Intervention de Charles Fournier

Séance en hémicycle du mardi 31 janvier 2023 à 15h00
Accélération de la production d'énergies renouvelables — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles Fournier :

Je dirai quelques mots sur le texte lui-même. Il comprend de nombreuses corrections rédactionnelles mais sa substance évolue peu, si bien que les avancées, comme les reculs, donnent toujours le sentiment d'un texte inabouti.

Nous sommes satisfaits de voir que certains des acquis que nous avions obtenus ont été maintenus, en particulier la modulation tarifaire, la création d'un observatoire et d'un médiateur des énergies renouvelables, ainsi que les règles concernant l'autoconsommation collective.

Mais ces acquis pèsent peu face à l'ensemble des reculs et des faiblesses que nous avions soulignés. Au lieu de garantir une planification lisible impliquant de manière positive les territoires, le texte ne permet aucun contrôle des représentants de l'État sur les communes qui, in fine, ne seront pas tenues de respecter les objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie. Pire, l'avis conforme des maires est désormais exigé à chaque phase d'élaboration de la cartographie. Il est assez cocasse, d'ailleurs, que la commune vote un avis conforme sur la copie qu'elle rend : elle va valider sa propre copie, ce qui est assez original ! Les maires auront ainsi une sorte de droit de veto sur les zones d'accélération.

Cependant, nous nous réjouissons que le texte rende impossible, pour les communes qui n'auront pas établi de zones d'accélération permettant d'atteindre les objectifs de la PPE, la création de zones d'exclusion de l'éolien. Mais encore faut-il que ces objectifs fassent l'objet d'une territorialisation précise, visiblement si difficile à obtenir !

Par ailleurs, le texte ne saisit pas l'occasion d'aller plus loin dans l'exploitation de gisements significatifs permettant la production d'énergies renouvelables, comme les toitures des bâtiments commerciaux et publics, les parkings de petite taille ou encore les zones d'activité. La réintroduction de l'article 11 ter, voté par le Sénat, se fait dans une version amoindrie.

Nous regrettons aussi que l'amendement « albédo », qui visait à prescrire l'emploi de certains matériaux susceptibles de réfléchir l'énergie solaire sur les toits, ait été supprimé, tout comme celui proposant la solarisation des toits des logements sociaux, qui avait été défendu par notre collègue Peytavie. Ces exemples montrent bien à quel point le texte nous prive d'un véritable soutien aux dispositifs innovants en la matière.

La raison impérative d'intérêt public majeur ne fait l'objet d'aucun garde-fou, et la manière dont elle est finalement rédigée est insatisfaisante. En prévoyant que la dérogation relative aux espèces protégées peut quand même s'appliquer en dehors des zones d'accélération, la loi ne pose en fait aucune limite.

La CMP a aussi supprimé l'encadrement de la méthanisation, qui aurait permis d'interdire l'irrigation des cultures intermédiaires destinées à ce type de production d'énergie. C'est un des nombreux exemples de la faible place accordée à la protection de l'environnement dans le texte. La notion même d'énergie renouvelable demeure ambiguë, puisque la promotion du « bas-carbone » en brouille la définition.

Trop de questions restent en suspens : comment maintenir une trajectoire sans définir des objectifs et sans impliquer tous les échelons ? Comment rattraper notre retard sans rehausser nos ambitions ? Que se passera-t-il lors de la mise en application de la loi, compte tenu du manque de planification ?

Par ailleurs, le Sénat puis le Gouvernement ont supprimé l'objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans le mix énergétique. Ce qui n'était pas possible pour les énergies renouvelables, à savoir fixer une ambition, vous le faites pour le nucléaire.

Pour toutes ces raisons, le nouveau texte contribue à réduire encore davantage la portée du texte initial. Encore une fois, nous ne voulons pas voter contre : introduire une planification, une définition de l'agrivoltaïsme et des mesures concernant la solarisation – quelle qu'en soit la teneur – vaut mieux que rien du tout.

Parce que la CMP n'a pas permis de revenir sur nos points de désaccord, nous maintenons notre vote initial : nous nous abstiendrons.

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