Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Erwan Balanant
Question N° 9004 au Secrétariat d'état aux personnes handicapées


Question soumise le 5 juin 2018

M. Erwan Balanant alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'accompagnement et la prise en charge des personnes autistes. Selon les associations, ce handicap affecterait environ 650 000 personnes en France, soit un nouveau-né sur cent. Face à l'importance de l'autisme et des troubles envahissants du développement, le Président de la République a lancé la stratégie nationale pour l'autisme 2018-2022, en juillet 2017. Annoncée comme une priorité du quinquennat et dotée de 340 millions d'euros, cette stratégie vise à répondre à des enjeux importants tels que l'inclusion scolaire et sociale des personnes autistes, l'accompagnement des familles ainsi que le développement de la recherche. Il s'agit d'une initiative cruciale qui doit être accueillie très favorablement. Toutefois, certaines problématiques auxquelles les personnes atteintes de troubles autistiques et leurs familles sont exposées restent peu abordées. Tel est notamment le cas de l'accès aux soins ainsi que de la formation des personnels médicaux, paramédicaux et sociaux. Un phénomène de grande envergure est également peu traité, celui de l' « exil » des Français autistes vers la Belgique. En effet, environ 4 500 adultes et 1 500 enfants français se trouveraient sur le territoire belge, après avoir été confrontés aux carences du système d'accompagnement français. Pointés par plusieurs associations, ces départs sont notamment motivés par les solutions de scolarisation proposées en Belgique, la scolarisation des enfants autistes est de droit et où de nombreuses classes spécialisées ont été créées. Ces départs sont financés par la sécurité sociale ainsi que par les départements français et représenteraient un coût proche de 400 millions d'euros. Cette situation inacceptable doit cesser. Il s'agit de fonds colossaux qui pourraient être déployés afin d'améliorer les solutions en termes d'accompagnement et de scolarisation des personnes autistes sur le territoire national et auprès de leurs proches. Il lui demande quels moyens spécifiques le Gouvernement compte mettre en œuvre afin de lutter contre ces départs massifs de personnes autistes vers la Belgique. Il souhaite également savoir quelles mesures le Gouvernement envisage d'adopter afin d'améliorer l'accès aux soins des personnes autistes et la formation des personnels médicaux, paramédicaux et sociaux.

Réponse émise le 27 novembre 2018

L'accueil en Belgique de personnes en situation de handicap est un phénomène ancien. S'il répond parfois à des motivations personnelles et à un parcours de vie librement choisi, qui peuvent être liées à la proximité frontalière, ou à l'adhésion au projet d'un établissement et aux modalités d'accompagnement qu'il porte, il traduit aussi l'absence de solutions d'accompagnement pour un certain nombre de personnes handicapées, notamment de personnes autistes. Dès lors, il importe à la fois d'éviter les départs contraints mais aussi d'assurer la meilleure prise en charge possible des personnes accueillis en Belgique. Ainsi, la situation particulière d'accueil de personnes handicapées en Belgique a conduit à la signature d'un accord-cadre, le 22 décembre 2011, entre la France et la Wallonie. Il est entré en vigueur le 1er mars 2014. Cet accord cadre a pour objectif de disposer d'éléments de recensement des publics français, de leurs établissements d'hébergement et d'améliorer la qualité de la prise en charge des personnes handicapées françaises accueillies en Belgique, en renforçant les possibilités de contrôle et en prévoyant une convention type permettant de définir des conditions d'accueil similaires, notamment avec les établissements qui étaient conventionnés préalablement à l'entrée en vigueur de l'accord cadre. Par ailleurs, l'instruction du 22 janvier 2016 a posé les bases d'un dispositif de prévention des départs non souhaités : il s'agit de porter une attention particulière à la recherche de solutions nationales avec l'accord des intéressés. Ce dispositif a vocation à reposer sur les projets d'accompagnement global (PAG) dont la généralisation à l'ensemble du territoire est désormais effective depuis début 2018. Ce plan de prévention des départs non souhaités vers la Belgique a bénéficié en 2016 de crédits d'amorçage de 15 millions d'euros, reconduits en 2017,  doublés en 2018, puis de nouveau abondés de 15 millions d'euros en 2019, pour atteindre désormais un montant de 45 millions d'euros. Ces crédits sont répartis entre les régions les plus concernées pour financer trois types de solutions de proximité sur le territoire national : - des interventions directes de professionnels spécialisés au domicile (pôles de compétences et de prestations externalisées pour les personnes en situation de handicap) ; - des renforts de personnels dans les établissements médico-sociaux en proximité du domicile des personnes accompagnées ou de leur famille ; . - des créations de places adaptées dans des établissements et services médico-sociaux. La poursuite du dispositif a été inscrite notamment dans l'instruction du 2 mai 2017 relative à la transformation de l'offre d'accompagnement des personnes handicapées dans le cadre de la démarche « une réponse accompagnée pour tous », de la stratégie quinquennale de l'évolution de l'offre médico-sociale (2017-2021) et de la mise en œuvre des décisions du comité interministériel du handicap du 2 décembre 2016. C'est également un objectif important rappelé dans l'instruction de février 2018 agences régionales de santé (ARS) qui fixe les objectifs en matière de transformation de l'offre qu'elles doivent inscrire dans les programmes régionaux de santé (PRS). La prévention des départs en Belgique sera au centre d'un des chantiers nationaux de la conférence nationale du handicap 2018-2019 annoncé dans le cadre du comité interministériel du handicap du 25 octobre dernier. D'autres évolutions à l'échelle nationale concourent à cette démarche. Il en est ainsi : - du nouveau cadre réglementaire des autorisations, dont le dispositif vise à favoriser la construction de parcours notamment au travers de « spécialisations » fondées, non pas sur des tranches d'âge, mais des projets d'accompagnement ; - de l'aménagement des dispositions relatives aux autorisations qui favorisent la possibilité d'extension sans appel à projet ; - ou encore de l'affirmation du principe de l'école inclusive, avec le développement de l'externalisation des unités d'enseignement des ESMS et du renforcement des interventions conjointes entre les ESMS et l'école ordinaire. De même les travaux en cours concernant la construction de systèmes d'information visant à une meilleure connaissance de l'offre médico-sociale, du suivi des orientations et in fine des besoins concourent à cette dynamique. Par ailleurs, la stratégie nationale pour l'autisme au sein des troubles du neuro-développement, présentée par le Premier ministre le 6 avril 2018, porte cinq engagements majeurs afin d'améliorer le quotidien des personnes autistes et de leurs familles : - remettre la science au cœur de la politique publique de l'autisme en dotant la France d'une recherche d'excellence ; - intervenir précocement auprès des enfants présentant des différences de développement, afin de limiter le sur-handicap ; - rattraper notre retard en matière de scolarisation ; - soutenir la pleine citoyenneté des adultes ; - soutenir les familles et reconnaitre leur expertise. Des mesures spécifiques ont été annoncées dans la stratégie afin de répondre aux défis soulevés. Il s'agit tout d'abord de garantir à chaque enfant un parcours scolaire fluide et adapté à ses besoins. Cela passera par l'augmentation du nombre d'élèves scolarisés en unité d'enseignement en école maternelle, par la création d'unité d'enseignement en école élémentaire et par l'augmentation du nombre d'élèves autistes scolarisés en ULIS. Par ailleurs, un des cinq engagements majeurs de la stratégie nationale est de « soutenir la pleine citoyenneté des adultes autistes ». Ainsi, la stratégie nationale prévoit des mesures concrètes afin d'améliorer le diagnostic des adultes autistes, de mettre fin aux hospitalisations inadéquates et d'accompagner leur autonomie. Des crédits médico-sociaux destinés à l'accompagnement des adultes autistes seront alloués aux ARS afin de développer des solutions adaptées aux besoins tels qu'ils sont identifiés dans les différents départements. Il sera également demandé aux ARS d'engager, en lien avec les Centres Ressource Autisme (CRA), un plan de repérage et de diagnostic des adultes, en particulier au sein des Etablissements et des Services Médico-Sociaux (ESMS) et des établissements publics de santé mentale (EPSM). A cette fin, les CRA accompagneront la montée en compétence des équipes de diagnostic de proximité et des crédits dédiés leur seront attribués. Pour mettre fin aux hospitalisations inadéquates des adultes autistes et renforcer la pertinence des prises en charge sanitaires, il sera demandé aux unités accueillant des séjours longs en psychiatrie pour réduire les durées de séjour et augmenter les soins ambulatoires. Enfin, la formation des professionnels est au cœur de cette stratégie nationale. Ainsi, une de ses principales ambitions est de « conforter les équipes de professionnels au service des personnes et de leurs familles dans leur champ de compétence et l'exercice de leurs missions ». Il s'agit de donner aux différents professionnels les moyens d'intervenir au bon moment, à bon escient, avec des actions qui seront menées pour assurer la pertinence et la qualité des actes, notamment en termes de formation initiale et continue. Un des objectifs est de permettre aux équipes pédagogiques et aux étudiants de se saisir des contenus conformes aux Recommandation de Bonnes Pratiques Professionnelles (RBPP) et actualisés. En effet, la connaissance des personnes autistes et de leurs besoins a progressé ces dernières années et rend nécessaire une évolution des pratiques professionnelles et des accompagnements qui sont proposés. Il est à noter que le spectre des TSA est très large et chaque personne présente une personnalité, un fonctionnement et des troubles qui lui sont propres. Les intervenants ont donc non seulement besoin d'acquérir cette connaissance fine mais aussi besoin de savoir quelles pratiques très spécifiques adopter pour mieux les accompagner dans le quotidien. La mise en œuvre de la nouvelle stratégie nationale pour l'autisme au sein des troubles du neuro-développement va ainsi permettre de poursuivre les efforts engagés ces dernières années. De façon générale, elle permettra des avancées structurantes pour l'ensemble des personnes en situation de handicap.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.