Intervention de Olivier Falorni

Séance en hémicycle du lundi 1er février 2021 à 16h00
Respect des principes de la république — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Falorni :

Cela conduirait, à terme, à l'instauration d'une pratique concordataire contraire au principe de laïcité. Il est d'ailleurs regrettable que le texte n'aborde pas la nécessaire extension de la loi de 1905 à la totalité du territoire métropolitain et ultramarin. Certains des amendements que nous avons déposés y pourvoiront. Le concordat d'Alsace-Moselle, qui maintient le financement public des cultes avec l'argent de tous les contribuables français et oblige les familles athées à demander une dérogation pour dispenser leurs enfants de cours de religion, est d'un autre temps et trace une frontière dans le principe d'unité et d'indivisibilité de la République.

Dès lors qu'on traite des principes républicains, la question de l'éducation est évidemment fondamentale. L'article 21 du projet de loi vise à rendre la scolarisation obligatoire de 3 à 16 ans et, de ce fait, à n'autoriser l'instruction en famille – IEF – qu'à titre dérogatoire. Je sais que ce sujet est particulièrement sensible pour certaines familles, qui voient dans l'instruction à domicile une manière de dispenser un enseignement diversifié, complémentaire ou adapté à un projet éducatif choisi. Cette liberté doit être maintenue, mais davantage encadrée. Il est d'ailleurs anormal que le régime d'autorisation qui s'appliquera à l'instruction en famille ne s'étende pas aux établissements privés hors contrat, dans lesquels les risques de prosélytisme séparatiste sont au moins aussi forts que pour l'IEF. Ce sera l'objet d'un de nos amendements.

Pour ma part, je crois plus que tout en l'école, car j'ai la conviction qu'elle est bénéfique pour les enfants, sur le plan pédagogique, mais aussi sur les plans social et humain. Elle est un lieu de construction, de sociabilisation et de confrontation des idées. Bien sûr, l'école n'est pas parfaite – nous pouvons l'améliorer, en premier lieu en lui donnant davantage de moyens – , mais elle constitue le lieu d'émancipation de l'esprit et d'émancipation sociale par excellence, dans la droite ligne des lois sur l'école de Jules Ferry, qui ont d'ailleurs préfiguré celle de 1905. Sans l'école et l'éducation qu'elle dispense, la transmission des valeurs de la République ne peut être assurée. Nous devons faire davantage pour qu'elle continue d'assurer ce rôle. Je milite depuis longtemps en faveur d'un enseignement plus approfondi de la laïcité à l'école, à toutes les étapes du parcours scolaire.

Mais il faut aussi soutenir et protéger les enseignants. Nous avons tous le souvenir encore douloureux de l'assassinat ignoble de Samuel Paty. Or, pendant des années, l'éducation nationale a failli dans son devoir de protection. La doctrine, plus ou moins affichée mais bien réelle, du « pas de vague » a été délétère. Elle a même été – je pèse mes mots – criminelle à l'égard de l'école républicaine et de ses hussards. Je salue à ce titre l'adoption, en commission spéciale, d'un nouvel article créant le délit d'entrave à l'exercice de la fonction d'enseignant.

Mes chers collègues, n'oublions jamais que le respect des principes républicains passe également par l'adhésion à ceux-ci, notamment pour une partie de la jeunesse, en perte de repères, à qui nous n'avons pas su parler clairement. Le combat pour la laïcité nécessite certes de l'autorité, mais aussi de la conviction et de la pédagogie, pour donner un sens, un horizon et une espérance. Il exige aussi de traduire dans les faits la promesse républicaine : il ne peut y avoir de République laïque forte sans une République sociale, juste et efficace. C'est la grande lacune de votre texte. Vous m'opposerez que là n'est pas son objet. Nous devons pourtant absolument mener, en France, le combat pour l'égalité des chances et contre les ségrégations sociales et territoriales.

Georges Clemenceau disait : « Il faut savoir ce que l'on veut. Quand on le sait, il faut avoir le courage de le dire ; quand on le dit, il faut avoir le courage de le faire. »

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