Intervention de Jean-Louis Bricout

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 15h00
Revenu étudiant — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

La présente proposition de résolution vise à la création d'un revenu étudiant qui serait versé à toute personne inscrite à une formation d'enseignement supérieur, en fonction de sa situation propre et non de celle de sa famille, et s'élevant à un niveau suffisant pour lui permettre de subvenir à ses besoins matériels. Incontestablement, le dispositif proposé répond à un problème de plus en plus aigu au sein de la société, à savoir la précarité des étudiants et des jeunes.

L'exposé des motifs cite plusieurs faits plaidant pour un tel revenu étudiant. Oui, 20,8 % des étudiants vivent sous le seuil de pauvreté, 24 % des étudiants issus de milieux populaires déclarent avoir d'importantes difficultés financières, 30,9 % des étudiants ne reçoivent aucune aide de leur famille, 46 % des étudiants travaillent pendant l'année scolaire et, parmi ces étudiants travailleurs, 54 % estiment que leur emploi est indispensable pour vivre, alors que, selon une étude de l'INSEE, le fait d'occuper un travail régulier réduit considérablement la probabilité de réussite aux examens de fin d'année. Le constat est clair : la précarité des étudiants et des jeunes est un phénomène important qui aggrave les inégalités sociales. C'est pourquoi, pour réparer l'ascenseur social, nous devons agir pour donner les mêmes chances à chaque jeune qui débute dans la vie.

À ces questions sociales s'ajoute une fracture territoriale. Une étude menée par Chemins d'avenirs, la Fondation Jean-Jaurès et l'Institut français d'opinion publique auprès des jeunes de 17 à 23 ans sur leur choix d'orientation et leur rapport à l'avenir, suivant leur origine sociale et géographique, montre que près de la moitié d'entre eux – 48 % – estiment que leurs parents ne peuvent pas financer un logement étudiant qui ne se situe pas à proximité de chez eux. Une tendance qui s'accentue chez des jeunes ruraux : ils sont 56 % à le déclarer, contre 47 % chez ceux qui vivent en ville. C'est encore plus flagrant d'ailleurs chez les jeunes de banlieue bénéficiant d'un niveau de vie supérieur : ils ne sont que 40 %.

Jérémie Peltier, un des auteurs de l'étude, fait état d'une auto-censure psychologique chez les jeunes issus de ces territoires isolés : ils se disent que ce n'est pas pour eux, qu'ils n'en sont pas capables. Du fait de cette auto-censure, ils ont tendance à fermer les écoutilles face à ce qu'ils pourraient faire à l'avenir. Il y a aussi un aspect matériel à prendre en considération, en particulier la difficulté de se déplacer.

Afin de lutter contre ces inégalités, dont les origines peuvent être géographiques ou sociales, le groupe Socialistes et apparentés défend plusieurs propositions, dont notre plan de rebond économique, social et écologique, publié la semaine dernière. Nous demandons un revenu de base versé automatiquement à partir de l'âge de 18 ans, une prime rebond premier emploi pour toutes les entreprises qui embauchent un jeune pour un premier emploi – réponse à la crise sanitaire, alors qu'environ 700 000 jeunes seront à la recherche d'un premier emploi. Nous demandons par ailleurs une aide rebond premier emploi à destination des jeunes disposant de faibles ressources. Il s'agit de rétablir et de renforcer l'aide à la recherche d'un premier emploi, véritable coup de pouce de l'État pour chercher son premier emploi avec plus de tranquillité, instaurée sous le précédent quinquennat et supprimée en 2019 par l'actuel gouvernement.

Nous demandons la couverture de l'intégralité du coût de tous les apprentis pour 2020, quel que soit le niveau de qualification, et un renforcement de la garantie jeunes, un dispositif d'accompagnement en partenariat avec les missions locales, qui permet de sécuriser financièrement les jeunes et de lever les freins à l'insertion. Nous demandons une prolongation immédiate d'un an des bourses étudiantes à destination de ceux qui décideraient de prolonger leurs études, reportant ainsi leur entrée sur le marché du travail. Nous demandons une refondation des aides sociales.

La crise sanitaire a évidemment placé sous un nouveau jour la précarité de certains étudiants. Nous sommes d'accord avec les auteurs de la proposition de résolution : les aides sociales, basées uniquement sur les revenus des parents, ne sont plus adaptées à la réalité des conditions de vie des étudiants et les effets de seuil ainsi provoqués sont difficilement compréhensibles.

Le groupe Socialistes et apparentés défend donc des propositions ambitieuses pour lutter contre la précarité des jeunes et des étudiants, que la crise actuelle risque d'accentuer fortement. Au nom des convergences entre ces propositions et celles du groupe GDR présentées par Mme Buffet, notre groupe soutiendra ce texte.

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