Intervention de Meyer Habib

Réunion du mercredi 15 janvier 2020 à 16h05
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Mon temps de parole étant limité, je ne parlerai pas de la victoire éclatante de Boris Johnson qui, contrairement à une déclaration dramatique faite par l'un de nos collègues, n'est due ni aux juifs, ni au CRIF, ni à Israël, mais à un choix clair, net et précis du peuple britannique. Mon propos se concentrera donc sur l'Iran.

Monsieur le ministre, il aura fallu attendre que les dirigeants iraniens annoncent, le 5 janvier dernier, que leur pays ne se sentait plus tenu par le dernier élément essentiel de l'accord sur le nucléaire, à savoir la limitation du nombre de centrifugeuses, et que le programme nucléaire iranien ne serait plus soumis à aucune limite opérationnelle, pour que l'UE-3 – les ministres des affaires étrangères de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni – actionne le mécanisme de règlement des différends et que nous fassions une déclaration conjointe avec nos alliés.

Le 27 novembre dernier, j'affirmais ici même que l'accord du 14 juillet 2015 était hélas en état de mort cérébrale. Certes, notre politique est marquée par un léger durcissement, mais notre position reste globalement inchangée. Nous, Européens, persistons dans notre attachement à l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien, en anglais Joint Comprehensive Plan of Action ou JCPoA, et notre rejet de la stratégie de la pression maximale. Monsieur le ministre, vous ne serez pas étonné que je vous dise que, pour moi, c'est une erreur. J'ai la conviction qu'en réalité, les mollahs n'ont jamais respecté cet accord, ni même eu l'intention de le faire, comme les Israéliens, notamment le Mossad, l'ont prouvé de façon éclatante il y a un an et demi.

Mais l'essentiel n'est pas là : d'ici à quelques mois, un an tout au plus, l'Iran risque de disposer de l'arme nucléaire, comme le montre une étude publiée il y a quelques jours. La République islamique d'Iran est un régime djihadiste, dont les valeurs sont aux antipodes des nôtres. Ce régime homophobe, négationniste, et qui applique la charia, constitue la matrice du djihad mondial depuis quarante ans. Le pivot de la terreur islamiste, le général Qassem Soleimani, a été éliminé par un drone américain le 3 janvier dernier, alors qu'il se croyait intouchable. Comme toujours, la plupart des experts autorisés, des médias et des politiques se sont déchaînés contre Trump, expliquant qu'en éliminant Soleimani, il n'avait fait que souder les Iraniens autour du régime en place. Or, c'est exactement l'inverse qui est en train de se produire : Hassan Nasrallah est caché dans son bunker à huit mètres sous terre parce qu'il a peur et, le 8 janvier dernier, l'Iran a abattu un avion de ligne ukrainien et tué 176 innocents par erreur… Imaginez qu'ils appuient un jour par erreur sur le bouton nucléaire !

Aujourd'hui, la population n'en peut plus de ce régime et, malgré la répression barbare – il y a déjà eu près de 1 500 morts –, la jeunesse iranienne, les étudiants sont en train de se lever et de braver les mollahs. Un vent de révolution et de liberté souffle en Iran, jusqu'à la télévision d'État : dimanche, la très populaire présentatrice Gelareh Jabbari a présenté sa démission car, selon ses propres déclarations, elle n'en pouvait plus de mentir depuis treize ans. Alors que le régime a peint au sol des drapeaux américains et israéliens afin qu'ils soient piétinés par les manifestants, les étudiants ont préféré les contourner. La réalité, c'est que le régime des mollahs est honni par l'immense majorité des Iraniens et à bout de souffle.

Dans ce contexte, j'ai la conviction que nous avons un rôle à jouer, monsieur le ministre. Je sais que vous avez un devoir de réserve et que, s'agissant qu'une audition publique, vous ne pouvez dévoiler ce que vous pensez au plus profond de vous-même. Moi, je peux me lâcher et dire que la France a un rôle énorme à jouer : il faut, d'une façon ou d'une autre, faire tomber ce régime dont les valeurs sont aux antipodes des nôtres.

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