Intervention de Anne Le Hénanff

Réunion du mercredi 31 mai 2023 à 9h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne Le Hénanff :

La proposition de loi que nous examinons ce matin, présentée par nos collègues Paul Molac et Erwan Balanant et cosignée par presque tous les députés bretons, vise à créer la possibilité d'une consultation des électeurs d'un département pour le choix de la région à laquelle ils souhaiteraient administrativement appartenir. Si le dispositif est écrit en termes généraux et pourrait donc s'appliquer à l'ensemble des départements métropolitains, il répond en réalité à une demande spécifique et maintes fois exprimée ces dernières années, à savoir le rattachement du département de la Loire-Atlantique à la région Bretagne, ce que d'aucuns nomment « réunification de la Bretagne ».

La question n'est pas nouvelle, puisqu'elle soulève des débats depuis la création des régions administratives, en 1956. Détachée de la Bretagne par le décret du 30 juin 1941 signé par le maréchal Pétain, la Loire-Atlantique n'en a plus jamais fait partie administrativement. Historiquement, elle était pourtant incluse, depuis le traité d'Angers en 851, dans le royaume puis le duché de Bretagne. La résidence principale des ducs de Bretagne était même située à Nantes.

La loi du 16 janvier 2015, dont est issu le découpage territorial actuel, a suivi une logique de réduction du nombre de régions, sans redécoupage à l'échelon départemental et sans concertation avec les collectivités locales, ni avec les habitants. Elle prévoyait toutefois un droit d'option permettant aux départements qui le souhaiteraient de changer de région dans un délai de trois ans. Ce droit n'a jamais été utilisé, faute d'être applicable, les départements souhaitant quitter une région pour une autre devant obtenir l'accord de la région de départ.

De nombreux sondages réalisés depuis les années 1980 montrent une réelle volonté populaire de rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Plus récemment, en 2018, une pétition appelant le département de la Loire-Atlantique à organiser une consultation populaire sur la question a réuni 105 000 signatures, soit 10 % du corps électoral. Les collectivités locales se sont également saisies de la question, relayant l'attente des habitants. Depuis 2020, les villes de Nantes, Rennes, Brest, Vannes, Saint-Brieuc, Saint-Nazaire et plus de vingt autres ont adopté des vœux demandant à l'État d'engager le processus permettant de donner suite à cette demande citoyenne. Le conseil régional de Bretagne a adopté à l'unanimité le même vœu en octobre 2021.

S'il revient au législateur de déterminer les limites territoriales des régions, il nous paraît important qu'une véritable consultation des habitants de Loire-Atlantique ait lieu afin qu'ils puissent s'exprimer et choisir eux-mêmes la région à laquelle ils souhaitent appartenir. Dans l'hypothèse d'un résultat favorable, il reviendra au législateur de se prononcer sur cette demande.

Le présent texte résulte d'une démarche collective et transpartisane. J'entends néanmoins les interrogations et les inquiétudes qu'il peut susciter, y compris au sein de mon groupe, sur le plan constitutionnel, ainsi que concernant la pertinence d'inscrire dans la loi un dispositif général pour régler une situation particulière. C'est cependant le moyen que les cosignataires de la proposition de loi ont trouvé pour permettre la consultation des habitants de Loire-Atlantique. Jean-Charles Larsonneur, Thierry Benoit et moi-même y sommes favorables. Nous laisserons les autres membres du groupe décider en leur âme et conscience si la Bretagne peut retrouver la Loire-Atlantique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion