Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du jeudi 17 décembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Parvenus au bout du marathon budgétaire, que retenir de nos débats depuis trois mois ? Fidèle à elle-même, la majorité a refusé quasi systématiquement d'entendre les propositions des groupes minoritaires. Pourtant, dans son discours de politique générale, le Premier ministre déclarait : « Notre pays doit être uni pour affronter les temps difficiles qu'il traverse. » Et il ajoutait : « Je tends la main aux représentants de la nation, aux partenaires sociaux, aux forces vives, aux territoires et à tous nos concitoyens. » Que reste-t-il aujourd'hui de cette main tendue ? La réponse est dans le texte, qui ne retient quasiment que les apports du Gouvernement et de la majorité.

Nous étions pourtant d'accord : un plan de relance face à l'ampleur de la crise était indispensable. Nous regrettons même qu'il n'ait pas été présenté plus tôt et que les 100 milliards d'euros annoncés initialement ne soient en réalité que 22 milliards, même si nous reconnaissons que des rallonges ont été apportées au dispositif pendant la navette. Le Sénat a fait preuve d'une opposition constructive en y ajoutant des mesures complémentaires. Pourquoi retirer la bonification du crédit d'impôt sur le spectacle vivant alors que le monde culturel en a besoin ? Pourquoi renoncer à une contribution exceptionnelle des grandes entreprises de la vente à distance qui sont les gagnantes de cette crise ? Pourquoi refuser de quantifier l'activité sur le territoire des géants du numérique pour davantage de justice sociale ? Sur le plan écologique, pourquoi renoncer à un prêt à taux zéro pour faciliter l'achat de véhicules propres ?

Notre groupe s'était lui aussi engagé dans un dialogue constructif en proposant notamment l'ouverture du RSA aux jeunes de 18 à 25 ans qui, nous le voyons, sont particulièrement touchés par la crise actuelle. La commission d'enquête de nos collègues Sandrine Mörch et Marie-George Buffet, dont le rapport a été publié hier, montre que la pauvreté augmente, tout comme la précarité, les incertitudes avec des perspectives d'entrer sur le marché du travail qui s'éloignent. Finalement, le plan de relance pèche par son volet social insuffisant alors qu'il devrait être une priorité.

Après la fin de l'APL – aide personnalisée au logement – accession ou les restrictions sur le prêt à taux zéro, après la création de l'impôt sur la fortune immobilière, l'IFI, vous coupez cette fois dans le budget du logement social. En ponctionnant plus d'un milliard d'euros dans les caisses d'Action Logement, une fois de plus vous faites craindre un ralentissement de la construction et de la rénovation du parc social.

Je reconnais bien volontiers des avancées sur le volet écologique, même si ce budget n'est pas le pas de géant annoncé. Pour autant, notre groupe souhaite rappeler le rôle central des collectivités dans ce défi. Elles sont au coeur de la politique de la transition écologique par leurs investissements, par la mobilité dans la gestion des déchets.

Ce budget manque de recul sur des capacités d'impulsion. En effet, si la diminution des impôts de production va dans le bon sens, le choix fait par le Gouvernement pour compenser les collectivités territoriales affecte leur autonomie fiscale. Il est pourtant impératif de préserver leurs ressources et leur liberté de taux pour maintenir l'action locale de soutien aux entreprises, aux commerces de proximité, aux artisans et aux services à la population. Le Gouvernement semble écarter cette voie, celle de la responsabilité, de la lisibilité et finalement de la confiance entre les citoyens et leurs élus locaux.

Enfin, j'appelle à la vigilance sur la soutenabilité de la dette publique. En 2021, elle atteindra près de 123 % du PIB – 300 milliards de ressources, 450 milliards de dépenses. Si les dépenses de relance sont nécessaires, nous devons aux Français de veiller à ne pas sacrifier les générations futures, en leur faisant porter le poids de cette dette.

Depuis la présentation du plan de relance, nous vous interrogeons sur son financement. Mais après trois mois de discussions, nous n'avons aucune réponse. Pourquoi refusez-vous de faire participer davantage les plus fortunés à l'effort de solidarité nationale ? Nous sommes tous convaincus qu'il faut lutter contre l'aggravation des inégalités sociales et que cela passe par un changement d'approche. Il est aujourd'hui nécessaire de changer de cap.

En conclusion, ce budget peut se résumer à une absence d'écoute et de dialogue.

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