Intervention de Danièle Obono

Réunion du mercredi 15 novembre 2017 à 10h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

L'ordonnance que nous examinons pose deux difficultés au groupe La France insoumise.

La première tient à la philosophie qui préside à la conception même du quartier de La Défense, car nous nous interrogeons sur l'intérêt qu'il peut présenter pour la France. La documentation annexée au projet de loi comme les échanges au Sénat montrent que La Défense est un quartier d'affaires où de grandes multinationales agissant dans de nombreux secteurs d'activité se côtoient en un mélange des genres loin d'être heureux.

Le rapporteur du Sénat, M. Mathieu Darnaud, le reconnaît sans ambages : cette ordonnance a pour objet d'attirer encore plus d'entreprises financières qui envisagent de quitter la City londonienne à cause du Brexit afin de poursuivre leurs oeuvres en Europe continentale. Ses propos sont éloquents : « le Brexit est une chance pour notre économie et constituerait une opportunité historique pour le quartier de La Défense. […] Ces entités auront besoin de volumes de bureaux très importants, dans un environnement favorable aux services, desservi par les infrastructures nécessaires et où elles retrouveront un écosystème familier, à proximité de leurs interlocuteurs. »

Or, La France insoumise est opposée à cette logique de financiarisation toujours plus poussée de l'économie. Nous proposons une autre voie car nous considérons que ce quartier, tel qu'il est conçu et tel qu'on envisage de le développer, n'a pas d'autre but que de servir les intérêts des grands groupes et des puissances financières.

Seconde difficulté à nos yeux : cette ordonnance, ainsi que les ajouts du Sénat, consacrent le démantèlement de l'État. Ainsi, la totalité de la réalisation du projet est-elle confiée aux collectivités territoriales, notamment au département des Hauts-de-Seine qui serait majoritaire au sein du conseil d'administration de l'établissement public, où l'État ne serait plus représenté que par le préfet de région.

Au nom d'une idéologie libérale de mise en concurrence des territoires, le rôle de l'État aménageur et stratège est ainsi nié. C'est d'ailleurs dans ce sens que vont nombre des amendements adoptés par le Sénat, qu'il s'agisse du contrôle exercé par le préfet de régionmentionné à l'article 5 de l'ordonnance ou du transfert sans aucune contrepartie de la propriété des parkings de l'État vers l'établissement public que vous souhaitez créer.

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à soulever ces objections : la Cour de comptes elle-même, Le Monde s'en est fait l'écho, évoque une opération précipitée, assise sur des bases juridiques incertaines et fragiles, réalisée aux dépens des intérêts de l'État.

C'est pour ces raisons que nous sommes opposés à la constitution de ce pôle territorial de La Défense, car nous considérons que le secteur financier et les multinationales se trouveraient alors au coeur du projet économique de la Nation. Cela marquerait une rupture de la cohésion nationale puisque des collectivités territoriales s'approprieraient des compétences de l'État en tant que stratège chargé de l'aménagement du territoire agissant au nom de l'intérêt général.

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