Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du mercredi 27 janvier 2021 à 21h00
Réforme du courtage — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Encadrer et surveiller l'activité des courtiers en assurance, tout le monde peut s'accorder sur cet objectif louable. C'est moins le cas lorsqu'il s'agit de définir une méthode pour l'atteindre. Le sujet avait d'ailleurs été abordé lors de l'examen du projet de loi PACTE, il y a deux ans. Nous nous souvenons également que ce projet de réforme fut retoqué par le Conseil constitutionnel, puisqu'il avait été ajouté par voie d'amendement.

Il revient sous la forme d'une proposition de loi mais autant dire qu'il s'apparente à un projet de loi déguisé allant jusqu'à oublier le gage. Pas de gage, donc, pas d'étude d'impact non plus, laquelle aurait pourtant été bien utile pour éclairer l'Assemblée sur un sujet tout de même très technique. Aussi cette proposition de loi prévoit-elle, suivant la logique existante pour les conseillers en investissements financiers, la création d'associations professionnelles auxquelles l'adhésion sera obligatoire et contrôlée par l'ACPR.

Le groupe Libertés et territoires salue cette démarche qui doit permettre d'aider les acteurs du courtage de l'assurance à décrypter les textes, à se former pour accroître leurs compétences et à respecter les droits des consommateurs. Il s'agit ainsi de responsabiliser davantage la profession. Cela constitue une nécessité, car les activités de courtage d'assurance, à la fois nombreuses et diverses, se sont développées ces dernières années, nombre de courtiers cumulant leur statut avec d'autres activités réglementées : ces structures sont encore difficilement contrôlables.

En effet, les courtiers ne sont pas soumis au contrôle permanent de l'ACPR. D'ailleurs, dans son dernier rapport, cette dernière relevait certains dysfonctionnements en matière de conformité réglementaire, notamment sur la commercialisation de contrats de complémentaire santé ou de médiation. Forts de ce constat, nous voyons bien la nécessité d'une régulation du secteur.

Certaines lacunes du texte initial ont été comblées en commission des finances. Aussi nous réjouissons-nous de plusieurs apports comme l'obligation pour les associations professionnelles représentatives de motiver leur décision en cas de refus d'inscription d'un courtier, qui aura par ailleurs la possibilité de contester cette décision. Il s'agit d'une mesure de bon sens et de transparence.

Cependant, si nous partageons l'objectif poursuivi, nous nous interrogeons sur les modalités d'application de la réforme, qui doivent être précisées par décrets en Conseil d'État. Nous ne comprenons pas très bien le fonctionnement du dispositif et nous allons voter presque à l'aveugle.

Par ailleurs, nous nous interrogeons sur l'articulation du texte avec le droit européen. En effet, une directive de 2016 prévoit que les courtiers peuvent fonder des associations de cadrage. Reste que les activités de contrôle doivent être réservées à l'autorité publique.

En commission, Mme la rapporteure nous a indiqué que les associations n'auraient pas de mission de contrôle et que la relation entre le courtier adhérent et l'association ne serait que déclarative. Dès lors, leur pouvoir restera très limité. Nous aurions pu suivre la voie proposée par le président de la commission des finances, à savoir confier à l'ORIAS une tâche supplémentaire de vérification approfondie au moment de l'inscription des professionnels, car elle présente le mérite de limiter la complexité du processus.

Enfin, quid de l'amendement de Mme la rapporteure concernant les pratiques de démarchage téléphonique ? Cette pratique, dénoncée par des associations de protection des consommateurs, touche particulièrement les personnes fragiles. Elle a même progressé depuis le confinement et nous sommes favorables à la proposition de la rapporteure. Mais si nous soutenons un encadrement plus strict de ces pratiques, nous nous interrogeons sur les voies qui ont permis de l'introduire dans cette proposition de loi. Pour voir nos amendements régulièrement frappés d'irrecevabilité au titre de l'article 45 de la Constitution, nous nous demandons si l'examen de leur lien avec le texte initial ne s'exerce pas à géométrie variable.

Pour conclure, au regard des différentes remarques que nous venons de faire, le groupe Libertés et territoires s'abstiendra.

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