Intervention de Arnaud Le Gall

Réunion du mercredi 18 janvier 2023 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Le Gall :

La semaine dernière, vous avez été envoyée pour une mission de sauvetage au Burkina Faso, un pays qui, après le Mali, semble décrocher de la sphère francophone. Vous avez indiqué à cette occasion que la France n'imposait rien au Burkina Faso, ce qui est globalement exact. Mais le vrai sujet est de savoir comment redorer l'image de la France au Sahel, où elle s'est profondément dégradée, dans quel but et avec quels moyens.

Le Sahel est en crise globale depuis très longtemps. Cette crise sécuritaire, sociale, politique et écologique remonte à loin : on pourrait en situer l'origine aux années 1980 et 1990, au cours desquelles les plans d'ajustement du Fonds monétaire international ont détruit les États, accroissant ainsi les tensions sociales de toutes sortes.

L'attente était grande lorsque la France s'est engagée dans l'opération Barkhane, à la suite de l'intervention au Mali en 2013. Or, en l'espace de neuf ans, la France est passée de pays attendu comme un sauveur à responsable de tous les maux du Sahel. C'est très injuste, parce que la France et l'opération Barkhane ne le sont pas.

Il n'en reste pas moins que, comme nous l'avions dit dès le départ, le logiciel était mauvais. On a cru qu'on pouvait régler une crise aussi complexe uniquement par la guerre au terrorisme : ce fut une profonde erreur stratégique. S'y sont ajoutées des fautes politiques, avec des indignations à géométrie variable consistant à dénoncer les coups d'État au Mali et au Burkina Faso tout en adoubant un régime autoritaire au Tchad. L'intervention en Libye a eu aussi des conséquences désastreuses en amont.

Au lieu d'une remise en question, on assiste à une forme de déni. On a l'impression d'être passé de l'engagement militaire total à une sorte de fuite, où on laisse le vide s'installer et la situation pourrir. Dans ce contexte, certaines propagandes mensongères et injustes – notamment celle de la Russie – ont trouvé beaucoup d'écho. Il faut se demander pourquoi elles sont à ce point écoutées par les peuples et comment faire pour les combattre.

Quand le vrai bilan de ces dix années d'interventions au Sahel sera-t-il dressé ? Et quand organiserons-nous une véritable francophonie populaire, au service des peuples du Sahel et de leur souveraineté économique ?

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