Intervention de Jean-Hugues Ratenon

Séance en hémicycle du mardi 15 septembre 2020 à 15h00
Inclusion dans l'emploi par l'activité économique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Hugues Ratenon :

Aux termes de son préambule, la loi « territoire zéro chômeur longue durée » est censée assurer la protection et la sauvegarde du devoir pour chacun de travailler et du droit fondamental d'obtenir un emploi : ne l'oublions pas. Dès 2016, ce dispositif a permis à dix territoires de bénéficier d'un fonds d'expérimentation territorial contre le chômage de longue durée. Soutenu et cofinancé par les collectivités territoriales, il donne aux entreprises à but d'emploi la possibilité d'accompagner les personnes privées d'emploi qui sont volontaires. Cet accompagnement se traduit par la création d'emplois utiles à la population, et qui ne constituent pas pour autant une concurrence déloyale.

Si je me réjouissais hier des résultats positifs de la première phase d'expérimentation, qui a permis à 1 112 volontaires sur dix territoires de sortir de la privation de l'emploi, aujourd'hui je suis déçu par le manque d'ambition et de volonté d'un texte supposé renforcer cette loi. Premièrement, et c'est un comble, vous oubliez le préambule de la Constitution, pourtant cité dans l'exposé des motifs du texte lui-même. Alors que de nombreux territoires se préparent à devenir éligibles, vous refusez d'augmenter le nombre d'habilitations. En commission, madame la rapporteure, vous disiez être chagrinée par notre réalisme face au chômage de masse et à la pauvreté grandissante. Le Gouvernement hésite encore et toujours à faire voter des lois pour tous. Mon groupe et moi n'avons pas le temps pour les doutes. Nous avons le sentiment que le chômage structurel plaît au système que la macronie représente.

Il n'est pas habile d'abandonner des chômeurs dans des situations difficiles sous couvert d'expérimentation, d'autant moins lorsque l'urgence économique et sociale est aggravée par la crise sanitaire. Ce sont en effet 715 000 emplois qui ont été détruits au premier trimestre à cause de la crise. En nous soumettant un projet aussi réducteur, le Gouvernement est comme le médecin qui tire sur l'ambulance !

On ne peut pas considérer que l'objet d'un projet de loi aussi porté à exclure soit réellement l'inclusion dans l'économie. Que faites-vous des autres chômeurs abandonnés ? Si nos amendements et ceux des autres groupes sont pris en considération, alors tout problème aura une solution. Nos amendements viendront nourrir ce projet de loi de l'ambition qui lui manque. Sans ces modifications, cette loi ne s'appliquera au mieux qu'à 7 000 chômeurs, alors qu'ils sont des centaines de milliers à attendre une solution.

À l'origine, cette proposition de loi était la traduction d'une idée d'ATD Quart monde, un véritable cri d'espoir pour les plus démunis ! Mais vous n'en faites qu'à votre tête et ce sont encore une fois les exclus qui souffriront de vos décisions, au moment où les 10 % les plus riches bénéficient de 79 % du gain que représente la suppression de l'impôt sur la fortune. Et vous prétendez toujours qu'il s'agit d'une proposition de loi de renforcement et d'inclusion dans l'économie ?

En nous prononçons en faveur d'un droit opposable à l'emploi, nous voulons faire de l'État l'employeur de dernier ressort des actifs privés d'emploi. Pour cela, il est nécessaire d'étendre ce dispositif à l'ensemble du territoire ! Nous pourrons alors apprécier la capacité d'un territoire à expérimenter en fonction de son degré de maturité.

Sous un autre aspect, cette loi pourrait prendre plus d'ampleur si elle était mise au service de la bifurcation écologique. C'est une urgence vitale, vous le savez ! De grands travaux écologiquement utiles pourraient être une source de création d'emplois susceptible de briser le chômage de masse.

J'aimerais revenir sur un autre point, madame la rapporteure. Vous m'aviez donné l'assurance que vous trouveriez une formulation pour les outre-mer : vous l'avez fait et je vous en remercie. Permettre à de nouveaux acteurs de participer au financement du dispositif notamment les régions, c'est se donner à coup sûr la possibilité de réussir l'inclusion. En raison de l'importance du chômage et de la pauvreté sur ces territoires, l'outre-mer a besoin d'aménagements spécifiques. L'écart entre les outre-mer et l'Hexagone est devenu une ravine, tant la situation s'aggrave.

C'est pour cela que j'avais proposé de porter la durée d'expérimentation à huit ans pour les outre-mer. Nous devons habiliter le maximum de territoires d'outre-mer. La ville du Port a déjà déclaré sa volonté de devenir un territoire zéro chômeur longue durée, et la ville de Saint-André souhaite elle aussi en devenir un, comme maints d'autres territoires partout en France. Ne les décevez pas, madame la rapporteure, vous que je sens très volontaire. Ne les abandonnez pas par manque d'ambition.

Je souhaite que nos débats permettent de voter un maximum d'amendements afin de garantir l'accès à l'emploi à des Français qui se sentent abandonnés par la politique nationale. Donnons-nous les moyens d'un vote unanime en faveur de ce texte.

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