Intervention de Sébastien Lecornu

Réunion du mardi 5 novembre 2019 à 21h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires chargé des collectivités territoriales :

Ce texte tombe surtout au lendemain du grand débat national, et répond à un engagement du Président de la République. Si nous ne l'avions pas fait, vous auriez accusé Emmanuel Macron de s'être servi des maires pour faire le grand débat et de ne pas tenir ses promesses. Entre nous, je ne vois pas en quoi ce texte constitue un avantage pour certains candidats aux élections municipales. Et si les sénateurs s'emparent de ce texte pour sillonner les campagnes, ils ont bien raison. Il faut se réjouir qu'ils soient parfois porteurs de bonnes nouvelles. Sinon, ne nous étonnons pas que la mésentente persiste entre les élus locaux et l'État.

Vous avez raison de rappeler les écrits de Tocqueville. Encore faut-il que sa pensée se traduise en actes – nous le verrons en examinant les amendements.

Certes, nous sommes encore loin du statut de l'élu. Mais l'essentiel des propositions qui ont pu être commises à ce sujet ont été reprises dans ce texte. Disons-le clairement : aller plus loin supposerait que l'on change complètement de modèle et que l'on se rapproche d'un modèle à l'allemande, où les maires sont des agents de l'État. La belle loi républicaine de 1884 dispose que les fonctions locales sont gratuites, ce qui signifie que l'élu n'est pas un salarié de sa commune – il est, dans la République, autre chose. Parler chômage, retraite ou salariat, implique une modification radicale de notre vision. Avec Jacqueline Gourault, nous pensons être allés au maximum, ou presque, de ce que nous pouvions faire dans le cadre du modèle actuel, celui de la libre administration des collectivités territoriales et de leur autonomie financière.

Monsieur de Courson, on peut toujours dire, pour des raisons de rhétorique, que cela ne va pas assez loin, mais concrètement, avancer suppose de changer de logique et de philosophie. Je suis ouvert à tout, mais je ne suis pas certain qu'il existe un consensus sur ce point ; en tout cas, personne, parmi les associations d'élus que j'ai entendues, ne le réclame !

Je dois reconnaître que certaines de vos propositions sont courageuses. Vous prônez l'égalité devant la charge, soulignant qu'un salarié du secteur privé qui souhaite s'engager dans un mandat local sera toujours placé dans une situation d'inégalité de fait face à un agent de la fonction publique.

Une réponse consisterait à protéger le salarié du secteur privé ; j'ai été défavorable aux amendements allant dans ce sens au Sénat. Pour en avoir parlé avec les syndicats, je pense que faire de l'élu local un salarié protégé serait prendre un très mauvais virage. En effet, un salarié est protégé parce qu'il participe au dialogue social, donc au bien-être de l'entreprise, à son objet social. Si vous protégez les salariés parce qu'ils sont élus locaux, alors les élus locaux deviendront inemployables – sans compter le fait qu'ils travaillent souvent dans les petites entreprises locales.

Pour votre part, vous suggérez, et cela ne manque pas d'audace, que le fonctionnaire élu perde ses avantages de fonctionnaire. Cela pique un peu les yeux, mais je livre cette proposition à votre réflexion.

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