Intervention de Cédric Lewandowski

Réunion du jeudi 19 janvier 2023 à 17h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Cédric Lewandowski, Directeur Exécutif Groupe EDF en charge de la Direction du Parc Nucléaire et Thermique :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs, je tiens à vous remercier de m'avoir invité à témoigner devant votre commission d'enquête au mon engagement professionnel et personnel au service de la filière nucléaire française. Je pense effectivement que celle-ci se trouve au cœur de la souveraineté de notre pays.

Après avoir débuté mon parcours professionnel au sein d'institutions publiques, j'ai rejoint EDF en 1998 en tant que directeur de cabinet de François Roussely, que j'ai eu la chance de servir jusqu'en 2004. Il nous a quittés la semaine dernière et je vous remercie, monsieur le président, de lui avoir rendu hommage, car j'y suis particulièrement sensible, comme tous ceux qui ont travaillé à ses côtés. Après cette époque, j'ai occupé les fonctions de directeur de la division transports et des véhicules électriques, puis de la division collectivités territoriales. Ensuite, j'ai été nommé directeur du cabinet civil et militaire du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, en mai 2012. À la fin du quinquennat, j'ai souhaité travailler à nouveau pour EDF et Jean-Bernard Lévy m'a proposé le poste de directeur de la stratégie, de l'innovation et de la responsabilité d'entreprise. Depuis le 1er juillet 2019, je suis directeur exécutif du groupe EDF en charge de la direction du parc nucléaire et thermique. La suite de mon intervention liminaire répondra en partie aux questions du rapporteur et je vous ai adressé le détail de ces réponses.

L'énergie nucléaire est non seulement une solution d'avenir pour la production d'un bien essentiel et vital, à savoir l'électricité, mais elle doit aussi demeurer un domaine d'excellence de la France. Depuis 1896 et la découverte des rayons ioniques par Henri Becquerel, les scientifiques et les industriels français se sont en effet particulièrement illustrés dans le domaine. Je fais évidemment référence à Marie Curie, jeune étudiante polonaise qui décide dès 1897 de consacrer sa thèse à la radioactivité et qui signe l'émergence d'un nouveau territoire de la science. En 1934, Irène Curie et Frédéric Joliot ouvrent la voie de la radioactivité artificielle et, à la veille du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, les grands principes de la réaction en chaîne sont énoncés. Ses perspectives d'utilisation civile et militaire sont alors clairement identifiées et les Français font la course en tête.

À la Libération, le général de Gaulle décide de conforter le rôle de premier rang de la France dans le nucléaire et, dès le 18 octobre 1945, il signe l'ordonnance instituant le CEA. Ses orientations décisives seront heureusement suivies par la Quatrième République. L'engagement du CEA, puis celui d'EDF, créée le 8 avril 1946 conformément au programme du Conseil national de la Résistance et à l'initiative de Marcel Paul, alors ministre de la production industrielle, ont permis le développement de la filière française, dite d'uranium naturel graphite gaz (UNGG), dont six réacteurs construits dans les années 50. En 1969, la filière à eau pressurisée (REP) est retenue pour les nouveaux développements du parc français ainsi que les six réacteurs de Fessenheim et Bugey, dont la construction a débuté dans les années 1970. Ils constituent donc les têtes de série du programme nucléaire français, lancé le 6 mars 1974 par le Premier ministre Pierre Messmer. 52 réacteurs ont ainsi été mis en service entre 1980 et 1999, permettant à EDF d'être aujourd'hui encore le premier exploitant nucléaire mondial.

Les atouts du nucléaire sont nombreux et le nucléaire restera un outil de souveraineté. Sans entrer dans les débats savants autour de ce concept, il est clair à mes yeux qu'il est important que l'État ne soit déterminé que par sa propre volonté et par ses propres intérêts. Dans le domaine nucléaire, les questions d'indépendance énergétique, de sécurité d'approvisionnement, de compétitivité et de décarbonation relèvent très clairement de cette notion. Il est donc très important que notre nation maîtrise l'ensemble du cycle, à savoir la conception, la construction, l'exploitation et le démantèlement des réacteurs.

Par ailleurs, le caractère dual du nucléaire le rend d'autant plus essentiel. Le lien entre le civil et le militaire est en effet apparu dès la découverte de la fission et un des brevets déposés par Frédéric Joliot-Curie concernait la bombe atomique. Depuis ce moment, la dualité de l'énergie nucléaire est une réalité féconde et essentielle pour ces deux usages. Par exemple, la technologie REP, majoritairement utilisée dans les réacteurs nucléaires civils, est dérivée de celle du réacteur qui équipait le premier sous-marin à propulsion nucléaire américain en 1954. Tous les spécialistes savent que l'inscription dans la durée de la stratégie militaire nucléaire de la France passe également par un secteur nucléaire civil dynamique. Cet engagement résolu dans le nucléaire civil a été un choix stratégique de l'État pour des raisons de sécurité d'approvisionnement après le choc pétrolier de 1973. Cette décision a porté ses fruits depuis près de cinquante ans. En effet, l'énergie est une industrie de temps long et la planification ainsi que les visions à moyen et long termes sont indispensables.

Alors que la France dispose de très peu de ressources énergétiques fossiles exploitées sur son territoire, le développement du programme nucléaire a permis de fortement limiter la dépendance énergétique de notre pays. En effet, notre taux d'indépendance est ainsi passé de 23,9 % en 1973 à 55 % en 2021. De plus, ce taux d'indépendance atteint 40 % au niveau de l'Union européenne. Toutefois, l'indépendance énergétique absolue est impossible à atteindre, comme Jean-Marc Jancovici l'a brillamment démontré devant votre commission.

Le programme nucléaire français s'est également accompagné d'un développement des exportations d'électricité et celui-ci a largement bénéficié à la compétitivité de notre économie, en assurant historiquement une fourniture d'électricité aux industriels sur notre territoire à un prix hors taxes compétitif, stable et prévisible. Le nucléaire est un outil industriel formidable et cette filière regroupe aujourd'hui 220 000 salariés en France, répartis dans environ 3 200 entreprises, dont 80 % de TPE-PME. Le nucléaire représente une industrie stratégique dans un monde instable et en profonde mutation. De plus, son haut contenu technologique est un moteur pour l'ensemble des systèmes industriels, de la recherche et de l'éducation des pays qui le développent : la France ne fait pas exception et la dimension géopolitique du nucléaire n'aura échappé à personne. Le nucléaire constitue enfin une technologie bas carbone incontournable dans la lutte contre le dérèglement climatique, ce qui conforte encore sa vocation stratégique. Sa maîtrise est donc essentielle pour les grandes puissances mondiales. Ses bonnes performances en termes d'utilisation des ressources naturelles, son empreinte au sol tout à fait modeste et de très faibles émissions de gaz à effet de serre représentent ses atouts majeurs. En retenant la référence du GIEC, les émissions de CO2 pour produire un kilowattheure d'électricité nucléaire s'élèvent à environ 12 grammes, soit un niveau comparable à celui de l'électricité d'origine éolienne et très favorable au regard de toutes les autres énergies.

En juillet 1998, François Roussely m'a nommé à ses côtés et je n'assurais pas de fonctions opérationnelles, mais j'ai eu la chance de vivre ces années importantes pour le groupe EDF. Très rapidement, François Roussely a constaté qu'il était nécessaire d'appréhender l'arrivée imminente de la concurrence, à laquelle notre groupe ne s'était pas préparé. Or la première directive d'ouverture du marché concernait les grands consommateurs et était directement applicable dès le mois de février 1999. Nous ne disposions donc que de quelques mois avant d'aller vers le client et, cinq ans plus tard, 70 % du marché étaient ouverts.

François Roussely avait aussi jugé absurde la dynamique qui conduisait l'État à exiger une baisse annuelle des tarifs au nom de la rente nucléaire à partager. À notre arrivée, les tarifs résidentiels baissaient effectivement de 2 % par an. Or il était évident que la courbe des investissements remonterait dès lors que la question de la prolongation de l'exploitation du parc ou de son renouvellement se poserait. Grâce à un combat acharné, François Roussely est parvenu à obtenir une stabilisation des tarifs, puis une augmentation de ceux-ci, ce qui a permis de redonner de l'oxygène aux finances d'EDF. En 2003, nous sommes parvenus à une augmentation de 3 %.

En outre, le Premier ministre Lionel Jospin avait annoncé la fermeture de Superphénix en juin 1997 et cette centrale a fait l'objet d'un décret de mise à l'arrêt définitive, paru le 30 décembre 1998. Dominique Voynet, alors ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, défendait cette décision en rappelant que la fermeture de Superphénix était un élément constitutif de l'accord de la nouvelle majorité. Il nous est revenu de mettre en œuvre cette décision politique, peu importe les convictions qui étaient les nôtres. Aujourd'hui, le démantèlement du réacteur se poursuit et le coût total de cette opération représente environ deux milliards d'euros.

Nous avons également assisté, en 1999, à la mise en service du 58e réacteur, à savoir Civaux 2. Je souhaite également citer, parmi les points marquants du mandat de François Roussely, le développement européen de notre maison, notamment en Grande-Bretagne, en Italie et en Allemagne. La décision d'ouverture des marchés a effectivement entraîné, à la suite de la directive de 1996, une recomposition totale du secteur et EDF ne pouvait que perdre des clients en France, ce pour quoi l'entreprise devait en gagner ailleurs en diversifiant ses activités et en se montrant conquérante hors de France. En 1998, EDF représentait 18 % de la production en Europe, puis 22 % en 2003. EDF est donc devenue, en quelques années, un leader européen centré sur la France qui détenait un portefeuille de métiers équilibré, tant entre l'amont et l'aval qu'entre le régulé et le dérégulé. Au début de l'année 2004, François Roussely rappelait qu'EDF disposait d'une maîtrise qui lui permettait d'avoir parmi les prix les plus bas d'Europe, d'une production qui couvrait 125 % de la consommation nationale et d'ambitions pour préparer l'avenir. Pour rappel, son projet visait la pérennisation du haut niveau du parc nucléaire, l'amélioration du taux de disponibilité des centrales, l'engagement d'un démonstrateur EPR pour préparer les choix de 2015-2020, la pérennisation des concessions hydrauliques et le développement de l'éolien. Je souligne par ailleurs la performance du parc nucléaire à cette époque. En effet, le coefficient de disponibilité s'élevait à 83,5 % en 2005.

La préparation de l'avenir constituait un axe constant de notre travail, alors même que le parc était récent et supposé excédentaire. Les opposants au nucléaire estimaient que l'intérêt de la préparation de construction de nouveaux réacteurs était une forme de non-sens dès lors que nous exportions. François Roussely occupait une position contraire et il avait saisi le Conseil d'administration le 22 juin 2004 pour l'approbation du maintien de « l'option nucléaire ouverte » et pour recevoir l'autorisation de faire tous actes pour engager le processus nécessaire en vue d'aboutir à la construction d'une tête de série EPR. Pour rappel, le Gouvernement mettait fin à son mandat deux mois plus tard. J'appelle l'attention de la commission sur le fait que, dans les années qui ont suivi, les investissements liés aux réseaux de distribution ont principalement concentré les efforts de notre maison.

En 2010, l'échec français aux Émirats Arabes Unis fut particulièrement douloureux. Le Président de la République Nicolas Sarkozy a alors demandé à François Roussely de piloter une mission consacrée à l'avenir de l'énergie nucléaire civile et de proposer des orientations concrètes ainsi que d'éclairer les décisions que devrait prendre l'État vis-à-vis de la filière nucléaire. J'ai eu le privilège de participer à ces travaux et, après plus de 200 auditions, le rapport final a été remis en mai 2010 au Président de la République. Il est malheureusement classifié, mais une synthèse reprenant les quinze principales recommandations a été rendue publique en juin 2010. Il est notamment indiqué dans cette synthèse que la filière française est confrontée à un double défi à l'horizon 2030. Sur un plan national, il lui faudra mener à bien les chantiers des quelques nouvelles centrales, assurer le parfait fonctionnement du parc et préparer la prolongation de la durée de vie des centrales actuelles au-delà de 40 ans. À nouveau, l'ancien Président revient sur son obsession, à savoir planifier une hausse modérée mais régulière des tarifs de l'électricité en euros constants afin de permettre la préparation du financement du renouvellement du parc à long terme. Malgré la catastrophe de Fukushima survenue moins d'un an après la publication du rapport, ces propos semblent toujours d'une très grande actualité. À travers son rapport, François Roussely appelait à la nécessaire réorganisation de la filière française, dans laquelle EDF jouerait un rôle d'architecte ensemblier. Il souligne également l'impérieuse nécessité d'insuffler une nouvelle dynamique au lien stratégique entre EDF, Areva et la fédération des PME autour des champions nationaux. Depuis 2016, Framatome, composante de l'ex-Areva, a rejoint le Groupe EDF et le Groupement des industriels français de l'énergie nucléaire (GIFEN) contribue maintenant à la mobilisation de la filière.

À travers ce rapport, François Roussely évoquait également l'extension de fonctionnement des centrales à 60 ans en toute sûreté. La prolongation de la durée d'exploitation des centrales existantes au-delà de 40 ans est l'objet du programme grand carénage, engagé depuis 2014 par EDF.

Enfin, le rapport abordait les questions de formation et de gestion des ressources humaines de la filière nucléaire française. La mission avait en effet proposé d'engager un plan national de développement des compétences pour mobiliser tous les acteurs. Cependant, si des actions ont été entreprises après 2010, notamment grâce au comité stratégique de la filière, elles n'ont pas été à la hauteur des enjeux. La catastrophe de Fukushima et les choix politiques nationaux ont certainement contribué à freiner la dynamique espérée.

En 2017, j'ai retrouvé le groupe EDF, d'abord comme directeur en charge de la stratégie, de l'innovation et de la responsabilité d'entreprise. Les conséquences de la catastrophe de Fukushima étaient alors tout à fait concrètes sur la vie du groupe. En effet, des améliorations avaient été mises en place à l'initiative de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ou d'EDF elle-même et une nouvelle alimentation électrique avait été mise en œuvre avec les diésels d'ultime secours, de même qu'une nouvelle source froide, et la force d'action rapide du nucléaire avait été constituée. L'état d'esprit s'était également modifié : j'avais quitté l'entreprise dans une situation de renaissance du nucléaire et j'y suis revenu dans une vision de décroissance inéluctable du nucléaire français. Cette vision était notamment alimentée par une perte de confiance des leaders d'opinion dans l'avenir du nucléaire dès 2012. À la demande de Jean-Bernard Lévy, je me suis consacré à la préparation des contributions d'EDF à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), alors en cours d'élaboration pour la période 2019-2028. Cette PPE a finalement été adoptée le 21 avril 2020. Le cahier d'acteurs établi à l'époque avait pour ambition de faire d'EDF l'opérateur national de la transition énergétique vers un monde décarboné, prenant en compte les ENR. Par ailleurs, la capacité à disposer en temps voulu des gigawattheures nécessaires en France suppose d'opérer des choix quant au développement de nouvelles capacités nucléaires.

J'exerce maintenant la fonction de directeur exécutif du groupe EDF en charge de la direction du parc nucléaire et thermique depuis trois ans et demi. Il m'est revenu, parmi mes premières actions, de mettre en œuvre la décision de fermeture de Fessenheim. Le 30 septembre 2019, EDF a adressé la demande d'abrogation d'exploiter ainsi que la déclaration de mise à l'arrêt définitif des deux réacteurs de la centrale à la ministre de la transition écologique et solidaire ainsi qu'à l'ASN. Le premier réacteur a ensuite été arrêté le 22 février 2020, tandis que le second a été arrêté le 30 juin 2020. Dans un contexte rendu particulièrement complexe par la pression externe et la crise sanitaire, tous les salariés de Fessenheim ont eu à cœur de démontrer leur capacité à exploiter de manière performante et en toute sûreté la centrale jusqu'à la dernière minute. Ils ont, de cette manière, témoigné de la haute conscience professionnelle qui les animait et je les en remercie.

Les priorités de la direction que j'anime depuis 2019 visent toutes le même objectif pour le parc en exploitation, à savoir assurer aujourd'hui comme demain la meilleure disponibilité possible des centrales françaises en toute sûreté. Nous avons engagé le programme Start 2025, qui constitue un plan de transformation ambitieux et entièrement dédié à la maîtrise des durées d'arrêt de réacteurs, qui représentent un point primordial de la performance du parc de production nucléaire français Les premiers résultats sont encourageants mais les efforts doivent se poursuivre. Nous avons également lancé la deuxième phase du grand carénage, qui vise la prolongation de la durée d'exploitation des réacteurs existants. Pour sécuriser ce programme industriel d'un coût d'environ 33 milliards d'euros courants pour la période 2022-2028, nous portons une attention toute particulière à l'organisation industrielle. J'ai d'ailleurs réuni, dans le réseau Cap Ten (« ten » pour décennal), des industriels partenaires pour renforcer les liens, partager les savoir-faire et les pratiques, fournir une visibilité à long terme et créer les relations de confiance nécessaires.

La déclaration sur la politique énergétique nationale du Président de la République en février 2022 à Belfort a conforté notre volonté de prolonger la durée d'exploitation de nos réacteurs le plus longtemps possible et dans les meilleures conditions de sûreté. Nous n'ignorons pas, par ailleurs, que six réacteurs américains ont déjà reçu de leur autorité de sûreté une licence d'exploitation jusqu'à 80 ans de la part de leur autorité de sûreté. En outre, la crise sanitaire et les périodes de confinement ont entraîné une certaine désorganisation de la programmation et nous avons parfois dû allonger ou reporter des opérations de maintenance. Cependant, nous avons poursuivi nos activités en assurant la continuité du service public, l'approvisionnement en électricité étant plus que jamais stratégique pour le maintien de l'activité économique du pays ainsi que le bon fonctionnement du système de santé et de l'ensemble des services publics.

Un phénomène inédit, à savoir la corrosion sous contrainte des tuyauteries de circuits auxiliaires du circuit primaire, perturbe depuis plus d'un an le fonctionnement du parc nucléaire et pèse fortement sur sa disponibilité. Au-delà de la période initiale d'urgence qui a concentré toutes nos forces internes et externes, nous entrons dans une seconde phase qui consistera à réaliser des contrôles et réparations ainsi qu'à mener des actions de recherche et de compréhension du phénomène. Tout ce travail sera d'ailleurs mené en parfaite cohérence avec les prescriptions de l'ASN. Ce programme de plusieurs années, présenté à l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, le 27 octobre dernier, lors d'une audition publique, s'ouvre devant nous et je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.

La question des compétences est évidemment centrale et elle est au cœur du dernier rapport commandé par le gouvernement à MM. d'Escatha et Collet-Billon. Alors que la filière emploie environ 220 000 personnes, nos effectifs devraient atteindre près de 300 000 personnes en 2030 pour mettre en place le programme de Belfort. En prenant en compte les départs naturels, le secteur nucléaire devrait procéder à environ 150 000 nouveaux recrutements. Cependant, des difficultés de recrutement sont rencontrées en lien avec la désindustrialisation du pays et avec la désaffection des jeunes pour les métiers techniques et du nucléaire. Par conséquent, nous nous sommes engagés, avec la filière, dans un plan de grande ampleur afin de former de nouveaux collaborateurs, de développer l'attractivité de nos métiers et de convaincre les jeunes et moins jeunes diplômés de nous rejoindre. Les efforts doivent permettre de faire évoluer la perception des futurs salariés ainsi que celles de leurs parents et de leurs enseignants. L'université des métiers du nucléaire, créée l'an dernier, a vocation à porter cet élan et les fondements posés par celle-ci dans les territoires, avec le réseau académique, le tissu industriel et les pouvoirs publics, représentent de formidables atouts. Je suis convaincu que nous trouverons les clés du renouveau en travaillant là où nos projets se déploient.

En conclusion, la poursuite de l'aventure du nucléaire civil passe par un grand projet national associant toutes les parties prenantes afin de relever les grands défis à venir collectivement, qu'ils soient humains, industriels ou financiers. La volonté et le soutien de l'État, de la représentation nationale et des élus locaux seront naturellement déterminants, de même que la mobilisation des acteurs de la filière ainsi que de l'éducation et de la formation. J'insiste enfin sur la nécessité de veiller à ce que les décisions prises s'inscrivent dans le temps long. La programmation et la persévérance constituent en effet les deux conditions sine qua non de notre réussite collective dans la durée. Le nucléaire civil est bien au cœur des enjeux de souveraineté nationale et d'indépendance énergétique, ce pour quoi je vous remercie à nouveau d'avoir pris l'initiative de cette commission ainsi que de m'avoir invité aujourd'hui.

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