Intervention de Gabriel Attal

Réunion du jeudi 7 juillet 2022 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gabriel Attal, ministre délégué :

Monsieur Lefèvre, nous avons été précurseurs, à l'échelle mondiale, en adoptant un budget vert pour apprécier les effets sur l'environnement de nos dépenses. En 2021, les dépenses « vertes » s'élèvent à 28 milliards d'euros tandis que les « brunes » s'établissent à 3 milliards. D'autres dépenses sont considérées comme mixtes ou intermédiaires. Notre objectif est de réduire les dépenses fiscales brunes, même si certaines des mesures de soutien au pouvoir d'achat des Français que nous prendrons, par exemple pour alléger les dépenses de carburant, relèvent de cette catégorie.

Monsieur Tanguy, je ne comprends pas votre reproche. Nous n'avons pas inventé le covid ! Nous ne sommes pas à l'origine de l'épidémie la plus grave depuis un siècle et de ses conséquences pour l'économie mondiale ! Nous avons fait au mieux dans un contexte extrêmement dégradé. Le prix Nobel d'économie Paul Krugman a lui-même salué la politique que nous avons menée.

Vous nous reprochez de mener des politiques superficielles : je ne crois pas que les artisans, les commerçants, les entrepreneurs, les salariés, les Français qui ont bénéficié du plan d'urgence et du plan de relance partagent cet avis. Vous évoquez le début du quinquennat de François Hollande, mais ce n'est pas à la situation de 2012 qu'il faut comparer ce que nous vivons, mais à celle de 2008. Notre réponse à la crise a été plus efficace que celle de l'époque.

Vous considérez que notre action n'a servi à rien, si ce n'est à dégrader les finances publiques. Le Centre pour la recherche économique et ses applications (CEPREMAP) estime pourtant que la dette publique accumulée aurait été dix fois supérieure sans les mesures du « quoi qu'il en coûte » et du plan de relance – c'est une façon de répondre à M. Lecamp qui se demandait ce qui serait arrivé si l'on n'avait rien fait. Accompagner des millions de personnes au chômage coûte plus cher que de soutenir les entreprises pour leur permettre de conserver leurs emplois. Accompagner des centaines de milliers d'entreprises en faillite coûte plus cher que de les aider à tenir pendant la crise. Le « quoi qu'il en coûte » a été un investissement : il nous a évité des dépenses considérables pour l'avenir.

Monsieur Rome, plusieurs des questions que vous avez posées relèvent davantage du PLFR pour 2022. Je noterai seulement, pour l'heure, qu'on ne peut pas parler de cagnotte quand on a 2 800 milliards d'euros de dettes. Les recettes ont certes augmenté, du fait de la reprise économique, mais cela ne fait pas une « cagnotte », hélas. Ce que nous avons, ce sont des recettes et des dépenses, et des choix politiques à faire afin de protéger au mieux les Français, non seulement aujourd'hui, mais aussi demain, en réduisant notre déficit. Cela implique des arbitrages difficiles, mais nécessaires.

Plusieurs d'entre vous m'ont demandé pourquoi nous présentions ce projet de loi de règlement plus tard que ce que prévoit la nouvelle loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, que l'on doit à Laurent Saint-Martin. Il est vrai que, ces dernières années, le projet de loi de règlement était déposé au moment du Printemps de l'évaluation, mais je vous rappelle que celui-ci n'a pas eu lieu cette année du fait du renouvellement de l'Assemblée nationale. Nous avons attendu que la nouvelle assemblée soit élue pour déposer ce projet de loi – sinon, nous aurions dû le déposer deux fois. Enfin, nous attendions de recevoir de l'INSEE le solde final de la croissance constatée en 2021, qui nous est parvenu le 31 mai.

S'agissant des cabinets de conseil, je rappelle que le Gouvernement a pris l'engagement d'annexer à chaque projet de loi de finances un rapport relatif à cette question. Ce sera le cas dès cette année : tous les chiffres vous seront transmis dans le PLF pour 2023.

Monsieur Jolivet, je vous remercie de votre intervention. Nous partageons l'objectif d'une réduction des déficits.

Madame Sas, MaPrimeRénov' est un dispositif remarquable qui vise à soutenir la rénovation énergétique des logements privés. C'est une bonne chose pour l'environnement puisque cela réduit la consommation d'énergie, et pour le pouvoir d'achat des Français qui est notre priorité à tous. Les chiffres sont bons : en 2021, environ 764 000 demandes d'aides ont été déposées auprès de l'Agence nationale de l'habitat ; plus de 658 000 dossiers ont été instruits et ont reçu une suite favorable, pour un montant total de primes attribuées de 2,1 milliards d'euros. Plus de 372 000 ménages ayant achevé leurs travaux ont perçu une prime en 2021, pour un montant total de 1,1 milliard d'euros. Les ménages aux revenus très modestes et modestes représentent 68 % des primes attribuées en 2021.

L'écart entre le niveau d'engagement et celui des décaissements a des causes diverses. Il est vrai que le traitement des dossiers peut être amélioré, mais il ne faut pas négliger non plus les difficultés d'approvisionnement dans le secteur du bâtiment. Je ne veux pas marcher sur les plates-bandes de mes collègues Agnès Pannier-Runacher et Christophe Béchu, chargés de l'écologie, mais je pense que le dispositif devrait être recalibré pour bénéficier davantage à des projets de rénovation globale, afin de lutter contre les passoires thermiques.

Monsieur Sansu, vous avez suggéré de créer une taxe sur la surépargne, mais je vous rappelle que nous nous sommes engagés à ne pas augmenter les impôts et à ne pas créer de nouvelles taxes. Permettez-moi de renvoyer le débat au sujet de la CVAE à l'examen du projet de loi de finances pour 2023. Nous garantissons et garantirons évidemment une compensation aux collectivités locales, comme nous l'avons fait au moment de la suppression de la taxe d'habitation.

Monsieur de Courson, à propos de la déclaration de M. Bruno Le Maire, outre qu'en tant que ministre délégué, je suis d'accord par principe avec l'intégralité des propos de mon ministre de tutelle, il est évident que notre situation financière et budgétaire est tendue. Avec la remontée des taux, on a changé de monde : emprunter à 0,3 ou 0,4 %, comme c'était le cas il y a encore quelques mois, n'est pas la même chose qu'emprunter à 2 %. Cela n'a pas le même impact sur la charge de la dette, d'autant qu'elle est en partie indexée sur l'inflation mondiale. Cette question se posera largement à propos du PLFR pour 2022.

À propos du déficit structurel, comme je l'ai indiqué au rapporteur général, les indicateurs retenus sont en partie ceux de la loi de programmation des finances publiques, et c'est avec la nouvelle loi de programmation des finances publiques que nous pourrons faire de vraies comparaisons. Nous avons creusé virtuellement notre déficit structurel en qualifiant de dépenses pérennes des mesures de soutien aux entreprises réalisées dans le cadre du « quoi qu'il en coûte ». Ces mesures sont en réalité temporaires, mais par souci de sincérité, nous reconnaissons que c'est un temporaire qui dure un peu.

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