Intervention de Pierre Meurin

Séance en hémicycle du jeudi 12 janvier 2023 à 9h00
Supprimer les zones à faibles émissions mobilité — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Meurin, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Dans le même temps, les collectivités territoriales sont chargées de l'application du dispositif. Elles rivalisent de créativité pour mettre en place une usine à gaz de dérogations inintelligibles : des passes ZFE-m pour accorder quelques jours d'accès, des horaires de nuit, des dérogations pour les associations caritatives, peut-être des dérogations pour rendez-vous médicaux – merci de votre magnanimité.

Au passage, je signale aux Français que Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, a annoncé en octobre dernier qu'un système de vidéoverbalisation par lecture de plaque d'immatriculation sera déployé à partir du deuxième semestre 2024. C'est déjà demain.

Ce système asymétrique totalement illisible est en train de créer un véritable féodalisme des mobilités. Pour des gens qui veulent mettre fin aux énergies fossiles, il est regrettable de créer de telles usines à gaz. Le tableau dressé nous fait vivre dans l'univers de Ionesco ou de Ubu roi, certainement pas dans l'univers de Richelieu ou du général de Gaulle.

Voilà pourquoi le groupe Rassemblement national, prenant acte du grave danger que représentent ces zones, prend ses responsabilités en demandant leur suspension immédiate car les conditions d'acceptabilité mais aussi de faisabilité ne sont pas réunies. Si l'erreur est humaine, persévérer est diabolique.

Nathalie, infirmière au Samu, ne peut plus se rendre au travail avec sa Volkswagen Golf de 2002. Ce cas, relaté hier dans la presse, c'est cela, le réel, monsieur le ministre. Nathalie n'a pas les moyens de s'acheter un véhicule de remplacement. Par votre faute, elle se retrouve face à un problème insoluble.

Des millions de Français sont dans la même situation car, dès 2025, ce ne seront plus dix mais, écoutez bien, quarante-trois métropoles qui seront concernées par ce dispositif de ségrégation sociale. La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », a en effet poussé le crime à un point inimaginable. Dans deux ans, près de la moitié du parc automobile existant ne pourra plus pénétrer dans quarante-trois territoires métropolitains. En énonçant cette réalité, je me pince pour y croire.

Qui subit les contraintes ? Comme d'habitude, les Français les plus modestes des territoires ruraux. C'est aussi le cas pour la hausse des taxes sur le carburant, la réforme des retraites et l'explosion des prix de l'énergie. Vous auriez dû écouter Marine Le Pen qui vous alerte depuis tant d'années. Au cours des trente dernières années, ces Français modestes et ruraux ont été repoussés des grandes villes en raison du prix de l'immobilier. Concomitamment, les gouvernements successifs, dont le vôtre, ont accompagné la tiers-mondisation de nos territoires ruraux.

Votre choix inepte de la métropolisation a conduit les grandes villes à absorber tous les services du quotidien : bassins d'emplois, professionnels de santé, commerces de proximité, services publics et autres. Pendant ce temps, nos villages, notre France des clochers, ont connu une véritable désertification conduisant à une fracture territoriale aggravée. Ainsi les ZFE-m provoquent une fracturation majeure de notre pacte social, une atteinte inédite depuis des siècles à la liberté d'aller et venir sur le territoire français.

Votre argumentation repose principalement sur l'étude publiée en 2016 par Santé publique France (SPF), selon laquelle la pollution de l'air entraîne la mort de 47 000 personnes par an. Pour y remédier, vous encouragez l'achat de véhicules électriques ou de voitures hybrides rechargeables. Ces véhicules sont-ils moins polluants et leur cycle de vie est-il vertueux ? Permettez-nous d'en douter sérieusement.

Les voitures électriques sont produites largement par la Chine et équipées de batteries fabriquées avec du cobalt produit à 80 % en République démocratique du Congo (RDC). Ce cobalt, contrôlé à 90 % par la Chine, est extrait de mines artisanales dangereuses. À cet égard, j'ai une pensée pour les 40 000 enfants qui travaillent dans ces mines où des effondrements provoquent toutes les semaines des accidents mortels. Mais comme c'est loin de chez nous, on s'en lave les mains.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion