Intervention de Elsa Faucillon

Séance en hémicycle du jeudi 14 janvier 2021 à 15h00
Politique du logement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElsa Faucillon :

Faut-il vous rappeler que sans cette jambe publique, à savoir le secteur du logement social, l'appel de l'abbé Pierre en 1954 n'aurait pas obtenu une réponse nationale d'une telle ampleur ?

Madame la ministre déléguée, mesdames et messieurs les parlementaires de la majorité, ce cap est mortifère. Tous les acteurs du logement vous le disent : nous sommes devant une bombe à retardement qu'il faut vite désamorcer si vous visez, comme nous, l'objectif de loger dignement nos concitoyens.

J'ajoute que cette crise du logement accentue la ségrégation sociale. Dans le 92, le département des Hauts-de-Seine, on sait ce que sont les ghettos de riches. Vous dénoncez le séparatisme ? Il est là, c'est un séparatisme social.

Je pourrais énumérer encore longtemps les mauvais chiffres de votre politique et les drames humains qui en découlent. Vous refusez d'écouter les acteurs du logement et d'entendre leurs nombreuses et intéressantes propositions qui permettraient d'enrayer la machine et de remettre l'intérêt général au coeur de votre politique du logement.

Avec son habituelle humilité, le Président de la République nous a invités à nous réinventer. Les députés du groupe GDR, toujours prêts à le faire, vous font donc des propositions.

Commencez par rétablir un ministère du logement de plein droit, disposant de son propre budget. Le logement devrait être une grande cause nationale.

Revenez sur vos mesures aux effets récessifs, notamment en suspendant la réduction de loyer de solidarité pour les bailleurs HLM : nous avons désormais le recul nécessaire pour évaluer à quel point cette mesure affecte durement les capacités d'investissement des organismes de logements sociaux.

Mettez fin aux mécanismes de défiscalisation qui n'ont d'autre effet que de favoriser la multipropriété, et rétablissez l'APL accession pour aider à la primo-accession.

Revenez aussi sur les mesures les plus destructrices de la loi ELAN : les accrocs à la loi pour la solidarité et le renouvellement urbain – SRU – , dont nous venons de célébrer les vingt ans ; la vente forcée de HLM ; la précarisation des baux.

Sortez du champ d'application de la réforme des APL, entrée en vigueur ce 1er janvier, les bénéficiaires qui en subissent des effets négatifs, à commencer par les jeunes actifs.

Amplifiez le plan « logement d'abord » et encouragez les maires bâtisseurs. À Gennevilliers, dans ma circonscription des Hauts-de-Seine, votre politique a eu pour effet de faire passer les délais d'attente pour un logement de quatre à six ans, en moyenne.

Inspirez-vous de notre proposition de loi visant à éradiquer l'habitat insalubre. Celle-ci prévoit un plan d'éradication en dix ans, financée grâce au rétablissement d'une taxe minime sur les loyers.

Il s'agit là d'un sujet majeur et d'une urgence absolue car, à bien des égards, des vies sont en jeu. Dans la circonscription de mon collègue Stéphane Peu, à Saint-Denis, pas moins de vingt-cinq personnes sont mortes en douze ans en raison d'incendies ou d'effondrements d'immeubles, sans compter les centaines d'enfants et d'adultes qui souffrent de problèmes de santé – saturnisme, maladies respiratoires ou de peau, troubles du comportement alimentaire – liés à leurs conditions de vie.

Le droit au logement n'est ni un slogan ni une marchandise, il s'agit d'un droit fondamental et d'un bien de première nécessité. Il y a quelques années, à une époque finalement pas si lointaine, le Président de la République, alors candidat, parlait de révolution. Franchement, nous ne vous en demandons pas tant ! Cependant, alors que notre pays compte 300 000 personnes sans domicile et qu'il traverse une crise dont nous mesurons encore mal l'onde de choc – certains parlent d'une bombe à retardement – , nous vous demandons d'au moins réinterroger votre politique du logement et même, à bien des égards, de la réinventer.

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