérence avec l'évolution du taux de chômage, mais les durées de formation se réduisent et la demande se fragmente sur le plan géographique. Le plan d'investissement dans les compétences devrait accroître encore ce niveau de financement, mais incitera la mise en place de dispositifs de formation et d'achat de formation innovants. Ces évolutions vont de pair avec une demande de transparence accrue sur les indicateurs de performance et de qualité des formations réalisées.

Ces changements ne sont pas tous favorables à l'AFPA, qui a été construite historiquement pour gérer de manière industrielle une commande stable et pérenne de l'État. Or, le marché est désormais bien plus divers et complexe, en fragmentation du point de vue de ses commanditaires et sur le plan géographique, avec des appels d'offres qui constituent un outil au niveau des bassins d'emploi. Le modèle de l'AFPA doit donc évoluer pour répondre à cette demande complexe et fluctuante. Il importe de souligner que l'AFPA a souffert de la transformation du marché, mais pas de son effritement. Elle doit donc impérativement se transformer à son tour pour en saisir les opportunités.

Les besoins évoluent sur un marché en croissance, mais celle-ci profite principalement aux acteurs privés de la formation. Sur un marché en croissance, ce sont les organismes de formation privée qui connaissent la plus forte hausse – plus 6 % –, tandis que les organismes publics et parapublics voient leur part de marché s'effriter régulièrement, celle-ci étant passée de 23 % en 2005 à 21 % en 2014. Les organismes privés bénéficient d'un positionnement orienté de longue date vers les salariés et sont donc déjà organisés pour répondre à la désintermédiation du marché. Ils proposent par ailleurs des formations plus courtes que les organismes publics et parapublics – en moyenne 30 heures, contre 300 heures pour les organismes publics –, avec des modèles économiques évidemment aussi plus flexibles.

Le secteur de la formation est particulièrement fragmenté, avec près de 80 000 acteurs – chiffre en augmentation continue. Cette fragmentation concerne en particulier les formations tertiaires, délivrées par une myriade d'organismes allant du pure player numérique à l'université ou à la grande école, en passant par la petite structure privée s'appuyant essentiellement sur des contrats à durée déterminée ou des vacataires. La démarche qualité initiée par les pouvoirs publics a vocation à professionnaliser le secteur, voire à inciter à une certaine consolidation des acteurs, et ses effets ne seront pas immédiats. Sur le marché privé, très majoritairement tertiaire, l'AFPA affronte une concurrence multiple et protéiforme, y compris de la part d'acteurs travaillant à coût marginal dans des conditions économiques très différentes, avec des acteurs numériques (pure players) et des acteurs présentiels ou hybrides fonctionnant sur des modèles évidemment plus flexibles.

Les évolutions réglementaires récentes visent à accompagner les publics les moins qualifiés vers la formation professionnelle. Elles ont pour objectif d'apporter des solutions aux faiblesses structurelles du marché de la formation, en cherchant à diminuer le niveau de complexité, à supprimer les intermédiaires entre les stagiaires et les organismes et, in fine, à augmenter le taux d'insertion. Elles invitent donc tous les organismes de formation à revoir leur axe de développement et à renouveler leur offre avec des temps d'adaptation qui peuvent se révéler critiques au regard de difficultés économiques déjà prégnantes – je pense notamment à notre activité sur le congé individuel de formation, ou à la mise en place du dispositif Pro-A, qui prend forcément un peu de temps mais qui pourrait présenter un grand intérêt pour l'activité de l'AFPA.

Dans le contexte de cette profonde mutation, la situation économique de l'AFPA reste fortement déficitaire. L'agence n'a pas su partir à la reconquête des financeurs dans une vision locale des besoins et est restée un organisme très centralisé et centralisateur, assez éloigné des besoins territorialisés, à la maille du bassin d'emploi désormais.

Essentiellement du fait de l'effondrement de son activité, l'AFPA cumule un résultat négatif de plus de 720 millions d'euros sur les cinq dernières années. Face à cette baisse d'activité, l'agence a vu ses effectifs diminuer aussi bien en formateurs qu'en personnels d'appui. L'AFPA a été en mesure de contenir ses frais de fonctionnement par un pilotage serré en dépit de leur rigidité à la baisse et d'augmentations structurelles liées notamment au coût de l'énergie et des fluides, ainsi qu'aux impôts et taxes. Cependant, l'AFPA n'a pas ajusté ses effectifs aussi rapidement que son chiffre d'affaires évoluait, et a par ailleurs globalement préservé sa structure industrielle. En conséquence, le poids des charges fixes a crû mécaniquement à un niveau désormais supérieur à celui de ses concurrents – les charges représentent 110 % de son chiffre d'affaires – et certaines implantations territoriales sont devenues structurellement déficitaires. La structure des coûts de l'AFPA est rigide : pour un chiffre d'affaires en baisse de 17 % sur la période 2011-2016, les coûts n'ont décru que de 10 %.

Le marché de la formation professionnelle est aussi dépendant de mécanismes de financement complexes, financés par de nombreux acteurs publics ou paritaires – l'État, les régions, les OPCO – dans une logique d'achat et de prescription d'actions pour des publics cibles. Ainsi, le chiffre d'affaires d'une partie du secteur est déterminé par la façon dont les dispositifs de financement évoluent. Le passage à un système basé sur des appels d'offres au sein de la sphère publique a renforcé l'intensité concurrentielle et exercé une forte pression sur les prix.

L'AFPA a donc souffert d'une double évolution : premièrement, un dépositionnement lié à une compétitivité-prix moindre que celle de certains concurrents publics ou privés ayant, eux, bénéficié de l'ouverture du marché progressive depuis 2004 ; deuxièmement, une inadéquation croissante entre, d'une part, l'implantation et le contenu de l'offre de l'AFPA et, d'autre part, les besoins du marché, à mesure que celui-ci se territorialisait suite à l'évolution de la commande régionale, résultant elle-même de la décentralisation de la formation.

Ces tendances sont encore pour partie à l'oeuvre en 2017-2018. Ainsi, en 2018, le chiffre d'affaires a atteint 629 millions d'euros, ce qui représente une chute de 108 millions d'euros, soit près de 15 % par rapport à 2017. L'AFPA a en effet constaté la perte de plusieurs marchés pluriannuels importants des différentes régions ; en conséquence, le niveau d'activité qui sera réalisé auprès des conseils régionaux dans les prochaines années devrait subir une forte baisse, comparable à celles des appels d'offres pluriannuels, même si l'impact devrait se trouver amorti du fait du PIC.

En parallèle, grevés par une incapacité à dégager des capacités d'investissement suffisantes sur les dernières années, nous ne sommes pas en mesure, à ce jour, de nous donner toutes les chances de développer les différents nouveaux marchés par l'acquisition de technologies, par la mise en place de partenariats, ou par le recrutement de ressources humaines additionnelles.

La masse salariale de l'AFPA a évolué à la baisse depuis 2011, en lien avec le recul de l'activité, mais à un rythme inférieur à celui du chiffre d'affaires, ce qui reste insuffisant pour redresser le bilan économique déficitaire de son activité. Sans action de transformation spécifique, l'AFPA ne peut donc être en mesure de procéder aux nécessaires ajustements de ses charges, compte tenu de la dynamique observée et attendue sur le chiffre d'affaires.

L'AFPA a entamé des chantiers nationaux de rationalisation de ses frais de fonctionnement sur la période récente ; globalement, la baisse de charges résultant de l'ensemble des mesures déjà engagées, ainsi que de la baisse d'activité prévue entre 2016 et 2021, s'élèverait à 8 % et ne serait pas suffisante à redresser la situation.

En conséquence, en l'absence d'autres mesures, le total des charges resterait largement supérieur au chiffre d'affaires. Le résultat brut d'exploitation s'est effondré entre 2016 et 2018 : déjà négatif de 41 millions en 2016, il est passé à -63 millions en 2017, ce qui représente une augmentation du déficit de 54 % en seulement deux ans. À l'horizon 2021, le résultat brut d'exploitation se maintiendrait à un niveau fortement déficitaire et, en l'absence de projet de réorganisation, l'équilibre d'exploitation resterait structurellement hors de portée, ce qui menacerait directement la pérennité de l'agence.

La capacité de l'autofinancement de l'AFPA serait divisée par deux, passant de – 37 millions d'euros à – 99 millions d'euros. Cette situation entraîne une incapacité à investir tout à la fois dans son appareil productif et dans la nécessaire évolution des compétences des collaborateurs pour accompagner les nouveaux besoins du marché. Le montant d'investissement minimum pour maintenir le dispositif en condition opérationnelle à court terme est estimé à 25 millions d'euros, étant précisé que même ce niveau minimum ne serait pas soutenable et risquerait d'engendrer une dégradation supplémentaire de la trésorerie de l'AFPA.

En conséquence, la situation économique et financière prévisionnelle de l'AFPA ne marque aucune amélioration. Cette situation de grande difficulté ne peut perdurer longtemps, puisqu'elle obère nos capacités à maintenir notre activité à moyen terme et à sécuriser les marchés existants, ainsi qu'à assurer notre développement.

Afin d'assurer notre pérennité et de sauvegarder notre compétitivité, l'AFPA s'est trouvée dans l'obligation d'envisager la mise en oeuvre de mesures de transformation sur l'ensemble de sa structure, impliquant une profonde révision de son modèle organisationnel. Nous avons donc présenté à nos élus en comité central d'entreprise, le 18 octobre 2018, un plan de transformation et un plan de sauvegarde de l'emploi, ayant pour objet de réinventer le modèle de l'AFPA à partir de son ADN. Dans ce contexte contraint, l'AFPA considère qu'elle a un rôle à jouer, au-delà de son rôle socle sur la formation professionnelle, dans l'aménagement du territoire au profit de la sécurisation des parcours.

Pour répondre à ces enjeux et se recentrer sur son ADN d'inclusion professionnelle et de promotion sociale, l'AFPA doit conduire une double transformation. D'une part, elle doit proposer des solutions innovantes, à la fois aux individus, aux entreprises et aux territoires. D'autre part, elle doit revoir son modèle organisationnel pour trouver le chemin de la performance économique : c'est le sens donné aux nouvelles orientations présentées à notre conseil d'administration en avril 2018, dans lesquelles ce projet transformation s'inscrit, et qui se déclinent en cinq axes.

Le premier axe consiste à adapter notre outil de production aux besoins de compétences d'aujourd'hui et de demain, au service des politiques publiques et des branches professionnelles.

Le deuxième axe consiste à passer de l'offre-catalogue à la solution adaptée aux réalités du territoire, de l'entreprise et de la personne dans le cadre de nouveaux partenariats public-privé.

Le troisième axe, très important, consiste à ouvrir nos centres pour créer des plateformes non virtuelles où s'inventent de nouvelles solutions inclusives pour l'emploi. Cette stratégie, appelée « le village de l'AFPA », a pour ambition d'accueillir en résidence sur le bâti qui n'est pas utilisé par l'AFPA des opérateurs de l'emploi et de la formation qui concourent à sécuriser le parcours professionnel et de vie de l'ensemble de nos bénéficiaires mais également, au-delà des stagiaires, des publics qui sont sur le bassin d'emploi et qui peuvent venir chercher des informations et réfléchir à leurs parcours professionnels dans un centre ouvert constituant un tiers lieu de l'insertion professionnelle.

Le quatrième axe consiste à renouveler notre contrat social pour redonner un sens individuel et collectif à nos missions.

Enfin, le cinquième axe vise la performance organisationnelle et l'optimisation des fonctions support du siège et des régions.

Après avoir retravaillé sur l'ensemble de nos sites, nous avons proposé en octobre 2018 un plan de transformation qui permet de remettre l'AFPA au coeur des missions de service public au profit de l'ensemble des financeurs, mais aussi des individus, bien entendu, puisqu'il s'agit aujourd'hui de répondre à leur capacité à utiliser leur propre budget de formation avec le compte personnel de formation (CPF). Nous avons déposé un projet qui consistait en octobre dernier – je vous expliquerai en quoi il a un peu évolué depuis – en la fermeture de 38 centres sur 116, et en la suppression de 1 541 postes, accompagnée de la création de 603 postes.

Nous nous sommes efforcés de mener des négociations dans le cadre du dialogue social et avons signé, au mois de février 2019, un accord de méthode resté minoritaire faute d'avoir obtenu l'adhésion de l'ensemble des organisations syndicales. Le 6 mars, nous avons finalisé notre procédure sociale et proposé de façon unilatérale de continuer à travailler sur l'amélioration de ce plan, ayant rencontré depuis octobre l'ensemble des régions et un certain nombre de branches professionnelles, et ayant participé à de multiples réunions sur les territoires avec les collectivités territoriales et l'ensemble des partenaires opérateurs – Pôle emploi, missions locales – afin de réfléchir à ce qu'on a depuis appelé des « projets alternatifs à la fermeture » de certains centres. Nous avons à la fois travaillé sur cet objet et oeuvré à améliorer les conditions d'accompagnement et les mesures sociales, pour la mobilité interne et pour la mobilité externe.

Nous avons à nouveau réuni le comité central d'entreprise le 18 juin dernier, et nous avons actuellement un projet qui permet de sauvegarder quatre sites qui étaient sur la liste des sites à fermer : Nevers, Le Puy-en-Velay, Thionville et Gap. Nous avons évidemment proposé de nouvelles mesures d'accompagnement social, qui ont été largement améliorées.

Aujourd'hui, nous devrions être dans la phase de mise en oeuvre, mais celle-ci s'est trouvée interrompue par une décision de justice suspensive la semaine dernière. Alors que nous avions proposé une stratégie d'évaluation in situ et en continu des risques psychosociaux centre par centre à l'aide d'une task force venant en appui de chaque directeur de centre jusqu'à la mise en oeuvre qui doit avoir lieu en mars 2020, la justice nous a demandé de travailler à ces impacts en amont de la mise en oeuvre ; nous allons évidemment nous conformer à cette décision. Pour ce qui est des 34 autres sites, nous avons engagé d'autres réflexions, mais des engagements pluriannuels en termes de pérennité seront nécessaires pour que nous puissions éventuellement décider de conserver certains de ces sites.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.