Intervention de Gérard Menuel

Séance en hémicycle du vendredi 10 novembre 2017 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Menuel, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour relever les défis du changement climatique et adapter les capacités de notre pays à répondre de manière efficace et durable aux besoins de sa population, nous avons besoin d'une recherche nationale dynamique.

Une recherche qui soit en capacité d'expliquer les phénomènes, mais aussi d'éclairer les débats et les prises de décisions sur des sujets complexes comme l'usage des produits phytopharmaceutiques ou l'avenir du nucléaire, et de concevoir les solutions de demain. Disposer d'une recherche publique solide et entreprenante est ainsi un enjeu d'indépendance nationale et de responsabilité internationale, mais aussi d'efficacité politique et opérationnelle.

Pour ce qui est de la solidité des investissements de l'État dans la recherche sur les problématiques environnementales, force est de reconnaître que le projet de budget pour 2018 promet non seulement de les reconduire mais aussi de les consolider. Nous avons examiné pour avis les crédits des programmes 172, 190 et 193, qui soutiennent ces recherches. Leur progression sera, objectivement, substantielle.

Le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » gagnera près de 347 millions d'euros en crédits de paiement. Respectivement 96 et 124 de ces millions supplémentaires seront consacrés à la recherche dans le domaine de l'énergie et 26 millions à la recherche dans le domaine de l'environnement. Ce sont les seuls budgets thématiques qui augmenteront au sein du programme 172.

Le programme 193 « Recherche spatiale », qui finance en particulier l'ensemble des dispositifs satellitaires nous permettant de suivre l'évolution de notre planète et de son climat, sera renforcé de plus de 155 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement.

Enfin, au coeur de nos enjeux, le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » progressera de 57 millions d'euros en autorisations d'engagement et de près de 24 millions d'euros en crédits de paiement.

De fait, ces moyens supplémentaires permettront de financer de grandes infrastructures de recherche ainsi que des engagements internationaux de la France. C'est un résultat honorable au regard des incertitudes financières et des dettes, notamment auprès de l'Agence spatiale européenne, qui ont pesé sur le budget de la recherche ces dernières années.

En revanche, ces moyens supplémentaires ne bénéficieront que très marginalement aux divers opérateurs de la recherche publique. Facialement, les dotations destinées aux interventions des organismes stagneront, voire reculeront. Seule la promesse d'une restriction de la mise en réserve leur offre de nouvelles perspectives d'investissements, mais qui restent théoriques. Quant à leurs moyens de fonctionnement, s'il est vrai qu'après plusieurs exercices marqués par des subventions souvent en recul, le projet de budget permettra enfin de couvrir les évolutions naturelles de leurs masses salariales, il ne comblera pas le manque à gagner des dernières années. De même, si l'Agence nationale de la recherche obtiendra 134 millions d'euros en crédits de paiement pour le financement de la recherche sur projet, ces renforts financiers n'offriront que peu de marges de développement.

Surtout, le système censé rembourser les opérateurs des frais de fonctionnement induits par les projets de recherche ne permet toujours pas de couvrir la réalité des frais. Au fil des ans, tous les organismes publics de recherche ont ainsi vu la part des financements de l'État s'amoindrir sensiblement sans que leurs missions ne soient adaptées – bien au contraire. Tous ont réalisé d'importantes économies sur leurs budgets de fonctionnement et les plus grands opérateurs ont réussi à trouver de nouveaux équilibres. Mais nombre d'organismes de dimension plus modeste ont, aujourd'hui, atteint leurs limites. Je pense à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail – ANSES – , à l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture – IRSTEA – , à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale – INSERM. Le projet de budget pour 2018 leur offre une pause dans la dégradation de leur situation, mais il ne les aide pas à la stabiliser.

Madame la ministre, qu'envisage le Gouvernement pour aider les opérateurs à préserver leurs capacités humaines, à mener leurs missions d'expertise et de recherche au haut niveau que l'on attend d'eux ?

J'ai souhaité, dans mon rapport, éclairer plus spécifiquement deux thématiques. Comment la recherche publique française travaille-t-elle sur les enjeux de sécurité et de sûreté alimentaires ?

Comment contribue-t-elle à l'atteinte des objectifs de mix électrique posés par la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte ? Comment contribue-t-elle notamment au développement des énergies renouvelables ? Le mix énergétique et son évolution, planifiée par la loi en termes d'objectifs et de calendrier, est l'illustration d'une politique affichée et non accompagnée au niveau qu'il faudrait.

Le résultat est écrit à l'avance. Trop peu de moyens en recherche et développement ne permettent pas de réaliser les objectifs affichés. D'ailleurs, votre collègue, le ministre d'État, l'a constaté il y a quelques jours.

Les auditions et les visites que j'ai réalisées me permettent de témoigner du volontarisme de nos organismes de recherche à s'emparer des problématiques de développement durable, et de leurs remarquables capacités à imaginer et développer des solutions efficaces pour notre futur. Mais ces capacités s'expriment dans un contexte étonnamment contrarié.

Ma première surprise fut de constater que, si nos opérateurs de recherche s'investissent plus que jamais dans les nouvelles technologies de l'énergie, la part des subventions de l'État dans ces secteurs a plutôt suivi une tendance inverse, alors qu'il s'agit d'une priorité cruciale.

J'aurai d'autres questions à vous poser, madame la ministre, mais je vous les transmettrai par écrit, ce qui vous permettra de me répondre dans les prochains jours.

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