Intervention de Aurélien Pradié

Séance en hémicycle du jeudi 1er décembre 2022 à 15h00
Juridiction spécialisée dans les violences intrafamiliales — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Pradié, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Nous savons quoi faire et comment le faire. Dès lors, il est inacceptable d'attendre encore. Nous avons dix-huit ans de retard sur l'Espagne – dix-huit ans, et plusieurs centaines de femmes mortes. Qu'il faille étudier et tourner encore autour du pot est absolument fou ! Pendant que nous hésitons, des femmes meurent : cette réalité peut paraître brutale et simpliste, mais elle est la réalité de notre pays. Les assassins courent plus vite que nous – beaucoup plus vite.

Nous vous proposons de passer des paroles aux actes – nous vous proposons tout simplement d'avancer. En 2019, l'Assemblée a voté à l'unanimité une proposition de loi qui accélérait les délais de délivrance des ordonnances de protection et qui généralisait le bracelet antirapprochement dès la phase de prévention. Nous avons agi pour retirer aux auteurs des violences leurs autorisations de port d'arme et pour mieux protéger le logement des victimes. Il y avait à l'époque de nombreux doutes ; il y avait de nombreuses hésitations, y compris dans cette assemblée ; il y avait tant et tant de prudence ! Certains considéraient qu'il fallait attendre, et pourtant, nous avons agi. Les résultats sont au rendez-vous. Le Grenelle des violences conjugales a aussi permis d'agir, mais est-ce suffisant quand on sait qu'en 2021, une femme sur six déclare avoir été victime au moins une fois de violence physique ou sexuelle de la part d'un partenaire depuis l'âge de 15 ans ? Combien de bracelets antirapprochement ont été délivrés dès la phase de l'ordonnance de protection, phase la plus importante ? Treize ! Seuls treize bracelets antirapprochement ont été délivrés dès l'étape la plus cruciale, qui précède le passage à l'acte. Treize bracelets, pour plus de cent femmes assassinées depuis le début de l'année 2022 !

Pourquoi cet échec ? Pour des raisons techniques, sûrement, mais aussi, et surtout, parce que les magistrats chargés des affaires familiales et le juge civil, aujourd'hui compétents, hésitent trop à se saisir de la mesure quasi pénale qu'est le bracelet antirapprochement. Dans le cadre civil actuel, le port d'un bracelet antrapprochement nécessite l'accord de l'auteur – vous m'entendez bien, il faut l'accord de l'auteur !

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