Intervention de Thierry Breton

Réunion du jeudi 1er juin 2023 à 9h00
Commission des affaires européennes

Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur :

J'étudierai cela plus en détail. Vous avez appelé mon intérêt et mon attention, je vous en remercie.

En ce qui concerne la souveraineté en matière de médicaments, la Commission vient de proposer un nouveau « paquet législatif » relatif à l'industrie de la santé, qui va dans le sens que vous indiquiez. Certains acteurs demandent un Pharm Act, à l'instar du Chips Act ou du Cleantech Act ; ce serait peut-être pertinent. Il s'agirait de définir quels investissements particuliers, quels types de substrats, de composants et de souches il faudrait développer en Europe pour avoir une plus grande maîtrise – vous avez parlé de certains composants antibiotiques et du Doliprane. Un projet d'intérêt européen commun (Piiec) sur la santé est également en préparation afin d'accroître nos capacités dans des domaines spécifiques. Il sera soutenu par des fonds publics. La grande question est de savoir si nous irons jusqu'à proposer un Pharm Act : elle est en discussion au sein de la Commission, je ne veux pas m'avancer davantage, mais le sujet est bien sur la table.

J'ai bien conscience du problème de la juste contribution aux réseaux télécoms – je connais un peu le sujet, comme vous le savez –, mais il nous a semblé nécessaire de le traiter dans une acception élargie. Comme nous le faisons systématiquement avant de proposer un texte, nous avons procédé à une très large consultation sur les objectifs dits « de la décennie numérique » fixés par nos colégislateurs, qui déclinent l'ambition numérique du continent européen à l'horizon 2030 : la connectivité pour tous, l'accès large bande, le déploiement de services par la 5G pour traiter l'émergence d'un volume considérable de données industrielles, en particulier dans le Data Act, le développement de la 6G, le réseau virtuel, l'intégration dans les réseaux de supercalculateurs – le edge – afin de disposer de capacités de traitement et d'un stockage de données massif, au plus près des utilisateurs.

Il s'agit d'un changement radical, qui se traduira par le passage d'un réseau ne véhiculant que des flux à des réseaux dimensionnés par rapport aux usages parce que les volumes seront si lourds que nombre d'entre eux seront résidents. Par exemple, un hôpital a besoin de données de santé qu'il vaudra mieux localiser plutôt que de les transférer tous les soirs dans un cloud ; un constructeur automobile aura tous les jours besoin de retours de données d'usage, qu'il sera plus utile de stocker au plus près des services utilisateurs qu'à 10 000 kilomètres.

C'est dans cette nouvelle configuration des réseaux, y compris satellitaires, que nous avons voulu nous placer, plutôt que dans la vision d'une régularisation datant de l'époque où il fallait forcer les opérateurs historiques à ouvrir leurs réseaux de cuivre, quand bien même ceux-ci ont été remplacés par le haut débit, la fibre et le satellitaire. À l'issue de cette consultation, qui est en cours, il faudra chiffrer tout cela, évoquer les contributions publiques ou privées et savoir comment rémunérer les investissements, qui seront considérables. Là se posera la question de la participation des plateformes, qui sont les grands utilisateurs.

Nous venons d'achever la consultation ; nous la dépouillerons au cours de l'été. Je me rendrai demain à Luxembourg pour commencer à évoquer le sujet avec le conseil des ministres télécoms. Après le dépouillement, nous rendrons publiques les premières pistes – certainement au cours du second semestre – et nous étudierons les propositions pour aller dans le sens que vous évoquez. Le sujet est essentiel pour notre autonomie et le futur européen. Il nécessitera des investissements considérables en matière d'infrastructures numériques, de câbles, de sécurité des câbles sous-marins, sans parler des questions de cybersécurité qui interviennent à tous les niveaux de la constitution des réseaux. Il est temps de savoir si notre régulation actuelle du secteur répond à ces défis.

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