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Clémentine Autain
Question N° 34284 au Ministère de la justice


Question soumise le 24 novembre 2020

Mme Clémentine Autain interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur sur la qualité des instruments juridiques élaborés pour faire face à la deuxième vague de l'épidémie de covid-19. Mme la députée constate que la deuxième vague menace d'être plus dévastatrice que la première, alors même que les mesures annoncées par le Président de la République sont plus légères que celles édictées en mars. À ce titre, le protocole sanitaire en entreprise revêt un rôle central en dépit de son affiliation à une catégorie de droit, le droit souple, très peu usité en France car n'étant pas opposable avec la même force qu'une réglementation issue du droit positif. L'importance des gestes barrières dans la lutte contre la pandémie est d'autant plus primordiale que l'ensemble du gouvernement n'est pas à la hauteur de la situation. Mme la députée s'étonne donc que le régime juridique privilégié en ce moment se borne à une simple élaboration de recommandations et ne s'appuie pas sur des normes au caractère obligatoire. Mme la députée constate qu'encore une fois l'État ne semble pas être en situation ni de protéger sa population ni d'organiser une stratégie cohérente de lutte contre l'épidémie, trop occupé à imposer l'idéologie néolibérale jusque dans la manière de penser le droit. Elle lui demande donc de bien vouloir expliquer pourquoi le recours au droit souple est privilégié dans cette période en dépit de son caractère manifestement inadapté à la situation.

Réponse émise le 9 février 2021

Le ministère de la justice n'est pas concerné par le protocole en entreprise. Néanmoins, pour ce qui est de ce ministère, les réponses apportées à la deuxième vague de l'épidémie liée à la COVID-19 ont notamment pris la forme de textes normatifs. S'agissant des juridictions, plusieurs ordonnances ont été prises sur le fondement de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire. Les ordonnances n° 2020-1400, n° 2020-1401 et n° 2020-1402 visent à limiter la propagation de l'épidémie parmi les personnes participant à la conduite et au déroulement des instances et définissent les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement des juridictions de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire, ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d'organisation du contradictoire devant les juridictions. S'agissant des établissements pénitentiaires, le ministère de la Justice a édicté, au moyen de plusieurs instructions, un certain nombre de mesures visant à prévenir le risque de propagation du virus. Ces instructions définissent des orientations générales et arrêtent des mesures d'organisation du service public pénitentiaire, devant être mises en œuvre par les chefs d'établissements. Certaines de ces mesures sont de nature réglementaire et ont fait naître des obligations pour les personnels ou les personnes détenues (ex : le port du masque), d'autres ont pu prendre la forme de recommandations (ex : la reprise progressive des activités selon les circonstances locales lors du déconfinement). La loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire a permis d'assouplir les règles d'affectation des personnes incarcérées en dérogeant aux règles de répartition entre maisons d'arrêts et établissements pour peine. Au 1er janvier 2021, 62728 personnes étaient détenues contre 70651 au 1er janvier 2020, soit une baisse très significative. Ces dispositions, conjuguées à la faculté offerte aux établissements pénitentiaires de procéder à des transferts de prévenus, accusés, ou mis en examen, ont permis de lutter efficacement contre la formation de foyers infectieux au sein des prisons. En outre, les mesures mises en place dans le cadre du confinement ont été précisées dans une note du directeur de l'administration pénitentiaire du 30 octobre 2020, actualisée le 27 novembre 2020. Des textes normatifs visent également à régir les conditions de travail des agents de la fonction publique. Tel est le cas de l'arrêté du 13 octobre 2020 modifiant l'arrêté du 31 juillet 2019 portant application du décret n° 2016-151 du 11 février 2016 modifié et fixant les modalités de mise en œuvre du télétravail au sein du ministère de la justice, qui concerne l'ensemble des activités le permettant. Aussi, le cadre juridique retenu en cette période s'accommode-t-il bien, selon les cas, de dispositions normatives ou de droit souple. Au demeurant, le droit souple n'est pas exempt du contrôle du juge conformément à une évolution jurisprudentielle déjà en cours depuis les décisions Formindep du 27 avril 2011 (n° 334396) et Société Casino Guichard-Perrachon du 11 octobre 2012 (n° 357193) que le Conseil d'Etat est venu parachever (Gisti, 2 juin 2020, n° 418142) en étendant la recevabilité des recours formés à l'encontre des actes de droit souple.

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