Intervention de Roland Lescure

Réunion du jeudi 1er juin 2023 à 8h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis, mesdames et messieurs les députés, je suis très heureux d'être présent avec vous pour participer à une initiative lancée en 2018 par l'Assemblée nationale pour enrichir le débat relatif à la loi de règlement par une démarche d'évaluation des politiques publiques. Cette démarche a été constitutionnalisée depuis la loi organique de modernisation des finances publiques de décembre 2021. L'ordre du jour de cette commission d'évaluation des politiques publiques est particulièrement riche, car nous allons évoquer l'exécution 2022 des missions Économie, Plan de relance, Plan d'urgence face à la crise sanitaire et Investir pour la France de 2030, missions qui peuvent apparaître hétérogènes, ce qui explique la richesse du banc de fonctionnaires que je souhaite saluer, et à travers eux, l'ensemble des fonctionnaires des ministères économiques et financiers qui concourent aux résultats de ces missions. Derrière ce champ large et qui peut apparaître hétérogène, il y a la volonté assumée du gouvernement d'agir sur tous les fronts, tant pour protéger les Français et les entreprises face aux crises que pour les accompagner et les soutenir dans leurs efforts quotidiens de développement, et enfin pour préparer la France de demain, que nous voulons championne dans tous les domaines.

Je reviens d'abord sur l'exécution budgétaire de la mission Économie, à l'exception du programme 367, qui fonctionne en miroir avec le compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État et que Gabriel Attal vous présentera dans le cadre de son audition de cet après-midi. Par rapport au total des ressources ouvertes en 2022, 67 % des crédits de paiement ont été exécutés, avec une hétérogénéité selon les programmes : 44 % pour le programme 134, Développement des entreprises et régulations, 99 % pour le programme 220, Statistiques et études économiques, l'Insee, 97 % pour le programme 305, Stratégies économiques, piloté par la direction générale du Trésor, et 79 % pour programme 343 dit Plan France très haut débit. Concernant le programme 134, sur l'ensemble des ressources ouvertes au cours de l'exercice 2022, il a consommé 47 % de ses crédits en autorisations d'engagement et 44 % de ses crédits en crédits de paiement. Les ressources ouvertes en cours d'exercice, pour 5,7 milliards d'euros en crédits de paiement, sont significativement supérieures aux crédits ouverts en loi de finances initiale (1,8 milliard d'euros). Cela est lié à la mobilisation du programme 134 dans la mise en œuvre du plan de résilience de l'économie pour faire face aux impacts de la guerre en Ukraine. Ce plan de résilience avait ouvert plus de trois milliards d'euros de crédits supplémentaires, par voie de décret d'avance et de loi de finances rectificative d'août 2022 pour deux dispositifs, le guichet d'aides aux PME du secteur des travaux publics affectées par la hausse du prix des intrants et un guichet d'aides aux entreprises dites énergo-intensive en 2022. Une très faible part de ces crédits a été consommée : 76 millions d'euros, soit à peine 2,5 %, ce qui explique l'essentiel de la sous-consommation de la mission Économie hors programme 367. Deux facteurs expliquent la sous-consommation : d'une part le contexte d'incertitudes et d'urgence et d'autre part des critères d'éligibilité initiaux qui se sont avérés trop restrictifs. Trois décrets d'application ont été pris afin d'assouplir et d'élargir les critères d'éligibilité. Ces modifications paramétriques produisent déjà des effets sur le rythme de consommation des crédits, puisque fin avril 2023, 3 000 demandes d'appui de la part d'entreprises ont été validées, avec plus de 300 millions d'euros décaissés. Nous commençons actuellement à verser les aides pour les factures de janvier et février 2023, qui ont été légèrement décalées par les opérateurs. La majeure partie du reliquat a donc été reportée sur l'exercice 2023 afin de poursuivre le financement des dispositifs du plan de résilience prorogés jusqu'au 31 décembre 2023.

Le programme 220, Statistiques et études économiques, recouvre quant à lui les moyens de fonctionnement et les emplois de l'Insee. Il a consommé 94 % de ses autorisations d'engagement et 95 % de ses crédits de paiement, hors dépenses de personnel. L'exécution budgétaire en 2022 a encore été perturbée par la crise sanitaire durant les premières semaines, avant de rejoindre la structure de dépenses pré-2019. S'agissant des emplois du programme, le taux d'exécution s'élève à 98,7 % pour le plafond d'emplois et à 99,8 % pour la masse salariale. Puisqu'il s'agit du thème retenu par le rapporteur spécial dans le cadre de cette audition, j'aurai l'occasion de revenir plus en détail sur l'actualité de l'Insee et sur les enjeux de politiques publiques dans lesquels elle s'inscrit.

Le programme 350, dit Stratégies économiques, porte les moyens de la direction générale du Trésor. Il finance aussi le traitement des situations de surendettement par la Banque de France, les moyens de l'Agence des participations de l'État et les crédits de l'économie sociale et solidaire. Sur l'ensemble des ressources ouvertes au cours de l'exercice 2022, le programme 305 a consommé 96,7 % de ses crédits en autorisations d'engagement et 97,2 % de ses crédits en crédits de paiement. Le taux de consommation du plafond d'emplois s'élève à 98,15 %. L'actualité de la direction générale du Trésor a été marquée en 2022 par la mobilisation du réseau international pour soutenir l'activité des entreprises françaises dans un contexte d'après-Covid et de conflits en Ukraine. La direction générale du Trésor a aussi joué un rôle de coordination au sein des ministères économiques et financiers dans le cadre de la Présidence française du Conseil de l'Union européenne au premier semestre. Elle a élaboré les positions françaises en vue des G7 et G20 finances et participé à la préparation de la COP 27.

Enfin, en ce qui concerne le programme 343, dit Plan France très haut débit, initié depuis 2013, il affiche trois jalons, le haut débit pour tous et pour toutes à partir de 2020, le très haut débit pour toutes et pour tous à partir de 2022 et la généralisation des déploiements des réseaux de fibre optique jusqu'à l'abonné d'ici fin 2025. Le programme est piloté par la direction générale des entreprises et depuis 2023, par l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), qui succède à la Caisse des dépôts et consignations. Le premier jalon, le haut débit pour tous, a déjà été atteint. L'objectif du très haut débit pour tous devrait être atteint grâce à un mélange technologique qui comprend de la fibre optique et des technologies hertziennes et satellitaires. 85 % des locaux sont éligibles au très haut débit au 31 décembre 2022. Sur l'exercice 2022, ce programme dit 343 a consommé 96,7 % de ses autorisations d'engagement et 79 % de ses crédits de paiement. La sous-consommation est surtout due à une actualisation à la baisse des demandes de financement des collectivités.

S'agissant de la mission Plan de relance, créée par la loi de finances initiale de 2021, celle-ci aura porté, au total, près de 40 % des moyens du plan de relance, qui atteignait dans son ensemble 100 milliards d'euros. Soulignons d'abord l'atteinte des objectifs que le Gouvernement a fixés pour France relance : le soutien à l'activité, la célérité du déploiement, notamment comparé à d'autres plans de relance précédents, le respect de l'enveloppe initiale de 100 milliards d'euros, la transparence et la lisibilité. Selon le dernier rapport de décembre 2022 du comité d'évaluation du plan de relance, l'objectif macroéconomique a été atteint. L'activité française a retrouvé son niveau d'avant-crise dès l'été 2022. C'est mieux que les autres pays de l'Union européenne. L'emploi au troisième trimestre 2022 est supérieur de 3,4 % au niveau de fin 2019. Le pouvoir d'achat est orienté plus favorablement qu'ailleurs et malgré la forte hausse de l'inflation en 2022, le pouvoir d'achat à la fin de l'année 2022 est au niveau qu'il avait avant la crise. Nous avons renforcé la résilience des entreprises, notamment des petites et moyennes entreprises (PME), avec une hausse du chiffre d'affaires des PME de 11,2 % par rapport à 2019 et un redressement du taux de marge et de leur rentabilité. France relance, ce sont plus de 6 000 projets de rénovation énergétique des bâtiments, une multiplication par six de la part des véhicules électriques et hybrides dans les ventes de véhicules neufs, des projets de décarbonation, ou encore des projets d'accroissement de capacité dans l'industrie. Nous avons également atteint un septième de l'objectif fixé par la stratégie nationale bas carbone 2 pour 2030. Évidemment, nous devons accélérer sur ce point. Nous avons vu des panneaux France relance émerger un peu partout dans les territoires. Nous pouvons être collectivement assez fiers du fait que la France a pu sortir de l'ornière de la Covid sans trop de heurts et avec de l'avance par rapport à ses principaux partenaires.

Les entreprises sont dans l'ensemble extrêmement favorables et admettent une grande satisfaction vis-à-vis de ce programme. Sur l'exercice 2022, la gestion s'est concentrée sur la finalisation des engagements puisque, notamment pour des raisons de règles européennes, le plan de relance devait être terminé dans les deux à trois ans suivant la crise. Il reste moins de 2 % des autorisations d'engagement prévues en loi de finances initiale. Ce niveau d'engagement est absolument exceptionnel.

S'agissant de la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire, qui s'est éteinte fin 2022, la loi de finances initiale de 2022 n'a procédé à aucune ouverture de crédit, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement. Pour quatre programmes sur les cinq que compte la mission, les dispositifs de soutien sont donc éteints.

Sur France 2030, le plan se déploie rapidement puisqu'au 30 avril 2023, 13,8 milliards d'euros ont été engagés, soit 25 % du total de 54 milliards d'euros. Ce programme se caractérise par la souplesse de gestion et la pluriannualité, qui permet un déploiement rapide. Pour rappel, France 2030 représente 54 milliards d'euros, dont 16,5 milliards d'euros issus de PIA4, 34 milliards d'euros ouverts en loi de finances initiale pour 2022, 3,2 milliards d'euros générés par les intérêts de dotations non consommables et des programmes d'investissement d'avenir PIA1 et 2.

En ce qui concerne le programme 424, Financement des investissements stratégiques, nous avons engagé 8,8 milliards d'euros sur les 40,4 milliards d'euros envisagés. Les taux d'engagement varient selon les actions : 43 % pour les programmes de recherche, 5 % pour l'industrialisation et le déploiement, qui prend bien entendu un peu plus de temps. Les programmes de batteries et de décarbonation des sites industriels ne déploieront pleinement leurs ailes qu'à partir de cette année et l'année prochaine. Vous avez vu des annonces récentes, concernant notamment des programmes de décarbonation des 50 sites les plus émetteurs, d'installation d'entreprises internationales sur le sol français, etc.

S'agissant du programme 425, Financement structurel des écosystèmes d'innovation, nous avons d'ores et déjà engagé 35 % des 10,1 milliards d'euros totaux envisagés d'ici 2030, soit 3,6 milliards d'euros au total pour France 2030. Fin avril, c'est près de 14 milliards d'euros qui ont été contractualisés.

D'ici la fin de l'année, nous aurons engagé la moitié des fonds du plan. Plus de 1 700 projets ont été soutenus au bénéfice de plus de 2 300 lauréats uniques, avec 17 000 nouvelles places de formation en 2022 et 24 000 en 2023. Vous savez que la formation et la transition des talents sont un élément essentiel de ce plan. 46 % des bénéficiaires du plan France 2030, à ce stade, sont de petites et moyennes entreprises. Il s'agissait d'un souci important de l'Assemblée nationale et de cette commission lors de la présentation du plan France 2030. 21 % sont au bénéfice des grandes entreprises et le reste au bénéfice des entreprises de taille intermédiaire. 60 % des fonds engagés sont hors Île-de-France et 40 % en Île-de-France. J'étais avec un certain nombre de parlementaires ainsi qu'avec le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et la ministre de la transition énergétique à Douvrin il y a deux jours, pour inaugurer une usine ACC qui va équiper 500 000 véhicules par an en batteries électriques. Il s'agit d'un succès impressionnant, y compris du point de vue de la capacité collective avec les élus de région et locaux à accélérer cette procédure afin de pouvoir, en deux ans, partir d'une demande d'autorisation d'installation et en arriver à l'inauguration de l'usine. Cette exception va devenir la règle et ce sera l'objet notamment du projet de loi industrie verte que j'aurai l'honneur de présenter devant cette assemblée avec Bruno Le Maire. Renault à Douai est un autre succès de France 2030 qui permettra de produire 400 000 véhicules électriques par an.

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