Intervention de Laurence Cristol

Séance en hémicycle du mardi 11 avril 2023 à 21h30
Garantir le respect du droit à l'image des enfants — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Cristol, rapporteure de la commission des affaires sociales :

La proposition de loi (PPL) dont je suis corapporteure est le fruit d'un travail collectif de la majorité à laquelle j'appartiens. En propos liminaire, je tiens particulièrement à remercier Astrid Panosyan-Bouvet, qui a assuré la coordination de l'écriture du texte, et la présidente de la commission des affaires sociales, pour son indéfectible soutien.

Nous savons que les attentes sont fortes, tant du côté des personnes âgées et de leur famille que du côté des professionnels. Et nous avons ici l'opportunité de transformer un certain nombre de ces attentes en actes. Inversement, certains ont tout à fait le droit de penser qu'il n'y a aucune nécessité à agir dès aujourd'hui face aux inquiétudes. Mais évitons un malentendu : le présent texte n'est pas un projet de loi gouvernemental et n'épuisera pas tous les sujets. En particulier, nous n'aborderons pas les deux points essentiels que pourrait traiter un projet de loi, à commencer par la gouvernance qui – nous en convenons tous – doit être renouvelée. Cependant, force est de constater que les différentes parties prenantes ne sont pas d'accord. Il nous faudra donc aller chercher un consensus. Le Gouvernement s'y est engagé.

Deuxième point essentiel : le financement. Il nous faut en effet trouver 10 milliards d'euros par an d'ici à 2030.

Nombreux sont nos collègues qui sont singulièrement engagés sur le sujet depuis de nombreuses années – nul ne le minimise. Personnellement, ayant été gériatre et élue locale avant de vous rejoindre, j'ai consacré ma vie entière aux personnes âgées. Je connais leurs parcours, les difficultés de leurs aidants et l'importance des professionnels qui les accompagnent. Je sais qu'elles trouveront dans ce texte un nombre certain d'avancées concrètes.

Se préoccuper de la vie des personnes âgées exige une condition première : s'assurer du développement d'une politique plus ambitieuse de la prévention de la perte d'autonomie. L'espérance de vie en bonne santé des Français est aujourd'hui inférieure à la moyenne européenne : cela n'est pas acceptable pour un pays comme le nôtre. Nous pouvons agir face à ce constat. La perte d'autonomie est un phénomène complexe, lié à une diversité de facteurs, mais elle peut être souvent prévenue, limitée, ou retardée. Reste que les initiatives récentes sont à la fois trop peu ambitieuses et insuffisamment coordonnées.

En effet, la création des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie par la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, dite loi ASV, est une avancée indéniable. Toutefois, la prévention de la perte d'autonomie manque d'une impulsion nationale et mérite d'être mieux coordonnée sur l'ensemble du territoire. C'est pourquoi l'article 1er vise à mettre en place une stratégie ambitieuse de prévention de la perte d'autonomie, coordonnée aux niveaux national et territorial. Il crée la conférence nationale de l'autonomie chargée d'assurer la cohérence de l'action des conférences des financeurs, en définissant notamment des axes stratégiques qui seront déclinés à l'échelon territorial. Cet article essentiel a été utilement enrichi par plusieurs amendements venant de différents groupes.

Le parcours des personnes en perte d'autonomie, c'est un parcours du combattant pour effectuer des démarches et obtenir des droits dans le maquis institutionnel que nous connaissons. Malgré des coordinations et des initiatives locales, que je salue, rappelons que les personnes âgées et leurs aidants s'inscrivent le plus souvent dans un parcours fait de fragilités, voire de ruptures. La mise en place d'un service public territorial de l'autonomie, qui a été annoncée par le Gouvernement et sera défendue par ce texte, est donc particulièrement attendue.

Le parcours des personnes en perte d'autonomie, c'est ensuite un isolement important, lequel ne permet pas toujours de repérer leur vulnérabilité. Aussi, l'article 2 a pour objet de renforcer la lutte contre l'isolement social des personnes vulnérables, qui constitue un véritable fléau, en permettant aux services sociaux et sanitaires de disposer plus facilement des données permettant le repérage des personnes âgées ou en situation de handicap isolées. Nous sommes en outre plusieurs à défendre un amendement qui me tient particulièrement à cœur, visant à la généralisation du programme Icope – soins intégrés pour les personnes âgées – de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui permet le dépistage précoce et le repérage des fragilités chez les personnes de plus de 60 ans. Amplifier le « aller vers » : voilà encore une attente à laquelle ce texte répond.

Le parcours des personnes en perte d'autonomie, c'est enfin des difficultés quant à l'égal accès à l'hébergement. L'article 9 supprime l'obligation alimentaire pour les petits-enfants dans le cadre de l'aide sociale à l'hébergement (ASH). En effet, il est important que le lien familial puisse rester avant tout un lien privilégié d'affection et de transmission, à l'abri des difficultés financières. L'article 10 prévoit par ailleurs que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le bilan de l'ASH, qui devrait permettre d'expliquer pourquoi il n'y est que peu recouru et d'identifier la manière dont cette aide pourrait être renforcée.

Le développement de nouvelles formes d'habitat alternatif dépassant le caractère binaire de l'offre, séparée entre le logement autonome et la prise en charge en établissement, constitue le dernier enjeu du texte. L'habitat inclusif, qui permet à des personnes âgées ou en situation de handicap de bénéficier d'un mode d'habitation regroupé, entre elles ou avec d'autres personnes, assorti d'un projet de vie sociale et d'un accompagnement, est un modèle de plus en plus plébiscité. L'article 13 de la présente proposition de loi vise à promouvoir ce modèle en rendant effectif le déploiement de l'habitat inclusif dans le parc social.

Chers collègues, encore une fois, le texte que nous vous proposons n'est qu'une étape, mais celle-ci est indispensable à la construction d'une politique du bien vieillir et pour répondre au défi de la transition démographique. Notre assemblée ne peut rester silencieuse face aux attentes très fortes des personnes concernées, de leur famille et des acteurs de terrain.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion