Intervention de Virginie Duby-Muller

Réunion du lundi 15 juillet 2019 à 15h05
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller :

Nous nous retrouvons pour la deuxième lecture de la proposition de loi tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse. C'est, j'en suis convaincue, un texte de bon sens, tout comme le projet de loi relatif à la modernisation de la distribution de la presse que nous examinerons ensuite. L'un comme l'autre, ces deux textes législatifs traduisent un engagement fort : réaffirmer la place de la presse dans notre pays et son pluralisme comme principe à valeur constitutionnelle.

Cette proposition de loi constitue un véhicule législatif adapté pour transposer rapidement l'article 15 de la directive européenne relative au droit d'auteur dans le marché unique numérique, après plusieurs années de laborieuses et complexes négociations au sein des institutions européennes. À cet égard, je tiens à saluer le travail du rapporteur Patrick Mignola. Nous sommes désormais prêts à aborder, dans un grand esprit de responsabilité, cette étape de transposition qui est essentielle et attendue par les professionnels depuis des années.

Le secteur de la presse est en butte à de graves difficultés, notamment économiques. Entre 2000 et 2016, la part des recettes publicitaires du secteur est passée de 44,8 % à 31,6 % de ses revenus. La part des ventes est donc symétriquement passée de 55,2 % à 68,4 %, mais avec un produit de ces ventes en très forte baisse. Cette situation s'explique notamment par deux phénomènes : la consommation des articles par le biais d'internet ; la captation des produits de la publicité par les GAFA.

Pourtant, le marché publicitaire est en croissance : en France, il a augmenté de 1,2 % entre 2016 et 2017 pour atteindre 13,6 milliards d'euros. Les abonnements numériques sont aussi en croissance, mais n'arrivent toujours pas à compenser la baisse des abonnements papiers.

En l'absence de droit voisin, les éditeurs de presse ne sont pas fondés à vouloir contrôler la reproduction et la communication de leur production. En conséquence, des agrégateurs – type Google news – ou des services de veille de presse compilent des liens vers les articles accompagnés d'extraits ou de résumés – snippets – ou reproduisent les articles dans le cadre de newsletters envoyées à leurs clients.

La diffusion numérique de la presse et les nouveaux usages posent donc le problème du partage de la valeur dans ce secteur. Le partage de liens pratiqué par les GAFA revient souvent à indexer tout ou partie des contenus d'articles sur leurs sites au détriment de ceux des éditeurs qui perdent en attractivité auprès des annonceurs.

En première lecture, nous avions déjà salué le travail transpartisan qui a entouré ce texte de loi, bien souvent gage de qualité. Les derniers amendements du Sénat vont également dans le bon sens. Le premier précise des éléments : la contribution des publications à l'IPG ; la prise en compte des investissements humains, matériels et financiers dans la fixation de la rémunération. Le deuxième prévoit que l'accord sur le droit à une part appropriée et équitable de la rémunération s'appliquera aussi aux auteurs non-salariés en intégrant les organisations représentatives d'auteurs. La troisième ajoute les photographies et vidéogrammes dans les publications de presse.

Pour cette deuxième lecture, le groupe Les Républicains se réjouit de ce travail commun transpartisan qui a été effectué par le Gouvernement, le Sénat et notre assemblée.

Nous voulons accompagner les changements du secteur de la presse, littéralement bouleversé par le numérique. Nous réaffirmons notre attachement à une presse libre, indépendante, pluraliste et économiquement viable ; elle doit tout simplement pouvoir recevoir la rémunération du fruit du travail de ses journalistes.

La création de ce droit voisin est donc une urgence économique et démocratique. J'espère que ce texte fera ici consensus, comme ce fut le cas au Sénat.

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