Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du jeudi 3 octobre 2019 à 17h35
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères :

Ils atteignent 660 millions d'euros, contre 512 millions en 2019. Je rappelle que c'est beaucoup plus qu'en 2018 : la progression est nette et cette évolution nous permettra de tenir nos engagements. Le programme 209 connaît une augmentation de 6,8 % par rapport à 2019.

Je souhaiterais répondre à M. Bruno Joncour, ainsi qu'à plusieurs orateurs qui m'ont interrogé sur le même sujet. Pour que les choses soient très claires, l'aide au développement a un objet propre, qui est de lutter contre la pauvreté, de réduire les inégalités et de créer des perspectives économiques pour les pays concernés. Que l'aide au développement, par cette action, permette de juguler des migrations, soit, mais c'est une conséquence. Ne mettons pas les choses dans le désordre. Je n'évacue pas la question des migrations, et je m'exprimerai à ce sujet dans le débat qui aura lieu lundi, mais ma philosophie est claire, et c'est celle que je viens de vous exposer.

Monsieur Clément, vous m'avez interrogé, comme d'autres de vos collègues, au sujet des étudiants étrangers. La stratégie de fond que nous voulons développer est la suivante : nous voulons projeter nos dispositifs de formation à l'étranger, notamment en Afrique, afin de partager l'enseignement universitaire français sur ces territoires. Nous voulons développer des projets sur le modèle du campus franco-sénégalais, qui ouvrira la semaine prochaine. Il permettra aux étudiants sénégalais de bénéficier de la qualité de l'enseignement universitaire français sur leur propre territoire. C'est la volonté du Président de la République et c'est le sens de son discours de Ouagadougou. Des initiatives de ce genre existent déjà dans d'autres pays : je pense par exemple au hub de Yamoussoukro, que j'ai eu l'occasion de visiter en Côte d'Ivoire, ou à l'Université franco-tunisienne, qui commence à se développer. Notre volonté, je le répète, est de projeter la qualité de l'enseignement français dans les territoires pour favoriser leur développement.

Par ailleurs, l'augmentation de 2,4 % des frais d'inscription n'a pas eu de conséquences majeures sur les effectifs. Cela s'explique de plusieurs manières, notamment par le fait que certaines universités ont introduit des exonérations, et par l'attribution de bourses. Cette augmentation offre des recettes supplémentaires aux universités, et nombre d'étudiants ont les moyens de la supporter. J'ajoute que le coût universitaire payé par l'étudiant étranger est le tiers du coût réel payé par le contribuable français. Cette décision, je le répète, n'a pas entraîné de perturbation majeure. Elle a au contraire permis de développer, en Afrique, l'enseignement supérieur franco-africain, ce qui permet aux étudiants de ces pays de poursuivre leurs études sur leur propre territoire.

Monsieur David, vous m'avez interrogé sur la question de l'audiovisuel public. Je précise que, dans les arbitrages sur le projet de loi de réforme de l'audiovisuel public, j'ai demandé et obtenu que le Quai d'Orsay soit partie prenante de la gouvernance, ce qui n'était pas gagné d'avance. Vous voyez, madame Genetet, que je me bats de temps en temps ! C'est au sein de la holding qu'il faudra faire en sorte que le produit de la contribution à l'audiovisuel public continue d'être affecté à notre outil d'influence internationale. Je suis très attaché à ce principe, comme je l'ai dit à la conférence des ambassadeurs, et je pense que ce point de vue est largement partagé. La création de la holding nous permettra de mieux nous défendre, de renforcer la dimension internationale de l'audiovisuel français et de faire en sorte qu'elle soit mieux partagée, ce qui est une bonne chose.

Je n'ai pas d'informations particulières sur l'Amérique latine, mais je peux vous dire qu'il n'y a pas de blocage. J'ai moi-même inauguré, à Bogota, la diffusion de France 24 en espagnol. Ce projet a longtemps été incompris par certains acteurs, que je ne citerai pas : ils se demandaient ce que l'espagnol venait faire dans l'audiovisuel français. Il a fallu expliquer les choses, et cela montre combien il sera important d'être présent au sein de la holding, pour expliquer. Je crois que cette diffusion sera élargie au Mexique d'ici la fin de l'année.

Madame Autain, nous sommes en désaccord sur un certain nombre de points, et ce n'est pas nouveau. Je ne reviendrai pas sur la situation du Yémen, à laquelle je prête une grande attention, car je vous ai déjà exposé ma position. Il n'a jamais été question de financer une aide militaire par l'APD. Ce que nous avons souhaité, c'est que lorsqu'une intervention militaire a lieu quelque part, par exemple au Sahel, l'AFD puisse être mobilisée immédiatement sur les territoires qui viennent d'être « libérés » de leurs occupants malveillants. Nous veillons alors à la bonne articulation entre l'AFD et l'autorité militaire, pour que le relais se fasse bien. C'est une nouveauté, mais je répète que les crédits de l'APD ne sont jamais affectés à une aide militaire.

Vous m'avez interrogé sur le titre 7 du programme 110, qui ne dépend pas de mon ministère. J'y ai fait référence dans mon propos introductif : je vous ai indiqué que l'APD comportait deux ensembles, les programmes 110 et 209. Mais, pour ma part, je ne suis responsable que du programme 209.

S'agissant des Catalans, sur lesquels M. Lecoq m'a également interrogé, mon principe de base est que je ne reçois pas d'autres ministres des affaires étrangères que ceux des pays. Je n'ai pas compétence pour autre chose – et je ne porterai pas de jugement.

Monsieur Lecoq, je vous remercie de la vigilance dont vous faites preuve pour identifier des affaires, faire pression sur nous et y revenir tant qu'elles ne sont pas réglées. Ce que vous faites nous est très utile. S'agissant de M. Laurent Fortin, nous essayons d'obtenir son transfèrement. La difficulté, c'est qu'il n'existe pas de convention bilatérale. Nous proposons son retour en France, avec inscription de sa condamnation au casier judiciaire pour qu'il effectue son sursis en France. Nous sommes en discussion avec les autorités chinoises et je me suis encore entretenu de cette affaire la semaine dernière avec le ministre des affaires étrangères chinois. M. Fortin n'est pas le seul Français à être retenu en Chine : c'est aussi le cas de Mme Marion Cambounet. Nous suivons leur situation de près et nous pourrons peut-être, lors de la visite que nous ferons en Chine avec le Président de la République au début du mois de novembre, obtenir des résultats. L'ambassade de France entretient des contacts très réguliers avec eux, mais il est vrai que leur situation est très difficile.

S'agissant des trois jeunes Allemands, la procédure judiciaire pour des faits établis sur le sol français est purement française. Ils peuvent donc bénéficier de la protection consulaire, mais je n'ai pas eu de saisine de la part des autorités allemandes à ce sujet pour l'instant.

S'agissant, enfin, de M. Vincenzo Vecchi, il s'agit d'une demande d'extradition italienne adressée à la France, mais le pôle de l'entraide judiciaire n'a pas de dossier ouvert à ce nom. Comme c'est un mandat d'arrêt européen qui s'applique, les transmissions des demandes ont lieu directement entre les juridictions des deux pays, sans passer par les ministères de la justice des deux pays. Je précise, pour l'information de tous, que le mandat d'arrêt européen s'applique à des faits commis postérieurement au 1er novembre 1993.

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