Intervention de Sylvia Pinel

Séance en hémicycle du mardi 9 juillet 2019 à 15h00
Agence nationale de la cohésion des territoires — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

Il y a un peu moins d'un mois, par sa déclaration de politique générale, le Premier ministre lançait l'acte II du quinquennat. Le volet territorial consistait en une déclaration à l'adresse des élus locaux, sans lesquels, selon lui, « la démocratie n'est qu'une coquille vide ». Par cette inflexion, le Premier ministre promet aussi de renouer avec une « exigence de proximité » qui « engage autant les collectivités territoriales que l'État ». De cela, nous aurons à reparler dans le cadre du futur projet de loi « Décentralisation et différenciation », à l'occasion duquel notre groupe formulera de nombreuses propositions.

Si nous nous retrouvons largement dans ce constat et dans vos intentions, nos interrogations portent sur la mise en oeuvre de celles-ci. Il en va de même pour l'Agence nationale de la cohésion des territoires. Telle qu'il ressort de la navette parlementaire, le texte portant création de celle-ci ressemble même à un vestige de l'acte I. En effet, alors que la présente proposition de loi fournissait l'occasion d'instituer une agence d'un type nouveau, permettant un véritable travail collaboratif entre l'État et les territoires, l'ANCT vient, tout au contraire, conforter une politique gouvernementale centralisatrice, bien éloignée du pacte girondin que nous appelons de nos voeux. La simplification des outils et le regroupement des agences et autres opérateurs de l'État est en effet une demande forte de nos élus locaux : ce point, qui fait consensus, était l'une des ambitions initiales de la création de la nouvelle agence.

Nous sommes sensibles à l'idée de créer un guichet unique, à l'écoute des maires, afin d'éviter la multiplication des interlocuteurs. Pour cette raison, nous saluons la fusion d'une grande partie du CGET, de l'EPARECA et de l'Agence du numérique. Par exemple, l'EPARECA, spécialisé dans la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et pour les opérations de revitalisation territoriale, figure dans le nouvel ensemble, mais pas le CEREMA – Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement – , alors que sa mission est d'accompagner les acteurs territoriaux dans la réalisation de leurs projets et qu'il bénéficie d'implantations territoriales. À titre de comparaison, l'EPARECA, ce sont environ 50 ETP – équivalents temps plein – , et le CEREMA, quelque 2 700. Cela illustre le manque d'ambition de l'Agence. Nous avions pourtant formulé des propositions, dont nous mesurons certes le caractère novateur, notamment celle de fusionner, à terme, plusieurs opérateurs au sein d'une même grande agence : le CEREMA, donc, mais aussi l'ANAH, l'Agence nationale de l'habitat, l'ANRU, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, et l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

Nous regrettons que ce scénario, envisagé en phase de préfiguration, ait été écarté. Je crains que, sur le terrain, la création de l'ANCT n'apporte aucun changement réel. Actuellement, les élus qui cherchent un soutien, notamment financier, pour un projet sollicitent le sous-préfet ou le préfet. Une fois l'agence créée, ils iront voir le délégué territorial, c'est-à-dire le préfet.

C'est surtout sur le chapitre de sa gouvernance que l'Agence déçoit grandement. Alors que nous proposions une véritable cogestion avec les collectivités, le schéma, pour le coup, reste jacobin. Même notre proposition d'une délégation territoriale unique à l'échelle de la Corse a été rejetée, alors qu'elle correspondait à l'organisation particulière de la collectivité considérée.

Ce déséquilibre de la gouvernance se traduit dans la composition du conseil d'administration. Le refus par la majorité d'une représentation paritaire des élus et de l'État a été le point d'achoppement en commission mixte paritaire. Bien que l'ANCT soit un établissement public d'État, les collectivités participeront financièrement, ce qui est bien normal, aux projets qu'elles défendent.

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