Intervention de Mathilde Panot

Séance en hémicycle du mardi 23 mars 2021 à 15h00
Politique du gouvernement en faveur des associations

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot, FI :

Nous voici réunis pour discuter, à la demande du groupe La République en marche, de la politique du Gouvernement en faveur des associations. On appelle ça communément tendre le bâton pour se faire battre ! J'ai deux hypothèses : soit vous vous êtes trompés en donnant un titre à ce débat, soit il s'agit tout simplement d'une plaisanterie. Mais qu'importe, parlons-en.

Pour commencer, dès 2017 vous annonciez la suppression de 250 000 emplois aidés, soit trois quarts du total. Sur les trois dernières années, le préjudice pour les associations s'élève à 1,3 milliard d'euros. À cause de vous, des emplois dans des crèches associatives ont été détruits, des clubs sportifs ont fermé, tout comme des centres de loisirs ou des refuges pour animaux. Pour calmer la révolte du monde associatif, vous annonciez en 2017 une grande concertation qui avait donné lieu à la remise du rapport « Pour une politique de vie associative ambitieuse et le développement d'une société de l'engagement », dont vous n'avez finalement retenu que douze mesures sur cinquante-neuf.

Le plus amusant est que vous n'avez que ce mot à la bouche : l'engagement. Engagement par-ci, engagement par-là alors que, depuis dix ans, les subventions des associations baissent de 1,7 % par an sans que ça ne vous émeuve le moins du monde. Les associations dénoncent une marchandisation de l'action sociale, une montée en puissance des appels à projets, des financements privés, du mécénat, mais guidés par votre idéologie start-up nation, ça n'a pas l'air de vous gêner.

Engagement par-ci, engagement par-là, alors que les associations sont contraintes, pour survivre, d'être de simples exécutantes de la commande publique sans jamais participer à la construction des politiques publiques. Dans votre arrogance, vous ne les écoutez de toute façon jamais. Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique en est un exemple frappant : vous ignorez méthodiquement les propositions que font les associations pour faire face à l'urgence écologique et climatique, et quand vous ne les ignorez pas, vous les moquez. C'est visiblement le passe-temps favori du ministre des transports qui préfère railler les associations écologistes sur Twitter plutôt que de se soucier de l'empreinte carbone du secteur aérien.

Vous parlez d'engagement, mais vous n'hésitez pas à le réprimer. Un rapport de l'Observatoire des libertés associatives, que je vous conseille de lire, documente cent cas d'entrave aux activités des associations. À Bure, les militants antinucléaires subissent une répression policière et judiciaire sans précédent. À Calais, ceux qui distribuent des repas aux migrants sont verbalisés. Et Gaspard, 19 ans, militant écologiste, est en procès pour le crime de lèse-majesté que constitue le décrochage d'un portrait du Président ! Or s'il l'a fait, c'est pour dénoncer votre inaction en matière de changement climatique, inaction pour laquelle l'État a justement été condamné.

Vous dites ainsi à Gaspard et à tous les autres : « Engagez-vous, mais pas trop, en tout cas sans trop de conviction… Et puis si possible sans adopter une autre vision du monde que celle que l'on vous offre, sans quoi vous risquez de finir au tribunal – ou alors, allez donc manifester en Pologne ! »

Et ce n'est pas fini, car le projet de loi « séparatisme » jette la suspicion sur l'ensemble du monde associatif. Avec le contrat d'engagement républicain, les associations sont priées de montrer patte blanche, ou plutôt de prêter allégeance à la Macronie, sous peine de disparaître, d'être dissoutes ou d'étouffer financièrement. Tout cela dépendra, bien sûr, de votre bon vouloir, vous qui êtes capables de fabriquer un syndicat étudiant à votre gloire et d'appeler à la dissolution d'un autre qui vous déplaît. Avec cette loi, vous vous octroyez le pouvoir de désigner qui est républicain et qui ne l'est pas.

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