Intervention de Coralie Dubost

Réunion du mardi 12 novembre 2019 à 17h20
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCoralie Dubost, référente de la commission des Lois :

Il a beaucoup été question de lutte contre le terrorisme à la suite des attentats tragiques qui ont eu lieu ces dernières années sur le sol européen. Si ces événements nous horrifient, il est de notre devoir de parlementaire de s'assurer que la réponse des pouvoirs publics est adaptée et efficace.

Le terrorisme est une menace globale, qui présente une dimension internationale et qui est marquée par la recrudescence des combattants étrangers. Il y a donc toute la place pour une intervention concertée au niveau européen, qui s'inscrit dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.

Dès juin 2014, l'Union s'est confrontée plus spécifiquement à cette problématique en révisant sa stratégie visant à lutter contre le terrorisme. En décembre 2014, le Conseil a adopté les lignes directrices relatives à la mise en oeuvre de cette stratégie. La clause de solidarité prévue à l'article 222 du TFUE, qui prévoit que les États membres collaborent en cas d'attaque terroriste, a également fait l'objet d'une décision du Conseil qui clarifie ses conditions de mise en oeuvre.

Après les attentats de Paris et les conclusions du Conseil européen du 12 février 2015, de nouvelles mesures ont été prises. Le Conseil de l'Union européenne, dans sa formation rassemblant l'ensemble des ministres de l'Intérieur, a décidé en mars 2015 de fixer quatre grandes priorités. La première, renforcer l'application du cadre Schengen ; la seconde, améliorer les capacités de signalement des contenus sur Internet : cela a si bien fonctionné que nous venons de la décliner à l'échelle nationale par une proposition de loi portée par madame Avia ; en troisième lieu, la lutte contre le trafic d'armes à feu ; enfin, l'intensification des échanges d'informations et la coopération opérationnelle.

Avec les cinq années de recul que nous aurons bientôt sur ces évolutions, nous vous proposons un rapide bilan des outils développés pour lutter contre le terrorisme, en retenant cinq points principaux qui nous paraissent fondamentaux.

Pour qu'une politique publique européenne de lutte contre le terrorisme efficace puisse être mise en place, il faut d'abord que l'Union légifère sur cette question. C'est une étape indispensable. À cet égard, nous pouvons affirmer que la Commission européenne s'est emparée du sujet de manière assez satisfaisante, ce qui semblait refléter les préoccupations des États membres. Le terrorisme et la radicalisation constituent le deuxième défi commun identifié par la stratégie de sécurité intérieure renouvelée par l'Union européenne pour la période 2015-2020. De plus, il existe depuis 2007 un coordinateur européen pour la lutte contre le terrorisme. Il s'agit, comme vous le savez, du Belge Gilles de Kerchove, qui est entre autres chargé de la mise en oeuvre de la stratégie de l'Union. Il participe notamment aux réunions mensuelles du Groupe « Terrorisme ».

Ce qui nous amène au second point : la nécessité d'une meilleure coordination à l'échelle européenne de la lutte contre le terrorisme. Il s'agit d'une forme de criminalité qui est, par essence, transnationale. Aussi, la liberté de circulation qui est la règle au sein de l'espace Schengen doit toujours pouvoir être compensée par une grande vigilance à la criminalité.

Puisque nous parlons des développements récents, il faut évoquer aussi le rôle de premier plan qu'ont joué les services de renseignement dans la prévention des attentats. Il est dramatique que des attentats aient lieu alors que le recoupement d'informations détenues par plusieurs services de renseignement aurait permis de les éviter. Le rapprochement des services relevant de différents États est cependant délicat. Pour des raisons évidentes de souveraineté nationale, les informations ont plutôt tendance à être jalousement conservées.

Il faut saluer les actions qui ont été mises en oeuvre pour surmonter ces difficultés : d'abord l'action de l'IntCent, le centre de l'Union européenne pour l'analyse des renseignements placé auprès du service européen pour l'action extérieure. Il existe aussi, auprès de l'agence Europol, un centre dédié à la lutte contre le terrorisme. Les États doivent l'alimenter et doivent le faire en temps réel, pour que la somme de leurs informations puisse être analysée et soit transformée en renseignements exploitables.

Il n'existe sans doute pas de solution miracle à cet état de fait. La proposition d'une Agence européenne du renseignement, qui me semble parfaitement souhaitable, est peut-être encore illusoire. Cependant, le renforcement des coopérations bilatérales fondées sur la confiance – parce que rien de significatif ne pourra se faire à 28 – pourrait être un premier progrès, tout comme le renforcement de l'interopérabilité entre les différents fichiers déjà constitués par Europol.

Une autre piste de progrès tiendrait au renforcement de la coopération judiciaire. Sur ce point, une meilleure coopération est beaucoup plus réaliste puisqu'elle est prévue par les traités. L'article 86 du TFUE prévoit la possibilité d'élargir les compétences du parquet européen à la lutte contre la criminalité grave transfrontalière (nul ne doutera que le terrorisme pourra en faire partie). La Commission sortante a clairement exprimé son soutien à cette éventualité, par la voix de son président, mais aussi par celle de la commissaire chargée de la justice. Nous espérons que le parquet européen ne restera pas cantonné à la lutte contre les infractions financières, mais pourra mettre ses moyens tout particuliers au service de la sécurité de l'ensemble des citoyens européens.

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