Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du jeudi 13 juillet 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Article 5

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Chronométrer cela tous les jours, excusez-moi, mais c'est Ubu qui rencontre Kafka !

On aurait pu se contenter de reporter l'échéance. C'est une option que nous avons envisagée lorsque nous avons rédigé l'accroche dans le projet de loi : traiter la question dans le cadre de la réforme des retraites que nous envisageons pour 2018. Mais que serait-il advenu dans l'intervalle des droits acquis par les salariés et de l'épée de Damoclès suspendue au-dessus des TPE ?

C'est pourquoi nous préférons régler le problème au fond dès aujourd'hui : en ne lâchant rien sur la justice sociale – car je pense que la mesure est juste –, mais, s'agissant des quatre critères qui pose des problèmes de déclaration – bien plus en tout cas que pour d'autres : le travail de nuit, par exemple, les entreprises le mesurent déjà –, ne plus demander aux artisans, agriculteurs ou entreprises de compter elles-mêmes le nombre d'heures d'exposition, mais concevoir un dispositif dans lequel c'est un examen médical qui permettrait d'accorder ce droit. L'avantage serait double : on préserverait la justice sociale sans créer une usine à gaz pour les petites entreprises.

En outre, le système à points, c'est bien, mais cela prend beaucoup de temps : il faut quinze à vingt ans pour que l'on puisse en bénéficier ; avec l'examen médical, certaines personnes pourront bénéficier d'une retraite à taux plein deux ans plus tôt dès 2018 – on estime leur nombre à environ 10 000.

Le dispositif que nous envisageons – nous allons le soumettre la semaine prochaine à l'avis du Conseil d'orientation des conditions de travail, comme c'est la règle – devrait permettre de régler le problème en distinguant dans l'ordonnance le droit des salariés, qui devra demeurer entier, et la charge de la déclaration, qui ne devra plus être impraticable pour les PME.

S'agissant de la prévention, je confirme donc que le compte personnel de prévention de la pénibilité est maintenu. D'autre part, vous n'aurez pas manqué de noter que, dans le cadre du renforcement du rôle des branches, nous avons prévu la prévention de la pénibilité et qu'elle sera aussi permise par les accords d'entreprise. Je pense qu'il importe de continuer dans cette voie car c'est la meilleure des réponses. Il reste que pour un certain nombre de personnes, la prévention ne suffit malheureusement plus puisqu' elles souffrent déjà d'une incapacité. Il faut donc pouvoir traiter la question du départ à la retraite.

En ce qui concerne les maladies professionnelles comme celles dues à l'amiante, que vous avez rappelées, il s'agit d'un sujet grave et d'un problème réel. Un plan d'action est prévu. Comme il ne relève pas du même champ législatif, je ne le présenterai pas dans le détail dès maintenant, à moins que vous ne souhaitiez que je précise certaines dispositions du texte.

Voilà quelles sont nos intentions. Nous soumettrons ce dispositif au Conseil d'orientation des conditions de travail la semaine prochaine. Nous avons entendu les inquiétudes légitimes des dirigeants de TPE, angoissés par la crainte d'être en faute. D'ailleurs certains salariés, qui reconnaissaient que leur entreprise n'allait rien déclarer parce qu'elle ne savait pas comment faire, n'auraient pas pu bénéficier de ce droit. Ces entreprises auraient été en faute simplement parce qu'elles étaient incapables de remplir leur déclaration ! Dans le même temps, nous ne cédons en rien sur l'élément de justice sociale, parce que nous pensons que c'est une bonne chose. C'est pourquoi j'estime que notre projet, à la fois juste et efficace, est équilibré, et j'espère que vous le soutiendrez.

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