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Grégory Besson-Moreau
Question N° 7154 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 10 avril 2018

M. Grégory Besson-Moreau alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la question du taux d'incorporation du bioéthanol. Les récentes réponses apportées par le Gouvernement ne vont pas du tout dans le bon sens ou sont totalement incomplètes. Pour éviter des discours de façade, il aimerait connaître très précisément ce que compte faire le Gouvernement sur la question du bioéthanol. En effet, la transition énergétique est de plus en plus concrète et la place de la France est centrale. Mais les décisions récentes prises par la Commission européenne sur les agro-carburants remettent en cause les filières agricoles. Pourquoi ? Car il y a eu changement de cap sans que les filières y soient associées. Le taux d'incorporation de bioéthanol dans l'essence est à 7 % aujourd'hui. Il est fondamental que ce 7 % reste attribuer à la première génération de biocarburants. Le problème majeur c'est que les pétroliers français et européens ne mettront que leurs propres produits dans le pétrole si l'on dénature ce taux en y intégrant l'huile de palme notamment ce que semble accepter le Gouvernement. L'huile de palme aux dernières nouvelles est moins vertueuse que les betteraves et cela ne fait pas travailler les secteurs présents sur le sol national. À cela s'ajoute les 7 millions d'hectolitres censés arrivés sur le marché européen dans le cadre des accords Mercosur actuellement en discussion. C'est un sujet qui ne fait pas la une de médias mais qui est fondamental pour que la France garde une cohérence dans son rôle concernant la transition énergétique. Aussi, ne pas réserver ce taux de 7 % au bioéthanol pose un problème de temporalité : les biocarburants de seconde génération n'étant pas prêts, le fait de baisser la part de bioéthanol dans ce taux d'incorporation revient à remplacer le biocarburant par du pétrole. D'un point de vue global, l'Union européenne doit se montrer ambitieuse pour atteindre ses objectifs de 27 % d'énergie renouvelable et de 40 % de réduction des gaz à effet de serre en 2030, elle a besoin des biocarburants de 2e génération ligno-cellulosiques mais en complément des biocarburants de 1G. Les filières françaises de biocarburants soutiennent le développement des biocarburants de 2G. Elles ont investi dans la R et D sur les technologies de 2G notamment à travers des projets comme Futurol ou Bio-T-Fuel. Aussi, les biocarburants de première génération issus des matières premières européennes (betteraves, céréales, colza, tournesol) fournissent à la fois de l'alimentation humaine, de l'énergie et des coproduits riches en protéines ou fibres pour l'alimentation animale, ce qui réduit la dépendance de l'Europe aux tourteaux de soja OGM d'Amérique du Sud ce qui participe à la déforestation. Il ne faut donc pas chercher à substituer la G1 par la G2 alors que c'est l'addition des deux qui permettra d'atteindre les objectifs. En donnant aux acteurs économiques des filières actuelles un signal très négatif, elle n'incite pas aux nouveaux investissements et prend le risque de fixer une feuille de route théorique, avec toutes les conséquences associées, en termes d'activité économique et de climat. Cette proposition doit donc être profondément remaniée. Il l'alerte donc sur cette question qui implique un secteur d'activité à forte valeur ajoutée en termes d'emploi qui plus est.

Réponse émise le 15 octobre 2019

Le Gouvernement soutient le développement des biocarburants durables qui participent aux objectifs d'énergies renouvelables et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports. Ce soutien passe par la taxe incitative relative à l'incorporation de biocarburants (TIRIB) dont l'objectif a été augmenté au 1er janvier 2019 et doit à nouveau être augmenté en 2020 pour atteindre 8,2 % du contenu énergétique des essences (contre 7,5 % en 2018). Cela constitue une incitation très forte pour les distributeurs et un soutien important aux producteurs d'éthanol. L'éthanol est aujourd'hui incorporé dans les essences sous forme d'éthanol pur ou d'éther éthyle tertiobutyle (ETBE), dans les carburants E5, E10 et E85. Les spécifications techniques de ces carburants imposent une limitation à l'incorporation d'éthanol, et nous atteignons aujourd'hui ces limites étant donné les volumes mis à la consommation. Le développement de l'E85, soutenu par une taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) très avantageuse, devrait permettre d'incorporer plus d'éthanol dans les carburants, mais il doit se faire de manière sûre. La majorité du parc de véhicules est aujourd'hui incompatible avec le carburant E85, et son utilisation dans un véhicule incompatible expose le consommateur à des risques de panne et de casse moteur. Par ailleurs et indépendamment des contraintes techniques, les biocarburants issus de matières premières en concurrence alimentaire sont limités à une incorporation dans les carburants à hauteur de 7 % en énergie, limite qui a été fixée au niveau européen pour lutter contre le changement d'affectation des sols, et qui est aujourd'hui atteinte. La croissance de la part de biocarburants dans les transports ne peut donc se faire que par l'usage de biocarburants non concurrentiels avec le secteur alimentaire, en particulier les biocarburants dits de deuxième génération (à base de bois, paille, algue…), dont la production et l'utilisation sont encore en émergence. L'État soutient activement la recherche et le développement sur ce sujet, notamment grâce à l'IFP Énergies Nouvelles, les projets Futurol et Bio-T-Fuel s'inscrivent dans cette dynamique. Le Gouvernement a par ailleurs reconnu en janvier 2019 la possibilité pour certains résidus de l'industrie sucrière et amidonnière de ne pas être considérés comme entrant en compétition avec l'usage alimentaire et d'être donc comptés au-delà du plafond des 7 %. Cela favorise donc grandement la filière de production d'éthanol. Enfin le Gouvernement agit sur la question de l'impact des biocarburants, en particulier ceux fabriqués à partir de palme ou de soja, qui ont un fort effet de changement d'affectation des sols indirect et induisent donc indirectement de la déforestation et des émissions de gaz à effet de serre. C'est un sujet que la France porte au niveau européen et il est prévu, par un acte délégué en cours de consultation, de caractériser précisément les matières premières concernées, dont le niveau d'incorporation sera plafonné au niveau de 2019 puis diminué pour atteindre zéro en 2030. La France envisage d'aller plus loin, comme elle l'a rappelé dans la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, en plafonnant au niveau de 2017 l'incorporation de ces matières. L'État a en outre fixé comme objectif l'utilisation d'au moins 25 % de matières premières issues de l'économie circulaire et du recyclage des huiles usagées et des graisses animales, filière encore trop peu développée en France. Le président-directeur général de Total s'est par ailleurs engagé publiquement à utiliser au moins 50 000 tonnes de colza français, soutenant ainsi directement l'agriculture française.

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