Ce débat s'ouvre dans un contexte douloureux, alors que nos pensées vont au jeune Nahel, mort à 17 ans, mais également aux forces de police et de gendarmerie ainsi qu'aux maires, ces élus de proximité, qui nous rappellent le caractère essentiel de celle-ci – peut-être est-ce la leçon à tirer des événements actuels. Elle serait du reste aussi valable pour la justice, dont l'indépendance ne doit pas entraîner l'indifférence aux territoires.
En guise de préambule à l'examen de ces textes, je rappellerai que pour 73 % des Français, la justice fonctionne mal. Une telle défiance est alarmante : la justice doit retrouver la confiance démocratique, d'autant que sa fragilité peut en faire le cheval de Troie d'un exécutif épris d'autoritarisme – les régimes polonais et hongrois le démontrent en sévissant contre les minorités et en bafouant les principes constitutifs de l'État de droit. Notre rôle de législateur consiste ici à engager la justice dans la voie d'une réforme systémique et à conserver l'équilibre entre son indépendance et les moyens qu'elle requiert pour accomplir sa mission. Nous devons aussi nous interroger au sujet de l'intelligence artificielle, de la justice digitale, de l'informatisation du droit, qui modifient l'élaboration de la loi. Il s'agit de nous donner les moyens de dessiner le chemin que suivra la justice dans ce nouvel univers. Quel est, monsieur le ministre, l'engagement du Gouvernement sur ce point ?
S'agissant du projet de loi organique, qui tend à ouvrir de nouvelles voies d'accès à la magistrature, nous voulons vous convaincre d'y associer davantage les universitaires et de favoriser l'adoption, essentielle, des amendements de clarification concernant l'exercice de cette magistrature et la déontologie ; sous réserve de ces avancées, le texte est plutôt bon. S'agissant du projet de loi, il convient de saluer la majoration des crédits ; le texte contient également une habilitation du Gouvernement à réécrire par voie d'ordonnance la partie législative du code de procédure pénale, cependant que le rapport annexé concentre nos insatisfactions et nos espérances, canalise nos frustrations.