Intervention de Aurélien Saintoul

Réunion du mardi 26 septembre 2023 à 17h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Saintoul :

Le format de l'audition ne nous convient pas. Trois commissions et trois ministres à interroger : toutes les questions ne pourront pas être posées, tous les députés ne pourront pas s'exprimer.

Nous ne sommes pas satisfaits, car l'extraversion du modèle, liée à la privatisation des industries de défense, entraîne une trop grande dépendance à l'exportation. J'ai un doute concernant notre capacité à reconstituer nos propres stocks lors de transferts d'armement, par exemple des avions. Qu'en sera-t-il réellement lorsqu'il s'agira de fournir l'Indonésie, la Croatie ou d'autres clients ?

Je m'interroge également sur les critères que nous appliquons.

En matière de droits humains et de respect du droit international, la plupart des clients de la France sont problématiques. La Chine, à qui nous vendons pour 70 millions de biens, fait l'objet d'un embargo partiel, dans lequel le commerce de biens susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne n'est pas interdit. Certes, le cadre international nous autorise à exporter mais dans quelle mesure pensons-nous être capables de contrôler l'avenir de ces biens d'exportation et leur utilisation contre les populations chinoises ou autres ?

D'autres de nos clients sont bien connus : l'Arabie Saoudite ; les pétromonarchies du Golfe, comme le Koweït et le Qatar classés respectivement cent onzième et cent quatorzième à l'indice de démocratie publié par The Economist ; la Turquie, toujours présente dans le Nord de la Syrie, dont elle viole le territoire – Florence Parly avait déclaré cesser les livraisons d'armes à ce pays mais celles-ci ont manifestement repris, sans que nous sachions ce qui justifie un tel changement. Par ailleurs, nous fournissons du matériel à l'Inde et à son adversaire potentiel, le Pakistan, tous deux dotés de l'arme nucléaire mais non signataires du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), ce qui pose de graves problèmes.

En matière de solvabilité, certains pays soulèvent des interrogations : l'Égypte est un État quasiment failli ; la Grèce est notre premier client en Europe, avec 1 milliard d'exportations livrées sur un total de 1,5 milliard en Europe, alors même que le gouvernement de ce pays tente de faire passer une nouvelle cure d'austérité en portant la durée légale du travail à 78 heures par semaine.

Se pose également la question de la continuité des perspectives que nous envisageons dans nos analyses. Au Niger, nous cédons des biens, notamment des hélicoptères – les putschistes sont ravis.

Enfin, je m'interroge sur les « multipays », qui ont bénéficié d'autorisations d'exportation à hauteur de 25 milliards sans que l'on sache réellement à quoi ils correspondent – j'ai peine à croire que l'on consacre un tel montant à couvrir des salons.

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