Intervention de Ugo Bernalicis

Séance en hémicycle du jeudi 6 juillet 2023 à 9h00
Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027 — Après l'article 3

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaUgo Bernalicis :

Notre amendement ne prévoit pas seulement que le JLD doit motiver sa décision d'un placement en détention provisoire – car nous savons tous bien sûr que c'est déjà le cas – mais aussi qu'il doit démontrer qu'elle est préférable aux autres mesures possibles.

Si de nombreux magistrats ont recours à la détention provisoire alors qu'ils sont conscients du problème de surpopulation carcérale, c'est tout d'abord parce que, d'un point de vue matériel, c'est la mesure la plus simple à prendre pour un juge présent à l'audience. Il suffit en effet d'envoyer la personne derrière les barreaux – les autres solutions demandent plus de travail, qu'il s'agisse de l'Arse – assignation à résidence avec surveillance électronique –, pour laquelle il faut mener des enquêtes de faisabilité, ou du contrôle judiciaire, dont il faut déterminer les modalités exactes ainsi que les obligations qui lui sont associées.

D'autre part – je vous répète ce que m'ont dit des magistrats –, c'est une façon de prévoir ceinture et bretelles. Car si le juge décide de ne pas envoyer le prévenu derrière les barreaux, celui-ci pourrait réitérer l'infraction. Voilà pourquoi de nombreux magistrats ne prennent plus le « risque » – je mets ici de gros guillemets – de considérer que la liberté doit rester la norme, y compris lorsqu'on est mis en cause, et ce au nom de la présomption d'innocence, principe que chacun aime à rappeler depuis plusieurs jours.

Certains magistrats craignent aussi que, si un drame se produit et qu'ils n'avaient pas décidé de placement en détention provisoire, une enquête de l'inspection générale de la justice ne leur tombe dessus pour vérifier qu'ils avaient bien pris les mesures qui convenaient. Les juges sont donc confrontés à une pression interne à l'institution ainsi qu'à une pression de la société – pour ne pas dire des médias.

Ne pourrait-on pas obliger les juges à motiver leur décision en expliquant pourquoi elle était préférable aux autres mesures possibles ? En d'autres termes, ne peut-on pas faire mieux que de se contenter de prononcer des mesures de détention provisoire qui mènent à la surpopulation carcérale que nous connaissons aujourd'hui ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion