Intervention de Constance Le Grip

Séance en hémicycle du jeudi 25 mars 2021 à 9h00
Musées d'orsay et de l'orangerie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaConstance Le Grip :

C'est avec une certaine émotion que je m'exprime devant vous, à la faveur de l'examen de la proposition de résolution du groupe UDI-I relative à l'ajout du nom du président Valéry Giscard d'Estaing à celui du musée d'Orsay. Une certaine émotion – pardonnez-moi cette digression personnelle – , parce que le président Giscard d'Estaing fut celui pour lequel je m'engageai en politique, à la toute fin des années 1970. J'ai eu l'honneur et la chance de le rencontrer, d'appartenir à la famille politique qu'il présida et qu'il inspira longtemps. Sa vision, ses idées, ses projets pour la France et pour l'Europe, ses leçons d'histoire, constituent toujours pour moi un legs inestimable. Je salue la présence de Louis Giscard d'Estaing dans les tribunes réservées au public.

Parmi les passions qui animèrent Valéry Giscard d'Estaing, il n'y eut pas seulement la politique, la volonté de réformer la société française et d'oeuvrer pour la construction européenne, de faire de la France une puissance moderne ; il y eut aussi, et peut-être même surtout, la culture, l'art, la littérature et le patrimoine. Valéry Giscard d'Estaing a su très tôt, très jeune, que la France était grande ; grande par le rayonnement de sa culture, de son patrimoine, de ses créations artistiques. Ministre des finances du général de Gaulle, il oeuvra fort efficacement, avec le ministre de la culture André Malraux, à la conception et à l'application du dispositif fiscal permettant le paiement des droits de succession sur les grandes collections d'oeuvres d'art par dation d'oeuvres. C'est ainsi que vit le jour la dation Picasso, après la mort de l'artiste, que put rester en France la collection Picasso et que naquit le musée Picasso à Paris, en l'hôtel Salé.

D'autres fortes réalisations culturelles portent la marque du président Valéry Giscard d'Estaing : le musée de la Renaissance à Écouen, l'acte de fondation du futur Institut du monde arabe, la réhabilitation du quartier parisien de la Villette, avec le parc et la Cité des sciences et de l'industrie. Mais c'est avec le projet du musée d'Orsay que s'épanouit vraiment sa passion pour l'art et le patrimoine, à travers la vision et l'amour qu'il avait du XIXe siècle, le siècle où, selon ses propres termes, en Europe et dans le monde entier, le rayonnement et l'influence de la France furent prépondérants.

Pour le président Valéry Giscard d'Estaing, le XIXe siècle est pour la France une période de l'histoire de l'art et de la civilisation d'une richesse exceptionnelle. Homme de grande culture, le successeur du général de Gaulle et du président Pompidou avait compris qu'il fallait au XIXe siècle un musée. Ce sera le musée d'Orsay, qui assurera le lien et la continuité dans la politique d'organisation des musées nationaux, et permettra que s'exprime, dans la prolongation du musée du Louvre et avec le relogement des impressionnistes hébergés au Jeu de paume, toute la richesse et la diversité des courants artistiques qui traversent alors l'Europe et la France, depuis le romantisme jusqu'à l'Art nouveau, en passant par le post-impressionnisme et le symbolisme. Le musée présente tous les arts : la photographie naissante, l'architecture – de celle d'Eugène Viollet-le-Duc à celle de l'ingénieur Gustave Eiffel – , mais aussi les arts graphiques, les arts décoratifs, la sculpture, la musique et la littérature. Le président Giscard d'Estaing avait une vision globale de la culture et de l'harmonie entre les arts ; nul endroit mieux que le musée d'Orsay ne rend hommage à cette vision.

Le président Giscard d'Estaing s'est personnellement et particulièrement impliqué dans la conception et la réalisation du musée d'Orsay ; cela a été excellemment rappelé par notre collègue Yannick Favennec-Bécot, à l'origine de la proposition de résolution que j'ai eu le plaisir de cosigner. Une interview du président Giscard d'Estaing, donnée en février 1980 au magazine Connaissance des arts, décrit fort bien les raisons qui ont conduit le chef de l'État à cette prestigieuse réalisation culturelle, les objectifs poursuivis et la volonté de sauver de la destruction l'ancienne gare d'Orsay pour la transformer en musée, en un geste patrimonial, architectural et culturel majeur, alliant patrimoine, création, transmission et audace. Le président Giscard d'Estaing a porté ce rêve de musée pendant dix ans, depuis le moment où, ministre des finances, il occupait des bureaux rue de Rivoli, dans le palais du Louvre. Il a souvent exprimé le souhait que le musée du XIXe siècle fût un beau musée ; je pense que ce souhait est exaucé. Cela a été dit, la très forte affluence que connaît le musée d'Orsay – enfin, qu'il connaissait avant la pandémie – en atteste.

On connaît le geste de grande élégance du président Mitterrand, qui prit personnellement la plume pour inviter Valéry Giscard d'Estaing à l'inauguration du musée d'Orsay le 1er décembre 1986, évoquant son vif désir de sa présence ce jour. Je ne doute pas qu'à ce geste de grande élégance présidentielle en succéderont d'autres ; je les souhaite. Quoi qu'il en soit, le groupe Les Républicains, dont je suis heureuse de porter les couleurs, approuve avec sincérité et enthousiasme l'ajout du nom du président Giscard d'Estaing à celui du musée d'Orsay et votera donc en faveur de la proposition de résolution du groupe UDI-I. Vive le musée d'Orsay - Valéry Giscard d'Estaing !

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