Intervention de Jacques Mézard

Réunion du mercredi 18 octobre 2017 à 16h30
Commission des affaires économiques

Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires :

Mme Annaïg Le Meur nous a interpellés sur le fonctionnement des conseils citoyens et sur les moyens que nous entendons consacrer à la politique de la ville. J'ai assisté au Conseil national des villes et j'ai pu constater la détermination dont faisaient preuve nombre de membres des conseils citoyens. Ces conseils fonctionnent plus ou moins bien selon les endroits, mais ils sont un volet essentiel de la politique de la ville.

En ce qui concerne les moyens, le budget de la politique de la ville est maintenu à son niveau de 2017, soit 430 millions d'euros, et nous entendons le sanctuariser pour la durée du quinquennat. La dotation politique de la ville est, quant à elle, de 150 millions d'euros, et nous proposons d'augmenter de 90 millions d'euros la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU).

J'ajoute que j'ai cosigné avec la ministre du travail un courrier adressé aux préfets pour leur demander de flécher prioritairement les emplois aidés vers les quartiers prioritaires. Il est également important de rappeler que le dédoublement des 2 500 classes de CP, lancé en lors de la dernière rentrée scolaire, se concentre très majoritairement sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville où se trouvent les réseaux d'éducation prioritaires plus (REP+). De même, la future police de proximité devrait elle aussi concerner en priorité ces quartiers qui, pour certains d'entre eux, sont véritablement à la dérive. J'y insiste, car je sais ce que c'est que d'être un élu local, un responsable d'exécutif, ayant à gérer des quartiers difficiles. Nous sommes parfaitement conscients que la République s'est retirée de certains de ces quartiers. Cela ne date pas d'hier et nous en portons tous la responsabilité.

Il est ainsi nécessaire non seulement de préserver les moyens budgétaires alloués à ces quartiers mais de les renforcer, comme nous le faisons pour la DSU, sachant qu'au-delà des moyens financiers, les politiques menées doivent viser l'éducation, la sécurité et la cohésion sociale.

Lorsque je me déplace, chaque semaine, dans ces quartiers, je constate que ce que les gens réclament n'est rien d'autre que le droit commun et la fin d'une situation qu'ils vivent comme un état de marginalisation par rapport aux lois de la République. Sachez donc que, pour le ministre de la cohésion des territoires – ce qui inclut évidemment la cohésion sociale – que je suis, ce rétablissement du droit commun est un objectif prioritaire.

Dans cette perspective, la formation des conseillers citoyens est essentielle. Comme le faisait observer récemment M. François Pupponi, on sait qui prend la place de la République lorsque celle-ci se retire. Nous en sommes parfaitement conscients, et la lutte contre le communautarisme est, à nos yeux, fondamentale.

Monsieur François Ruffin, oui, mon ministère est bien celui de la cohésion des territoires. Cela étant, je vous ai entendu sur la situation de l'OPAC d'Amiens, et je peux comprendre l'inquiétude forte de certains bailleurs sociaux au sujet du financement et de la restructuration du secteur.

C'est un secteur que je connais bien, et je répète qu'il doit évoluer et s'adapter pour que nous puissions mieux construire et davantage. Les 4 millions de personnes qui restent mal logées en dépit des 40 milliards d'euros que nous dépensons chaque année sont bien le signe que quelque chose ne fonctionne pas dans le système, et l'expérience a montré que continuer d'augmenter l'endettement de l'État en la matière n'était pas la bonne solution.

Vous m'avez également transmis la question de M. Yves Daniel sur les logements vacants par peur des impayés. Cela existe mais ce n'est pas l'unique raison qui explique que demeure en permanence un volant de 5 à 6 % de logements vacants.

L'un des candidats à l'élection présidentielle proposait, pour remédier à cette situation, que l'on accélère les procédures d'expulsion. Je doute que ce soit la solution. Mieux vaut intervenir le plus en amont possible pour éviter que ne se cristallisent des situations infernales pour le locataire qui ne peut plus payer son loyer, comme pour le propriétaire, qui attend de ce logement un complément de revenu. D'où notre stratégie du « logement d'abord », fondée sur la synergie des différents intervenants, et qui s'accompagne d'un système d'alertes et d'intermédiation locative pour le privé, comme cela existe déjà pour le logement social. Il faut éviter en effet des situations où le locataire a accumulé des mois d'arriérés de loyer, car la régularisation peut ensuite prendre plusieurs mois, voire plusieurs années.

En ce qui concerne la mobilité dans le parc social, nous n'avions guère besoin que l'actualité récente nous rappelle que certains locataires y logent indûment. C'est une question difficile, non seulement du fait de l'absence de mobilité dans le parc social, notamment à Paris et en Île-de-France, mais également car nous entendons préserver les droits des locataires.

Cela étant, nous devons faire évoluer le système, mais pas, comme j'ai pu le lire dans la presse, en expulsant des personnes âgées. C'est n'importe quoi, d'autant que la loi interdit de le faire au-delà de soixante-cinq ans ! Nous avons déjà proposé que la commission d'attribution revoie tous les six ans la situation des locataires. Il est normal en effet qu'une personne qui occupe seule un F4, alors que de nombreux couples avec enfants attendent un logement suffisamment grand pour eux, soit non pas expulsée mais relogée dans un logement mieux adapté à ses besoins. Ce n'est pas toujours évident, et ce n'est pas toujours fait, même si la législation actuelle permet de reconsidérer la situation de chacun, notamment en fonction de ses revenus. Une disposition autorise même la résiliation du bail, mais elle n'est que très peu utilisée. Il est clair pourtant qu'accroître la mobilité dans le parc social est un impératif et que toute notre stratégie logement vise à accompagner cette prise de conscience.

Vous trouvez trop long le délai de six ans, mais on ne peut pas non plus procéder à des révisions chaque année. Vous aurez en tout cas le loisir de défendre votre position en déposant des amendements à ce propos.

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