Intervention de Anne Stambach-Terrenoir

Réunion du mercredi 27 juillet 2022 à 16h50
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne Stambach-Terrenoir :

Avec 40 000 hectares qui ont déjà brûlé en France en 2022, nous allons vers un sinistre record. Chaque forêt carbonisée est un rempart en moins face au réchauffement climatique, compte tenu du rôle indispensable que jouent les arbres dans le stockage du carbone.

Ces feux de forêt, ce sont aussi des populations évacuées – 36 750 personnes en Gironde –, des écosystèmes locaux bouleversés, une flore calcinée, des animaux sauvages intoxiqués, piégés par les flammes, et une microfaune dévastée.

Ce chaos et ce bilan tragique auraient pu être allégés si nous avions disposé de services publics renforcés. Nous payons malheureusement le double prix de l'inaction climatique et de l'affaiblissement continu de nos services publics – je pense en particulier à la sécurité civile et à l'ONF.

En Gironde, le Président de la République a salué, à juste titre, l'héroïsme des pompiers. Il a insisté sur le besoin de travailler à l'adaptation de la sécurité civile face au changement climatique. Mais il est tout de même dommage – tandis que nous apprenons le tragique décès d'un pompier en exercice – d'arriver après la bataille, avec des effets d'annonce, alors que tout indiquait que les incendies allaient se multiplier, en raison du réchauffement climatique.

On ne peut pas faire semblant de découvrir le manque de moyens quand les pompiers eux-mêmes nous alertent à ce sujet depuis des années. Lorsqu'ils se sont mobilisés, en 2019, pour dénoncer le manque d'effectifs et de reconnaissance, c'est à coups de grenades de désencerclement et de gaz lacrymogène qu'ils ont été accueillis.

Le Président de la République affirme que la France dispose de « la flotte la plus moderne d'Europe » pour lutter contre les incendies. Un rapport de la commission des finances du Sénat sur le projet de loi de finances pour 2022 considérait au contraire que le vieillissement de la flotte, en particulier des douze Canadair CL-415, constituait « un sérieux motif de préoccupation » – d'accord sur ce point avec les syndicats de la profession.

Soyons concrets : combien de pompiers allez-vous embaucher ? Combien de Canadair seront achetés, et quand ? Les annonces du Président de la République seront-elles transcrites dans le projet de loi de finances pour 2023 ?

En matière de gestion des forêts, le chef de l'État promet un grand chantier national, mais cette annonce intervient après trente ans de démantèlement méthodique de l'ONF, qui compte désormais un peu plus de 8 000 emplois, contre 15 000 en 1985. En juin 2021, on nous annonçait encore la suppression de 475 postes sur cinq ans. Comment concevoir que cet établissement public indispensable à la protection de nos forêts soit ainsi affaibli, d'année en année, alors même que s'aggravent les défis auxquels il doit faire face ?

Les conditions d'exercice de ses agents ne cessent de se dégrader. Au nom d'objectifs financiers, leur charge de travail s'alourdit et les surfaces à gérer sont de plus en plus étendues, ce qui provoque des souffrances professionnelles aux conséquences dramatiques. Depuis 2005, une cinquantaine d'entre eux se sont donné la mort.

Pouvez-vous nous confirmer qu'aucun emploi ne sera supprimé à l'ONF dans le projet de loi de finances pour 2023 ? Allez-vous, comme nous le demandons, créer de nouveaux postes pérennes de fonctionnaires, en réaffirmant le caractère public de l'établissement ?

Madame la secrétaire d'État, le pays brûle. On ne peut pas faire d'économies sur nos services publics au détriment de notre environnement. Il faut investir massivement et dans la durée. Une telle approche serait beaucoup plus efficace, sur les plans écologique, social et économique, que la politique court-termiste qui est la vôtre.

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