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Ugo Bernalicis
Question N° 23712 au Ministère de la justice


Question soumise le 15 octobre 2019

M. Ugo Bernalicis alerte Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation de la maison d'arrêt de Rouen dans le cadre du grave accident industriel de l'usine Lubrizol. Le spectaculaire incendie du 26 septembre 2019 dans l'usine Lubrizol de Rouen, classée Seveso, est un grave accident industriel qui a touché de nombreuses personnes sur toutes la région, de la fumée de l'incendie, des pluies d'hydrocarbures à l'odeur pestilentielle qui perdure encore. M. le député craint des conséquences sanitaires et environnementales importantes pour toutes les populations proches de la région de Rouen et au-delà. Au même titre que de nombreux groupes parlementaires, le groupe de la France insoumise a dénoncé la gestion de crise par le Gouvernement, manifestement pas à la hauteur du danger et des conséquences de cet accident industriel. Il souhaite en particulier attirer l'attention de Mme la garde des sceaux sur la situation de la maison d'arrêt de Rouen, qui se situe à proximité directe du site de l'usine. Ainsi d'une part, il souhaite connaître les mesures prises par la direction pour garantir la protection des personnes détenues. M. le député attire particulièrement l'attention de Mme la garde des sceaux sur la situation de ces personnes. En effet, les conséquences sur la population pénale ne sont pas anodines du fait même de l'aggravation de facto de leur condition de privation de liberté et en ce sens l'administration à une obligation de garantir la sécurité des personnes prises en charge. La maison d'arrêt de Rouen, comme beaucoup de bâtiments à proximité du site de Lubrizol, a été touchée par les conséquences de l'incendie (pollution, suie). Dès lors, il souhaite connaître quelle a été la réaction de l'administration : l'évacuation a-t-elle été envisagée et sinon pourquoi ? Des mesures de nettoyage du bâtiment, des cours de promenades ont-elles été effectuées, sinon pourquoi ? M. le député attire également l'attention sur la qualité de l'air intérieur de la prison qui, déjà touchée par la promiscuité, a très certainement été dégradée. Quelle information a été produite à leur égard concernant ce qu'il s'est passé et les conséquences potentielles ? Cet incident a nécessairement renforcé le climat anxiogène de la détention, et une attention particulière doit avoir été portée. D'un point de vue sanitaire, des extractions médicales ont-elles été demandées suite à l'incident ? Les personnes détenues ont-elles été destinataires de mesures particulières : des bouteilles d'eau, des masques ? De la même façon ces questions se posent pour les personnels pénitentiaires et les personnels médicaux de l'établissement pénitentiaire. Il souhaite ainsi savoir si les personnels ont exercé leur droit de retrait et s'ils ont bénéficié d'une information particulière quant aux risques encourus. Plus largement, il souhaite savoir quelle est la procédure dans ce type de situation (des évacuations d'établissements pénitentiaires lors d'inondation ont déjà été effectuées). Enfin, il souhaite savoir si le ministère de la justice envisage de réaliser une enquête épidémiologique spécifique à l'établissement pénitentiaire de Rouen et si un suivi médical renforcé est mis en place.

Réponse émise le 2 février 2021

La maison d'arrêt de Rouen et l'administration pénitentiaire ont pris la mesure de la gravité de l'accident industriel de l'usine Lubrizol de Rouen dès la survenue de cet évènement. Afin d'apporter une réponse rapide et adaptée aux répercussions de l'incendie dans l'établissement et particulièrement sur la santé des personnes détenues et des personnels y travaillant, la direction de la maison d'arrêt s'est immédiatement adressée aux interlocuteurs compétents afin de recueillir les informations nécessaires et les indications relatives à la marche à suivre. La consultation des informations relayées sur les plateformes officielles et notamment celle de la préfecture de Seine-Maritime a permis d'établir que l'eau destinée à la consommation humaine avait fait l'objet de plusieurs contrôles diligentés par l'Agence régionale de santé (ARS) dès le 26 septembre 2019. Selon la préfecture, "les résultats obtenus confirment l'absence ou la présence en concentrations très faibles et bien inférieures aux valeurs sanitaires de référence, des produits recherchés." Il a ainsi été établi que l'eau du robinet était propre à la consommation, y compris dans les secteurs directement concernés par le panache de fumée. Si, par mesure de précaution, une distribution générale d'eau a été effectuée lors de la journée du 26 septembre 2019 dans les différentes divisions de l'établissement, les résultats publiés par la préfecture ont permis d'écarter tout risque sanitaire découlant de la consommation d'eau du robinet. S'agissant de la qualité de l'air à la suite de l'incident, des odeurs persistantes ont pu occasionner une gêne significative le soir de l'incendie. Par mesure de précaution, les promenades sur les cours ont été supprimées durant la matinée du 26 septembre 2019 et les activités sportives en extérieur ont été annulées pour l'ensemble de la journée. Toutefois, s'agissant spécifiquement de la qualité de l'air, les 26 mesures effectuées dans toute la ville par le service départemental d'incendie et de secours dès 4 heures du matin n'ont pas fait apparaître de toxicité en dépit des odeurs ressenties. De plus, l'association en charge de la surveillance de la qualité de l'air ATMO Normandie a effectué, en parallèle du service départemental d'incendie et de secours, diverses mesures de qualité de l'air, notamment via un tube passif situé à proximité de la maison d'arrêt (rue de la Motte au Petit Quevilly). Les résultats ont montré que les composants de l'air suivi présentaient des concentrations en deçà des seuils fixés, à tout le moins comparables aux valeurs habituellement mesurées dans l'agglomération rouennaise. Aussi, les activités sportives en extérieur ont pu être de nouveau organisées dès le 27 septembre 2019, à la condition qu'aucun dépôt de suie ne soit observé sur la pelouse ou le terrain, ce qui n'a jamais été le cas au terme des vérifications régulières du personnel. Il a également été décidé de reprendre les promenades l'après-midi du 26 septembre 2019, compte tenu de la suppression de l'ensemble des autres activités au sein de la maison d'arrêt ce jour-là, de nombreux intervenants étant empêchés. Cette conciliation entre les droits des détenus, les difficultés d'organisation liées à cet évènement extérieur et les précautions d'ordre sanitaire a permis d'éviter, grâce à une communication renforcée avec la population pénale, des tensions supplémentaires. Par ailleurs, des campagnes d'analyse des dépôts de suie ont été réalisées dans la ville de Rouen et du Petit-Quevilly les 26 et 28 septembre 2019. Selon la préfecture, "les résultats ne mettent pas en évidence de présence significative de dioxines".  Les préconisations générales relayées par la préfecture de Seine-Maritime ont été prises en compte par la direction de l'établissement pénitentiaire, qui n'a pas été destinataire d'instructions particulières ou de recommandations spécifiques. Rappelons enfin que, si l'ensemble de la ville et des environs a été concerné, le site de l'établissement pénitentiaire n'a pas été particulièrement exposé. Les conditions sanitaires et sécuritaires de l'établissement ont été maintenues à leur niveau habituel, et même renforcées lors de la première journée de catastrophe par un détachement de l'équipe régionale d'intervention et de sécurité (ERIS) de Rennes. Dans ces conditions, au regard de tout ce qui précède, l'évacuation de la maison d'arrêt n'a pas été envisagée le 26 septembre 2019 par les services de l'administration pénitentiaire. L'établissement ayant retrouvé son fonctionnement habituel au bout de 48 heures, une évacuation ultérieure n'a pas paru davantage nécessaire. Les personnels pénitentiaires n'ont pas exercé de droit de retrait au cours de cet évènement. Tous ont témoigné de leur sens du service public en répondant à la nécessité de poursuivre les missions essentielles de la Justice. Seuls quelques agents ont été contraints de s'absenter, en dehors des postes de détention, afin d'assurer la garde de leurs enfants à domicile. S'agissant des mesures de nettoyage des suies, les consignes ont été transmises par la préfecture et relayées au sein de l'établissement. Aucune présence de suie n'a toutefois été constatée sur le périmètre de la maison d'arrêt. La préfecture a en outre recommandé de nettoyer à l'eau les grilles d'entrée d'air et de changer les filtres en cas d'encrassement des installations de ventilation, et ce en aplication du protocole établi par l'ARS. Aussi, les grilles de ventilation et gaines de soufflage ont été vérifiées avant d'être nettoyées. Les mesures de nettoyage des bâtiments et cours de promenade ont été renforcées durant toute la période, avec des consignes spécifiques communiquées aux auxiliaires du service général. S'agissant enfin de la prise en charge médicale de la population pénale, le médecin chef de service n'a constaté aucun afflux supplémentaire de détenus, ni de personnels pénitentiaires vers l'unité sanitaire le jour de l'incident, ni les jours qui ont suivi. Quatre personnes détenues se sont plaintes de nausées et céphalées le soir de l'incendie, en raison des odeurs. Si leurs symptômes ont rapidement disparu, elles ont tout de même été reçues le lendemain par le médecin qui a conclu qu'aucun traitement spécifique n'était nécessaire. Depuis les faits, le médecin n'a rien noté d'anormal dans le fonctionnement du service. Les travaux de remédiation du site étant maintenant terminés, il n'y a plus d'odeurs incommodantes qui émanent de ce site, celles-ci n'ayant par ailleurs jamais été toxiques.

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