Intervention de Boris Vallaud

Réunion du mercredi 1er février 2023 à 9h35
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

Je remercie Fatiha Keloua Hachi pour son exposé complet et brillant, auquel j'apporterai simplement quelques éléments complémentaires.

L'association COP1-Solidarités étudiantes est née de la triste nécessité de donner à manger à celles et ceux de nos étudiants et de nos jeunes qui étaient obligés de sauter un ou plusieurs repas faute d'avoir les moyens de les payer. Nous avons assisté à une de ses distributions alimentaires avec l'espoir que les files interminables de jeunes devant les banques alimentaires et les épiceries sociales que nous avions connues durant la crise du covid s'étaient taries et que ces photographies d'un moment de souffrance estudiantine, qui nous rappelaient les années 1930, ne correspondaient plus à la réalité. Or nous avons croisé la même jeunesse désœuvrée. Il y avait une majorité de jeunes femmes, de nombreux boursiers – démonstration que le système des bourses est largement insuffisant pour permettre de vivre décemment –, mais aussi beaucoup de non-boursiers, qui sont au-dessus du seuil et n'ont pas droit à certaines aides, et beaucoup d'étudiants étrangers et esseulés qui, du fait de l'augmentation du coût des inscriptions à l'université, se trouvent contraints de rogner sur d'autres dépenses. Certains jeunes nous ont indiqué qu'ils n'allaient pas à ces distributions alimentaires auparavant, mais qu'ils le faisaient désormais de façon récurrente, avec un peu moins de rouge au front car ils y croisaient d'autres bénéficiaires.

Il faut reconnaître que le Gouvernement n'a pas rien fait, et c'est heureux – c'était sa responsabilité –, mais nous faisons aussi le constat que les mesures qu'il a prises sont insuffisantes. Nombre d'étudiants passent à travers les mailles du filet et se retrouvent dans des situations inextricables, parfois au détriment de leur qualité de vie et de leurs études. La mise en concurrence de leur vie estudiantine et de leur vie en général produit des dégâts considérables.

Au cœur de la pandémie, le groupe socialiste avait proposé de créer un minimum jeunesse, pendant du minimum vieillesse qui a permis de sortir de nombreuses personnes âgées de la grande pauvreté et de l'indigence, mais nous nous sommes heurtés au front du refus de la majorité, qui avait considéré qu'il existait un risque de plonger la jeunesse dans l'assistanat – cette jeunesse à laquelle on demande d'aller travailler, parfois avec des coups de pied aux fesses, dans une logique d'équilibre des droits et devoirs. Au même moment, la majorité proposait d'augmenter la part d'héritage pouvant être transmise en franchise d'impôt. En somme, quand on n'a pas les moyens, être aidé relève de l'assistanat, mais quand on a les moyens, il est assez naturel de se voir transmettre un patrimoine.

Je crois à l'universalité des droits. Dans un système qui porte parfois la suspicion en bandoulière, des droits pour tous valent mieux que des allocations pour certains. Il faut réfléchir à une redistribution plus efficace par les prélèvements sociaux et fiscaux, à la défamilialisation et à l'individualisation des droits. Ce sont des questions qui se posent dans le cadre de notre combat pour les droits des femmes, mais aussi en faveur de l'émancipation de la jeunesse.

Beaucoup de jeunes ne font pas valoir leurs droits. Le repas à 1 euro pour tous ne privilégiera pas les privilégiés, mais il remplira le réfrigérateur et l'assiette de ceux qui n'en peuvent plus des difficultés qu'ils ont à vivre. Je remercie Fatiha Keloua Hachi d'avoir déposé cette proposition de loi et tous ceux qui la soutiendront.

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