Intervention de Serge Letchimy

Réunion du lundi 14 octobre 2019 à 13h30
Commission d'enquête sur l'impact économique, sanitaire et environnemental de l'utilisation du chlordécone et du paraquat comme insecticides agricoles dans les territoires de guadeloupe et de martinique, sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy, président :

En début de séance, lorsque vous avez commencé vos propos, vous avez employé un terme très significatif. Je vous le dis comme je le pense. On ne peut pas vous reprocher quoi que ce soit étant donné que vous n'étiez pas présente en 1972. Vous avez employé le terme « drame » et avez rajouté, il me semble « scandale environnemental ». Venant de la bouche d'une ministre, il est important d'entendre cela. En plus d'environnemental, on aurait pu rajouter « humain » car les conséquences sont humaines. Moi, martiniquais, et tous les Guadeloupéens et Martiniquais vivent cela comme un vrai drame. Nous nous sentons démoralisés, manipulés, nous avons le sentiment d'avoir été trompés. Je suis conscient que c'est la reprise des paroles du Président de la République. Vous savez que je suis dans l'opposition mais je suis très respectueux de la République et j'ai soutenu des présidents avant M. Macron. C'est la première fois qu'un Président de la République dit clairement la question de la responsabilité et de la réparation et emploie le terme « aveuglement collectif », qui concerne tout le monde, y compris l'État, y compris les importateurs de chlordécone, de Képone et de Curlone et les utilisateurs.

Mon problème et mon souci sont que nous allons rentrer dans une bataille de chiffres. Pourquoi pas ? Mais comment aborder un drame avec des mécanismes classiques ? Comment aborder un drame qui dure depuis 48 ans (1972-2020) et qui est systémique sur le plan social, humain, économique, culturel, etc. avec des solutions classiques ? Depuis très longtemps, nous ressentons que ce qui est fait n'est pas suffisant, qu'il faut coordonner plus et investir beaucoup plus de moyens, vous l'avez dit vous-même.

Madame la ministre, êtes-vous d'accord sur le fait de mettre en priorité stratégique la question du chlordécone ? La question est très simple et très claire et appelle un oui ou un non. Si la réponse est non, nous restons dans un cycle classique en fonction des initiatives des universités, des centres de recherche, des moyens financiers et de tout ce que l'on veut. Entre temps, des personnes meurent, entre temps, la terre est toujours polluée. Acceptez-vous, oui ou non, de faire du chlordécone une priorité stratégique ? Vous avez parlé du travail conjoint du GOSS et du GIA. Nous avons vraiment le sentiment que des efforts sont faits mais il n'y a pas de cohérence, pas de priorité, le travail n'est pas dédié à cette question. On ne peut pas prendre quelque chose de pluridisciplinaire dans des temps décalés qui sont de l'initiative du chercheur. Pourriez-vous répondre avec satisfaction à cette question ? Proposerez-vous au Président de la République de considérer le chlordécone comme une priorité stratégique ? Je formule officiellement cette demande ici mais notre commission risque de reprendre cette formule.

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