Intervention de Sylvain Waserman

Réunion du mercredi 28 juin 2023 à 9h40
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Sylvain Waserman :

Monsieur le président, c'est avec plaisir que je répondrai à votre invitation. J'irai même jusqu'à la solliciter si vous oubliez. Si vous me faites confiance et si vous me choisissez, et au-delà des engagements locaux que j'ai pris, rendre compte devant cette commission sera essentiel. Ce sera à vous de le décider, bien évidemment.

Madame Meynier-Millefert, merci pour ce point sur l'acceptabilité citoyenne et le rapport aux citoyens. J'ai travaillé et écrit au sujet des circuits courts entre les citoyens et la décision publique qui les concerne. Ils changent profondément le rôle de l'élu – c'est, en tout cas, la thèse que j'avance dans divers ouvrages. L'acceptabilité citoyenne de la transition écologique est un véritable sujet. Nous devons faire en sorte de ne pas créer de fracture entre ceux qui ont compris l'importance de la transition énergétique et ceux qui baisseraient les bras en ne se sentant pas concernés, en jugeant qu'elle est trop compliquée ou en considérant que leurs actions auraient peu d'incidence. Je n'ai pas de solution miracle. Vous avez une action déterminante à mener auprès des citoyens de votre territoire.

J'ai suivi les réunions de la Commission nationale du débat public (CNDP), et participé à certaines d'entre elles consacrées à la qualité de l'eau. Les citoyens veulent avoir leur mot à dire en la matière, comme pour toutes les décisions publiques qui les concernent. J'avais modélisé plusieurs schémas d'implication, allant jusqu'à la coconstruction. Si vous me confiez cette mission, je réfléchirai à la façon de m'en faire l'écho à l'Ademe.

Vous avez raison concernant l'efficacité carbone. Le risque serait d'entrer dans une comptabilité de court terme. Le point de blocage dans le développement et la généralisation de la géothermie de surface, par exemple, vient des forages. Il faut donc travailler avec les filières. C'est un investissement avec un retour de moyen terme. Malgré l'urgence, nous ne devons pas être aveuglés par le court terme, mais concilier l'urgence et la vitesse d'exécution pour ce qui fonctionne, quitte à aider des filières, et travailler l'expérimentation et l'innovation.

Grâce à mon travail récent et à mon expérience d'élu local, plus que de par mon parcours précédent, j'ai pu mesurer les enjeux des agences de l'eau. Développer le sujet prendrait trop de temps mais j'ai bien noté cet élément.

Monsieur Blairy, il faut en effet distinguer l'aspect partisan de l'aspect politique. Il est question de sujets politiques au sens noble du terme. J'ai été vice-président de cette institution et, à aucun moment, on n'a vu un aspect partisan dans mon comportement. Mon parcours atteste de mon approche transpartisane, plus que les propos banals que je pourrais tenir.

Je parlais d'alignement stratégique des acteurs avec les politiques publiques. C'était le cas quand je présidais une société d'économie mixte (SEM). Ces structures doivent être en phase avec les politiques publiques, chacun étant dans son rôle. C'est vous qui votez les budgets. L'exécutif et vous décidez, tandis que le rôle de l'Ademe est d'instruire, dans cette objectivité transpartisane et agnostique grâce à laquelle elle est reconnue. Peu importe l'avis de chacun, dans une démarche scientifique de construction d'un scénario. En outre, pour répondre à l'une des questions de M. le rapporteur, un scénario seul ne peut pas aboutir. Il faut trouver un juste chemin, une juste ligne de crête entre différents scénarios.

Monsieur Caron, vous avez raison de poser clairement les questions d'un éventuel recasage, de mon comportement dans ma vie personnelle, de mes actions pour l'environnement et de l'acceptabilité. Ingénieur de formation, j'ai toujours suivi une approche rationnelle. Par exemple, en tant que député, je n'ai cessé d'affirmer que la somme des objectifs figurant dans les schémas régionaux d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddet) n'était pas cohérente avec les objectifs nationaux de production d'ENR présents dans les programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE) que nous adoptions à Paris – sans que cela ne choque personne. J'ai mis ce sujet sur la table des dizaines de fois. Comment peut-on vivre avec un objectif national voté à Paris? Cette incohérence est corrigée dans la loi Énergie-Climat, qui instaure un dialogue dans le respect de la libre administration des régions.

Dans cette même logique, j'ai lutté contre l'hypocrisie qui a entouré les ceintures vertes durant des années. Par un sort de l'histoire, la loi prévoyait un taux maximal de 20 % de constructions dans ces zones, mais personne ne s'assurait qu'il était respecté. Je l'ai fait changer, contre l'avis d'élus locaux, pour imposer de rendre compte aux citoyens de la valeur de cette mesure. Certes, cela crée de l'instabilité juridique car le non-respect de ces 20 % peut donner lieu à des poursuites devant le tribunal administratif et à un rappel des obligations. Mais il faut sortir de ces sujets.

Le troisième amendement que j'ai défendu et qui a été validé concernait aussi des mesures et des indicateurs – en l'occurrence, l'obligation pour les grandes collectivités de publier leur taux d'achats responsables. J'ai vu des élus opter, pour des gymnases, pour des équipements chinois en dernier tour de table, contre une société française fabriquant en France, avec un petit delta de coût. C'est le choix souverain des élus, mais la moindre des choses est de rendre compte aux citoyens de la part d'achats responsables, dans les grandes métropoles du moins. Cette notion d'achats responsables est bien cernée dans le droit, désormais.

Mais, à mon humble avis, mon action majeure pour le développement durable et pour l'écologie est d'avoir écrit une loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte et d'en avoir été le rapporteur. Des élus de droite et de gauche se sont impliqués dans cette démarche, et j'ai travaillé tant avec M. Bernalicis qu'avec le président Marleix, aux deux extrêmes politiques de l'échiquier. Cette loi a été votée à l'unanimité en première lecture à l'Assemblée, parce que MM. Marleix et Bernalicis l'ont soutenue. Je crois ainsi avoir trouvé la juste ligne de crête. Il y a trois semaines, à la Sorbonne, il a été indiqué lors d'une table ronde que l'environnement est un domaine dans lequel ma loi apportera des avancées majeures. La culture de l'alerte et du signalement dans l'environnement est la brique que j'ai posée, en tant qu'auteur et rapporteur de cette proposition de loi. C'est cette contribution concrète que je mettrais en avant, en soulignant l'aspect transpartisan du travail que j'avais alors conduit.

Monsieur Vermorel-Marques, vous soulignez des points majeurs. Je crois à la notion d'objectivité dans le travail de l'Ademe. Chacun doit être à sa juste place. Le rôle de l'Ademe est d'écouter, d'ajuster et d'agir, dans le cadre des politiques publiques que vous décidez. Il faut le respecter : chacun doit être à sa juste place. Ceux qui m'ont connu dans mon mandat de parlementaire savent le respect que j'ai pour cette institution et pour les parlementaires, et qu'il n'est pas feint. Si vous me confiez cette responsabilité, je serai vigilant à ce que chacun soit à sa juste place, parce qu'il est essentiel que vous puissiez, quel que soit votre bord politique, vous reposer sur un tiers de confiance pour une étude sérieuse, argumentée et construite qui envisage des scénarios dans leur globalité. C'est essentiel pour la pérennité de l'Ademe et pour la relation de confiance que vous aurez avec elle.

Monsieur Ott, j'ai évoqué la loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte et l'enjeu de faire connaître. N'occultons pas le fait qu'il s'agit d'argent public, que le Parlement vote. La transparence est donc de mise.

Monsieur Delautrette, je sais votre attachement pour l'Ademe, lié à votre parcours personnel. Depuis l'annonce de ma candidature, j'ai eu écho des difficultés que vous évoquez concernant les ressources humaines. Nous manquons de modélisation. Plusieurs fois dans ma carrière, j'ai modélisé les ressources nécessaires à partir de facteurs dimensionnants. Certaines activités de l'Ademe sont des blocs de compétences fixes. Il n'est pas utile d'augmenter le nombre d'experts en géothermie en fonction du nombre de projets dans ce domaine, par exemple. En revanche, certaines activités ont un facteur dimensionnant en lien direct avec le flux. J'essaierai de convaincre que ces activités nécessitent une logique de ressources particulière lorsqu'un budget passe d'1 milliard à 4 milliards d'euros. En la matière, la boussole est la qualité des femmes et des hommes et l'expertise internationalement reconnue des « Ademiennes » et des « Ademiens ». Tous les responsables d'organisation et d'entreprise savent la difficulté à recruter. Il serait absurde de ne pas continuer à développer ce vivier de compétences, à ce niveau de reconnaissance.

S'agissant de la coordination des acteurs, j'ai pris un engagement clair.

Monsieur Thiébaut, vous savez mon attachement aux établissements publics de coopération communale (EPCI) et aux territoires. S'agissant de l'ingénierie locale, si les métropoles sont bien équipées, ce n'est pas le cas des EPCI et des réseaux d'assistance à maîtrise d'ouvrage. Je l'ai constaté avec les contrats de performance énergétique. À l'époque, ces réseaux n'étaient pas au niveau pour accompagner une petite collectivité dans la signature d'un contrat de performance énergétique. À nous, Ademe – si vous me confiez cette mission – de travailler aussi à leur animation.

Monsieur Thierry, j'ai non seulement vécu le changement de modèle que vous évoquez, mais je l'ai impulsé et piloté. Je le redis, depuis 150 ans, R-GDS ne faisait que du gaz naturel. Quand j'en suis parti, 30 % du chiffre d'affaires provenaient des réseaux de chaleur, du biométhane et des contrats de performance énergétique, et cette part est de 50 % aujourd'hui. J'ai considéré qu'en tant que filiale d'une collectivité, cet opérateur de l'énergie avait la charge de devenir acteur de la transition énergétique territoriale. En somme, je n'ai pas dirigé une entreprise de gaz pendant neuf ans : j'ai transformé une entreprise du « monde d'avant » en un pôle territorial de l'énergie. Ce que j'ai fait, l'industrie le vit aussi. Cette expérience me sera donc utile, si vous me faites confiance.

Monsieur Wulfranc, vous savez mon attachement à la dimension transpartisane. Bien sûr, je rendrai compte des engagements que je prends devant vous. Ceux qui me connaissent savent que je ne prends pas ce genre d'engagement à la légère !

Monsieur Bricout, vous évoquez le débat au sujet de la rénovation versus le bâti. Nous devons instaurer une culture du résultat. J'ai piloté des communautés de communes de 10 000 et de 40 000 habitants. Ce sont des petites structures, mais avec des gymnases, des mairies, des bâtiments pour lesquels il convient de trouver des solutions. Or elles n'ont pas l'expertise pour le faire. Pour autant, je crois qu'il ne faut pas se reposer sur d'autres qui agiraient pour elles. En l'occurrence, l'Ademe doit être un tiers de confiance. La décision publique d'un acteur local de rénover, de signer un contrat de performance énergétique, d'investir dans du bâti ou de décarboner sa source d'énergie nécessite une ingénierie. J'ai vu le réseau des 700 personnes financées par l'Ademe au cœur des collectivités. C'est un bon modèle, sous réserve d'animer correctement ce réseau – avec, par exemple, l'instauration d'une « journée Ademe » une à deux fois par an.

Pour finir, le principal sujet pour les collectivités est celui des modèles et des tiers de confiance. Nous manquons, par exemple, d'un cahier des charges type pour un contrat de performance énergétique, que chaque élu pourrait ensuite s'approprier. Certes, chaque territoire est spécifique. Mais un petit EPCI a d'abord besoin de solutions solides. L'Ademe a un rôle majeur à jouer en la matière. Si vous me faites confiance, je veillerai à ce que tel soit le cas.

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