Intervention de Jean-François Ricard

Réunion du mercredi 1er février 2023 à 14h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de l'administration pénitentiaire et de l'appareil judiciaire ayant conduit à l'assassinat d'un détenu le 2 mars 2022 à la maison centrale d'arles

Jean-François Ricard, procureur de la République antiterroriste :

J'aimerais vous apporter une réponse satisfaisante en tout point et vous dire que la totalité des détenus libérés après avoir été condamnés pour des faits de terrorisme feront l'objet d'un suivi de longue durée, adapté et permettant de s'assurer de l'absence de récidive, mais je mentirais. Les différentes mesures pouvant être prononcées soit ab initio, soit peu avant la remise en liberté sont évidemment insuffisantes, mais nous faisons avec les moyens disponibles et selon la loi en vigueur.

En l'espèce, la remise en liberté de M. Elong Abé avait commencé à être préparée par nos soins. Pour rappel, les QER permettent une orientation pénitentiaire et pas principalement l'accompagnement une fois l'intéressé remis en liberté. Différentes mesures existent. Pour M. Elong Abé, seule une mesure pouvait réellement être mise en œuvre : la surveillance judiciaire, possible dès lors que l'intéressé a été condamné à une peine d'au moins sept ans. Prévue aux articles 723-29 et suivants du code de procédure pénale, elle prévoit un certain nombre d'interdictions et d'obligations une fois que l'intéressé a recouvré la liberté : interdiction de fréquentation, obligation de travail, de suivi des soins, etc. Ce contrôle a ses limites, je n'en disconviens pas. Cette disposition exige d'abord une mesure d'expertise médicale concluant à la dangerosité du condamné et à un risque de récidive. En ce qui concerne M. Elong Abé, ce mécanisme, qui se met en place environ deux ans avant la libération, avait déjà été lancé. Dès le 15 décembre 2021, nous avions requis du JAP de bien vouloir ordonner une expertise psychiatrique au bénéfice de M. Elong Abé en vue d'apprécier sa dangerosité et le risque de récidive qu'il portait. Ce n'est pas la décision de QER qui permet la surveillance judiciaire, mais cette expertise et uniquement celle-ci. Afin d'éviter toute sortie sèche, qui est notre obsession, l'expertise aurait dû être menée dans les trois à six mois puis complétée par différents rapports de l'administration pénitentiaire et du SPIP sur l'évolution du condamné.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion