Intervention de Émilie Chalas

Séance en hémicycle du mercredi 30 octobre 2019 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2020 — Gestion des finances publiques et des ressources humaines ; action et transformation publiques ; crédits non répartis ; régimes sociaux et de retraite ; remboursements et dégrèvements ; gestion du patrimoine immobilier de l'État ; pensions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Chalas, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

À l'issue de plus d'un an de concertation et de près de quatre mois de débats parlementaires, la loi de transformation de la fonction publique a été promulguée le 6 août dernier. Il s'agit d'une réforme majeure, enrichie de nombreux apports issus du travail considérable que nous avons collectivement accompli, souvent de manière transpartisane, en commission des lois et en séance publique. L'entrée en vigueur progressive des dispositions de ce texte permettra d'adapter notre fonction publique aux multiples enjeux auxquels elle est actuellement confrontée.

Cette réforme offre davantage de souplesse aux employeurs publics – je pense par exemple à la simplification du dialogue social et aux nouvelles facilités de recrutement contractuel – , tout en garantissant de solides protections à l'ensemble des agents : création d'une prime de précarité applicable aux contrats de courte durée, renforcement des parcours de formation et prise en compte des impératifs que constituent l'égalité professionnelle et la lutte contre les discriminations. À ces sujets s'ajoutent le développement accru du télétravail ou l'expérimentation de la rupture conventionnelle, qui offriront de nouvelles opportunités aux agents publics et répondront simultanément à des objectifs légitimes de liberté et de protection.

En outre, je me réjouis de constater que plusieurs des propositions que j'ai formulées lors de l'examen des deux précédents projets de loi de finances, en tant que rapporteure pour avis des crédits du programme 148, se sont enfin concrétisées. Je pense notamment à l'exonération du jour de carence pour les femmes enceintes, à la mise en place d'un contrôle, à l'échelle ministérielle, du nombre d'apprentis recrutés chaque année, au renforcement de l'accompagnement individualisé des fonctionnaires reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, au développement des troisièmes concours ou encore à l'obligation de formation au management pour tout agent public prenant pour la première fois des fonctions d'encadrement.

Ces avancées, évidemment très positives, ne représentent qu'une étape. De nombreux autres sujets devront également être traités par voie de décret ou d'ordonnance. Je tiens à vous remercier, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, de nous avoir présenté, la semaine dernière, lors de l'examen pour avis en commission des lois des crédits du programme 148, l'état d'avancement des textes réglementaires sur lesquels travaillent vos services. Les concertations nécessaires à la publication de plusieurs décrets d'application se tiendront dans les prochains mois. Ces décrets ont pour vocation de rendre effectives l'ensemble des avancées contenues dans la loi de transformation de la fonction publique, adoptée l'été dernier.

Dans le cadre du rapport pour avis présenté devant la commission des lois, j'ai choisi cette année d'analyser plus spécifiquement le sujet des classes préparatoires intégrées – les CPI – aux écoles de service public. Dix ans après leur création, il m'est apparu nécessaire de dresser un bilan de ce dispositif, tout en suggérant quelques pistes d'amélioration qui pourront utilement alimenter les réflexions autour de la future ordonnance relative à la formation initiale et aux concours administratifs, notamment de catégorie A+, pour laquelle la mission pilotée par Frédéric Thiriez rendra prochainement ses conclusions. Je souhaite ardemment que la représentation nationale fasse entendre sa voix et ses propositions sur une réforme essentielle, qui aura pour but de rendre la haute fonction publique plus ouverte, afin qu'elle reflète plus fidèlement la société qu'elle a vocation à servir.

Les vingt-huit CPI existantes constituent un outil particulièrement intéressant car elles participent directement à la politique d'égalité des chances et de diversité menée au sein de la fonction publique. Elles offrent en effet un soutien pédagogique renforcé visant à préparer leurs élèves – principalement des étudiants de condition modeste issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale – aux concours administratifs. Leurs résultats aux concours sont très encourageants : pour l'année 2017-2018, environ 35 % des élèves de CPI ont réussi le concours auquel leur école les préparait et 54 % ont réussi au moins un concours ; en comptabilisant les réussites tardives, obtenues plusieurs mois ou années après la fin de la scolarité en CPI, le taux de réussite atteint 83 %.

Ce modèle fonctionne bien mais pourrait être amélioré. Il serait opportun de stimuler la conclusion de partenariats entre les CPI et les établissements publics d'enseignement supérieur, notamment les universités. L'objectif est d'améliorer l'accessibilité territoriale des CPI, au bénéfice de l'ensemble des élèves préparant des concours, qui profiteraient ainsi de nouvelles synergies entre le monde universitaire et les CPI. Les coopérations entre ces deux univers représentent indiscutablement une voie d'avenir, à la fois pour les étudiants et pour la fonction publique.

Plus largement, la politique d'égalité des chances doit s'inscrire sur le long terme et se déployer bien en amont des concours administratifs. L'accompagnement d'étudiants méritants et issus de milieux défavorisés ne peut se résumer à la seule année précédant les concours. Dans cette optique, une préparation pluriannuelle, initiée dès le début des études supérieures, serait utile, afin de compenser efficacement les inégalités sociales entre les futurs candidats. Cela requiert aussi d'intensifier les campagnes de communication sur les métiers de la fonction publique, afin de toucher ceux qui ne sont pas suffisamment informés des perspectives professionnelles que peuvent leur offrir ces beaux métiers. L'exemple des campagnes menées par le ministère des armées me semble particulièrement intéressant et pourrait servir de modèle.

Voilà, en quelques mots, des pistes de réflexion susceptibles de nourrir ce débat essentiel, à la hauteur duquel nous nous devrons d'être dans les années à venir.

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